Mers mortes, Aurélie Wellenstein.

Les humains ont massacré les mers et les océans. L’eau s’est évaporée ; les animaux sont morts. Quelques années plus tard, les mers et les océans reviennent. Ils déferlent sur le monde sous la forme de marées fantômes et déplacent des vagues de poissons spectraux, tous avides de vengeance. Les fantômes arrachent leurs âmes aux hommes et les dévorent. Bientôt, les humains eux aussi seront éteints… Leur dernier rempart face à la mort : les exorcistes. Caste indispensable à l’humanité, les exorcistes sont bien entendu très convoités. L’un d’eux, Oural, va se faire kidnapper par une bande de pirates qui navigue sur les mers mortes à bord d’un bateau fantôme. Voilà notre héros embarqué de force dans une quête sanglante et obligé, tôt ou tard, de se salir les mains…

Cette année, comme les deux années précédentes, j’ai la chance de participer avec mes collègues de compèt’ au Prix Imaginales des Bibliothécaires ; contrairement aux années précédentes, je vais tâcher de chroniquer ce que je lis, en commençant par Mers mortes (même si en réalité, c’est le deuxième titre que j’ai lu dans le cadre de ce prix ; le premier c’était Chevauche-Brumes).
Malgré l’engouement général autour de ce roman (si j’en crois les multiples nominations qu’il connaît à un tas de prix !), je dois dire que j’en suis ressortie plutôt mitigée.

D’abord, il m’a globalement manqué des éléments pour pleinement profiter de l’intrigue. Celle-ci fait évoluer les personnages dans un environnement aussi hostile qu’aride, puisque l’eau s’est évaporée, ce qui a entraîné la disparition de tous les animaux, notamment des animaux marins. Or, première vraie question : si l’eau s’est évaporée, comment les personnages peuvent-ils survivre ? On parle d’une situation qui dure depuis 10 ans. J’entends bien que l’on nous dit qu’il reste « quelques poches d’eau », mais l’explication n’est pas franchement convaincante (en tout cas, elle ne m’a pas suffi). De même, si l’eau est à ce point rationnée, que mangent les personnages (et les animaux qu’ils croisent ?). Globalement, la végétation est morte, et il est assez difficile d’imaginer ce qu’ils peuvent se mettre sous la dent. Mais on nous parle d’agrumes, de céréales… comment tout cela pousse-t-il ? Comment les personnages s’hydratent-ils ?
Toujours du côté de l’intrigue, j’ai trouvé la conclusion assez brouillonne. Attention, je spoile.
Certes, les personnages parviennent à résoudre le problème qui les occupait. Pourquoi ? Comment ? Mystère. Cette absence totale d’explication m’a clairement frustrée. Je sais pourtant qu’il s’agit d’un roman fantastique, et que c’est le concept du fantastique de ne pas expliquer les tenants et aboutissants. Mais j’aurais aimé un minimum d’explications, un peu plus que « ça marche, parce que c’était supposé marcher ». Ceci étant dit, c’est assez cohérent avec le début du roman : on pose comme pré-requis que l’eau s’est évaporée, mais sans aucune explication. Si elle a disparu, où est-elle passée ? En quoi s’est-elle transformée ? Comment toute cette masse a-t-elle pu disparaître si vite ? Mystère et boule de gomme.

Par ailleurs, difficile pour moi de m’accrocher aux personnages, malgré des idées intéressantes. Oural, le personnage principal, est exorciste. Ce qui signifie qu’à l’aide de ses pouvoirs, il est supposé repousser les marées fantômes. À bord du vaisseau des pirates qui l’ont enlevé, il fait de même. Franchement, ça claque, et il ne fallait pas plus pour faire mon bonheur. Sauf que. Oural est une vraie tête à claques (justement), qui jamais ne change. Ses décisions sont – au mieux – complètement idiotes et le pire, c’est quand même qu’il s’y enlise. Dans ses récits de pensées, il se la joue « mec qui a conscience de ses failles et travaille à s’améliorer », mais ce n’est jamais suivi d’effet, et cette attitude a tendance à m’agacer prodigieusement. Pour ne rien vous cacher, j’ai même souvent souhaité qu’il trépasse. Tout cela combiné a fait que j’ai eu de plus en plus de mal à m’accrocher.

D’autant que si le message est vraiment intéressant, je l’ai malheureusement trouvé hyper moralisateur. A tel point qu’il m’a semblé empiéter complètement sur l’intrigue, au détriment de celle-ci.  Et pourtant, il y a de vrais morceaux de bravoure dans le texte. Au cours de ses – nombreux – cauchemars, Oural rêve qu’il s’incarne dans des animaux marins décimés par la cruauté humaine (au cours de « traditions » inhumaines), par la surpêche, par la pollution, soit par l’effet final de la disparition des eaux. Ces passages, beaucoup plus violents que le reste du roman, s’avèrent aussi beaucoup plus prenants et finalement nettement plus percutants que les discours très moralisateurs de Bengale.

Sentiment mitigé dans cette lecture, donc. Autant j’ai adoré l’idée de départ des marées fantômes combattues par des exorcistes, autant le côté un peu superficiel de l’intrigue, supplantée par un message un peu trop présent – quoique VRAIMENT utile – m’auront fait décrocher. Et pourtant, je le répète, le concept est bien trouvé et s’attaque à un sujet d’envergure, raison pour laquelle je n’ai pas totalement détesté ma lecture. De plus, j’ai trouvé les personnages plutôt bien trouvés (même si j’avais envie de claquer Oural) et l’intrigue narrée dans un style fluide. Difficile de trancher, donc !

Mers mortes, Aurélie Wellenstein. Scrineo, mars 2019.

J’ai lu ce roman à coups de 5 chapitres avec Camille, qui a patiemment supporté mes soupirs !

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4 commentaires sur “Mers mortes, Aurélie Wellenstein.

  1. Symphonie dit :

    J’en suis ressortie mitigée pour les mêmes raisons.

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