L’Héritière, Testament #1, Jeanne-A. Debats.

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« Je m’appelle Agnès Cleyre et je suis orpheline. De ma mère sorcière, j’ai hérité du don de voir les fantômes. Plutôt une malédiction qui m’a obligée à vivre recluse, à l’abri de la violence des sentiments des morts. Mais depuis le jour où mon oncle notaire m’a prise sous son aile, ma vie a changé. Contrairement aux apparences, le quotidien de l’étude qu’il dirige n’est pas de tout repos : vampires, loups-garous, sirènes… À croire que tout l’AlterMonde a une succession à gérer ! Moi qui voulais de l’action, je ne suis pas déçue. Et le beau Navarre n’y est peut-être pas étranger. »

La fantasy urbaine, couramment renommée – à tort ! –  bit-lit, a depuis quelques années le vent en poupe. Les auteurs anglo-saxons dominent d’ailleurs le marché et les romans se déroulant dans les immensités urbaines américaines sont légion.
En France, et par un auteur français, c’est tout de même plus rare. Autant dire que L’Héritière, de Jeanne-A. Debats, premier tome de la série Testament se fait donc immédiatement remarquer par sa seule origine. Et lorsque que le contenu est apte à aller se faire rhabiller les grands noms du genre, une seule chose à dire : foncez !

L’Héritière, c’est l’histoire d’Agnès Cleyre, sorcière et orpheline de son état. Pour elle, la peine est double : non seulement elle vient de perdre toute sa famille mais, en plus, son talent de sorcière ressemble plus à une malédiction qu’autre chose. En effet, elle a le maudit talent de percevoir les fantômes, mais s’avère incapable de s’en débarrasser, d’autant moins lorsque ceux-ci se montrent agressifs. Or, Agnès aimerait bien aller fleurir la tombe de ses parents, au Père-Lachaise. Qu’à cela ne tienne. Le roman s’ouvre donc sur une scène quasi ubuesque d’une Agnès en jupe droite et talons de 10 cm, bourrée comme un coing pour repousser les fantômes, en train d’escalader les grilles du fameux cimetière. Inutile de dire qu’il faut moins de deux pages pour plonger dans l’ambiance.

Et cela continue dans la même veine ! Agnès est rapidement recruté par Géraud – dont la nature magique est indéniable – son oncle, avocat spécialiste de l’Altermonde. Évidemment, le cabinet ne traite que des affaires ayant trait aux vampires, loups-garous et autres sorciers. D’ailleurs, l’associé de Géraud est une sirène, leur collaboratrice une roussalka. Quant à leur homme de main, il s’agit de Navarre, un vampire qui a déjà officié pour le Vatican – et dont les aventures sont narrées dans l’excellent Métaphysique du vampire, de la même auteure.

Avec L’Héritière, Jeanne-A. Debats quitte donc son genre de prédilection – la SF – pour la fantasy urbaine et la transition est parfaitement maîtrisée. Elle déploie, dans ce premier tome, une intrigue savamment menée et aux nombreuses ramifications. On s’en doute, les successions et autres querelles chez les surnaturels sont encore plus compliquées que chez les commun des simples mortels, les premiers ayant eu plus que des lustres pour ruminer leurs griefs. Jeanne-A. Debats réinvestit le folklore mythologique européen et dresse une galerie de personnages aussi complexes qu’attachants. À travers eux, on (re)découvre les spécificités propres à chaque créature et une Histoire séculaire pour le moins mouvementée. Inquisition, successions royales, mouvements populaires et sociaux, scandales financiers, il semblerait que vampires, garous et éternels soient de toutes les parties. Mine de rien, le roman apporte son lot de précisions et anecdotes historiques : le travail de recherche est fourni et vient alimenter  l’intrigue générale.
Là-dessus se greffe donc une intrigue complexe, qui va occasionner son lot de complots, trahisons, recherches alambiquées et autres batailles rangées. Impossible de s’ennuyer tant l’intrigue se marie à merveille avec ce folklore réinvesti. De plus, le suspense est au rendez-vous, qu’il s’agisse de l’affaire en cours, des affaires du cabinet, ou de celles de cœur d’Agnès.

À ce propos, si vous suivez ce blog, vous savez que la fameuse bit-lit n’est vraiment pas ma tasse de thé. Non, les héroïnes faussement badass qui se pâment dès qu’apparaît à un coin de pages des pecs assaisonnés à la testostérone, ce n’est franchement pas ma tasse de thé. Mais j’aime la fantasy urbaine, qui fait intervenir toutes ces créatures surnaturelles, dans un environnement urbain – et qui peut ne pas dédaigner une sous-intrigue plus sensuelle. Heureusement, donc, L’Héritière tient plus de la seconde que de la première : ce qui se passe dans le lit d’Agnès a certes de l’importance, mais a le bon goût de ne pas prendre le pas sur le reste de l’histoire. De plus, la-dite Agnès ne jette pas aux orties sa personnalité pour les beaux yeux du premier mec qui passe. Et ça, c’est quand même assez rare dans le genre pour être signalé !

Avec L’Héritière, Jeanne-A. Debats parvient à coller aux meilleurs topoï du genre tout en proposant une intrigue, des personnages et un univers originaux : chapeau ! Tout ça d’une plume fluide, alliant paragraphes acérés et gouaille plus légère, dans un style qui se marie à toutes les émotions. En d’autres termes : j’ai adoré !

Testament #1, L’Héritière, Jeanne-A. Debats. ActuSF, octobre 2014, 392 p.

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13 commentaires sur “L’Héritière, Testament #1, Jeanne-A. Debats.

  1. Lianne dit :

    Très sympa ce livre, j’avais moins aimé le second mais je continuerais la série avec plaisir =)

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  2. […] : Café Book Addict ; Célindanaé (Au pays des cavetrolls) ; Pauline (Les éditions secrètes) ; Sia (Encres & Calames) ; Thomas Riquet (Mythologica) ; Xapur (Les Lectures de […]

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  3. Ryuuchan dit :

    Hello ! Ravie que ce livre t’ait plu. Côté bit-lit, je suis exactement comme toi, et le livre m’a d’autant plus titillée positivement que, je ne sais pas si tu y as fait attention, mais à 2-3 reprises, l’auteure se fait plaisir, et de manière cocasse (notamment les réflexions quand Herfauges s’enfile les bouquins bit-lit que les filles lui ramènent, je me suis bien bidonné : Debats égratigne joyeusement ce que je ne supporte pas en bit-lit 😀 ).

    … je sais pas si tu as vu : il y a une suite : Alouettes 🙂

    Bonne soirée ^^

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    • Sia dit :

      J’ai déjà Alouettes :)!
      J’ai adoré les passages où ils évoquent les romans de gare que les filles vont chercher à la librairie, j’en riais toute seule ! Et il y a d’autres endroits où j’ai eu l’impression que l’auteur se faisait plaisir en parodiant.

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  4. Elhyandra dit :

    Coucou,
    Depuis le temps que j’entends parler de cette auteure et surtout de ce livre va falloir que je teste 😀 un de ces jours.

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  5. Camille dit :

    Ça y est! Je me souviens pourquoi je ne dois pas venir sur ton blog! Ma wish list (et souvent ma Pal aussi) se remplit trop vite! 😀
    Ça a l’air bien sympa ce livre! Merci de la découverte! ^^

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  6. Lupa dit :

    Piquée de curiosité, me voilà dans l’impossibilité d’ignorer ce titre ! Je le note avec empressement, merci 🙂

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