The Five Crowns #1, A. K. Mulford.

Le prodigieux destin d’une sorcière rouge.
Depuis le massacre de sa famille et de son peuple, Remy a dû apprendre à cacher ses pouvoirs pour survivre et accepter une vie de fugitive, clandestine, chaotique et incertaine. Aussi se croit-elle perdue lorsqu’elle est capturée pour ses dons de sorcière rouge par un prince fae, connu pour sa vie dissolue et ses prouesses guerrières, Elle ne tarde pourtant pas à découvrir que les intentions de cet homme sont plus complexes qu’elle ne le craignait et surtout loin d’être innocentes à son égard, ce qui la surprend mais n’est pas tout à fait pour lui déplaire…
Une histoire « ennemies-to-lovers », dans un univers fantasy sombre et envoûtant.

Si vous êtes habitué.e de ce blog, vous vous demandez peut-être pourquoi, mais pourquoi j’ai lu de la romantasy alors que clairement, ce n’est pas ma tasse de thé. Je vais être honnête : c’était une lecture obligatoire de ma PAL de boulot. Je ne vous ferai pas l’affront de vous dire que je n’ai pas tremblé en y découvrant ce titre. MAIS, j’ai tout de même abordé ma lecture avec les yeux de la bienveillance.
Spoiler : ça n’a pas suffi.

Alors, par où commencer ?
Allez, les personnages. Ceux-ci sont classiques à souhait (c’est dingue de voir que sur un genre aussi jeune que la romantasy, il y a déjà des poncifs si ancrés) : des sorcières, des faes, de la royauté qui traîne au milieu. Je veux pas balancer, mais c’est vu et revu. Dès le départ, la narration ne sait pas où elle va : on tente de nous romantiser « l’enlèvement » de Remy par les faes, alors qu’en fait, suite à une petite échauffourée, elle les suit somme toute de son plein gré. Deuxième chapitre, et j’étais déjà en train de me dire « Mouais » – oui, vraiment, ça partait mal. Là-dessus, je m’aperçois que la protagoniste, Remy, s’appelle en fait… Remini. Fatalement, j’ai donc eu la chanson des Wampas en tête pendant toute ma lecture, ce qui ne m’a clairement pas aidée à compatir aux déboires des personnages (mais peut-être ma mauvaise foi avait-elle déjà commencé à pointer le bout de son nez).
Remini, donc, s’embarque à la suite de Hale, le-dit prince fae, à la réputation hautement sulfureuse. C’est de la romantasy donc, eh, devinez quoi ? ça part en relation sentimentale (pas la peine de crier au divulgâchis, c’est le principe même du genre !). Ceci étant dit, je veux bien que ce soit le concept, mais j’aurais apprécié un minimum de travail sur l’intrigue sentimentale. Celle-ci est hyper rapide et pas crédible pour deux sous, puisque l’autrice ne prend pas la peine de détailler ses personnages plus que l’étiquette qui les désigne (et les clichés qui vont avec). Remy, la jeune première, est soit une gamine décérébrée, soit une femme d’action accomplie (aucune nuance entre les deux) ; Hale est réputé sulfureux, mais au fond c’est un petit être sensible qui souffre (oui oui, on nage en plein cliché Good girl/Bad boy, et en plus c’est mal fait). Vraiment : en 2023, que ce soit en termes de romance ou de fantasy, on aurait pu s’attendre à mieux.

Le récit ne fonctionne donc que sur une accumulation de clichés qu’à la longue, j’ai trouvé particulièrement agaçante : à l’auberge, il n’y a qu’un seul lit ; les personnages sont « obligés » de se changer dans la même pièce ; ils doivent faire semblant d’être en couple… Et évidemment, le prince qui a kidnappé Remy est tombé amoureux d’elle immédiatement (on se demande bien pourquoi vu qu’elle a le charisme d’une huître), ce qui ajoute (non) de la tension aux fausses scènes de couple. C’est vu et revu, on s’ennuie. Là encore, je sais que c’est le principe même du genre, que de placer ces lieux communs, mais j’ai eu l’impression d’être face à une check-list de clichés à placer, lesquels se suivent à la queue leu leu. L’intrigue est donc particulièrement prévisible, ce qui gâche toute tentative de suspense (non pas qu’il y en ait).

Rapidement, le récit n’est qu’un prétexte à aligner les scènes de sexe épicées. Et justement, j’ai été particulièrement gênée par cet aspect. Pas parce qu’il y a des scènes de sexe en pagaille, non ! (même si c’est lassant à la longue). Mais plutôt par le déroulé de ces scènes. D’une part, Remy est dès la première incroyablement performante (alors qu’elle n’a, rappelons-le, pas vraiment d’expérience). Ce n’est pas réaliste. Mais le pompom sur la Garonne, c’est que le sexe est vu de façon très machiste. Seule la pénétration compte et la jeune femme s’oublie au profit de son compagnon. Heu pardon, mais en 2023, ce n’est plus possible ça ! Et ce d’autant plus dans une publication destinée à un lectorat adolescent. Je trouve lamentable de voir encore des relations aussi arriérées dans les romans actuels : ce n’est pas parce que le couple copule partout et n’importe quand que c’est moderne !
Avec ça, les scènes (de plus en plus épicées) s’enchaînent au détriment du reste de l’aventure : la quête passe clairement au second plan, le récit étant noyé sous les ébats des protagonistes.

Me suis-je rattrapée aux branches, à savoir au worldbuilding ? Non, celui-ci étant inexistant. Le récit se déroule dans un univers scindé en 4 royaumes simplement postés aux 4 points cardinaux (pourquoi se casser le trognon…), avec chacun un ordre de magie différent répondant à une couleur (rouge, vert, bleu et marron). Les explications concernant le système de magie sont rares, pour ne pas dire inexistantes. Les sorciers sont répartis en ordres sans que l’on sache comment ni pourquoi (la magie est-elle héréditaire ? Quid des unions entre clans ?). Tout au plus sait-on que les sorciers sont une race à part entière, au même titre que les humains et les Faes… lesquels peuvent aussi être doués de sorcellerie. Vous suivez ? Moi non plus. Mieux : il est possible pour les elfes de se travestir en l’une ou l’autre des races existantes. Leur magie est alors comme oblitérée et inaccessible. Pourquoi ? Comment ? Eh bien on ne saura pas. De fait, de nombreux événements m’ont semblé relever du classique et si pratique TGCM (« ta gueule, c’est magique ») : pratique, comme je le disais, mais qui n’arrange pas tellement la crédibilité de l’intrigue, laquelle était déjà pas mal en souffrance.

Pour ne rien arranger, le style est, au mieux, passable. Pour être honnête, je me dois de signaler que le roman tend vers un énorme plot twist dans les derniers chapitres mais, pas de chance, le suspense est si inexistant qu’au moment de la-dite révélation, je n’ai pas été surprise pour deux sous (je me suis même dit « Ha ben oui, manquait plus que ça !). Il faut dire que le retournement de situation ne renouvelle lui non plus pas le genre et qu’on a déjà vu ça un peu partout ailleurs. Bref : circulez, il n’y a rien à voir.

J’ai donc bien bien peiné sur cette lecture (que je me suis néanmoins infligée en entier…), qui semble recevoir un bon accueil critique que je ne m’explique pas. L’intrigue, très faible, est truffée de clichés vus et revus ; les personnages et l’univers, quant à eux, sont stéréotypés à souhait. Aucun des deux genres (romance et fantasy) n’est servi par ce roman et, pire, je trouve que la romance est particulièrement archaïque – je m’attendais à mieux en 2023, franchement. Je ne signerai donc pas pour la suite !

The Five Crowns #1, La Cour de la Haute-Montagne, A.K. Mulford.
Traduit de l’anglais (Nouvelle-Zélande) par Alice Delarbre. Slalom, octobre 2023, 400 p.

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