Passé déterré, Clément Bouhélier.


Quelque part dans la campagne autour de Vernay, un car scolaire conduit par un chauffeur saoul s’écrase dans le fossé. Sept enfants périssent dans l’accident. Six ans plus tard, lorsque l’ancien conducteur du car est retrouvé assassiné chez lui, les souvenirs se réveillent. Marquée par la disparition de son fils, Estelle Baupin est aspirée dans le tourbillon de l’enquête. Elle comprend rapidement que des forces mystérieuses œuvrent dans l’ombre, bien décidées à faire payer les responsables du drame. Alors que les morts se multiplient, Estelle sait que pour les arrêter, elle doit découvrir le lourd secret qui pèse sur Vernay. Et faire face à son propre passé.

J’ai lu ce roman dans la semaine qui comprend les festivités d’Halloween/Samhain et dire que le thème collait pile poil au moment frise l’euphémisme. Je ne sais pas trop à quoi je m’attendais. Du thriller, oui, sans doute un peu de fantastique, mais certainement pas à flipper autant ! À tel point que j’ai dû alterner avec un roman mettant moins en péril mon p’tit cœur (surtout le soir, histoire de dormir). Mais ça m’ennuyait quand même de ne pas savoir ce qu’il allait advenir des personnages. Bref, tout ça pour dire que Passé déterré m’a à la fois terrifiée et tenue en haleine, du début à la fin !

Le début nous plonge directement dans le vif du sujet avec une scène de meurtre assez glauque, mais peu explicite : qui agit ? Ou… quoi ? Le fait de changer, directement après le prologue, d’environnement, instaure donc dès le départ un climat de tension. Laquelle ne va pas redescendre avec la scène du fameux accident de bus, meurtrier s’il en est, et qui est le point de départ de tout. Lorsque l’on fait un nouveau bond dans le temps pour arriver six ans plus tard, où des événements énigmatiques commencent à se produire, on est déjà baignés par une ambiance des plus étranges.

Et c’est vraiment à quoi tient tout le roman. Car pour être honnête, au départ, il ne se passe pas grand-chose : on suit des familles endeuillées qui ont du mal à se relever, un village qui vit un peu replié sur lui-même… Rien que de très banal, somme toute, quand on pense au traumatisme subi. Sauf que derrière ces descriptions ordinaires, on sent planer un malaise certes diffus, mais bien prégnant, qui ne tarde pas à virer à la menace sourde. Là, il n’aura guère fallu plus que la mention de créatures errant dans les rues, les yeux rouges et à la recherche de sang frais (de préférence extrait violemment) pour me faire frémir ! C’est d’ailleurs par toutes petites touches subtiles que Clément Bouhélier installe l’ambiance fantastique et ces petits détails dynamisent incroyablement l’histoire. Et cela démarre tellement vite que je me suis retrouvée à attaquer la deuxième partie en ayant à peine vu passer la première – c’est dire si j’étais dedans.
De plus, on fait quelques allers-retours entre passé et présent, en retournant non pas à l’époque de l’accident, mais à la fin de l’Occupation, alors que Vernay était sous la coupe allemande. Et même si l’on ne voit pas, de prime abord, ce qui lie les deux époques, le récit distille suffisamment d’indices pour que l’on commence à se poser pas mal de questions – ce qui ne fait que le rendre plus prenant.

Il y un autre point qui a certainement joué dans le fait que j’ai autant accroché : les personnages. Parmi ceux-ci, celle qui se détache vraiment est Estelle, la mère d’une des victimes de l’accident. On la suit dans son quotidien de professeure de lettres, dans le marasme qu’est devenue son existence depuis la perte de son petit garçon. Évoquer le deuil, ce n’est jamais facile mais Clément Bouhélier est parvenu à trouver un excellent équilibre et ce pour chacun de ses personnages. On suit principalement Estelle, mais elle n’a pas été la seule à subir le drame et l’auteur montre combien on peut réagir différemment au traumatisme (et surtout qu’il n’y a pas de réponse toute faite, chacun fait comme il le peut). Ce choix collait vraiment bien à l’intrigue car, évidemment, on en vient à se demander s’ils ne sont pas tous fous (tout simplement), et que l’accident a causé bien plus de ravages que ce qu’on aurait pu penser. Avant que l’on ne bascule donc complètement dans le fantastique, il y a donc un léger entre-deux artistiquement maintenu, et qui a sans doute contribué au fait que j’aie tellement accroché à cette histoire.

Passé déterré m’a donc tenue en haleine du début à la fin, en plus de me faire hérisser les cheveux sur la tête à plusieurs reprises – et m’empêcher de dormir, soit dit en passant. L’intrigue vire très vite au fantastique, avec moult créatures sombres et attaques inexpliquées, qui ne font que faire piétiner l’enquête – pas mal cantonnée au point mort, il faut dire, ce qui n’empêche pas la tension de s’installer, ni de durer. J’étais tellement prise par le récit que la fin est même arrivée un brin trop vite à mon goût… Pour me laisser, en plus, sur un retournement de situation échevelé qui remet presque tout en question ! Voilà un auteur dont je note assurément le nom !

Passé déterré, Clément Bouhélier. Critic, octobre 2017, 380 p. 

4 commentaires sur “Passé déterré, Clément Bouhélier.

  1. Tesrathilde dit :

    Wow. 😀 😀 C’est certainement pour moi aussi !

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  2. Solessor dit :

    Ah ! Enfin un livre censé faire peur qui fait vraiment peur ! C’est essentiellement avec ce genre que j’ai commencé à lire gamine, et devenue adulte je suis toujours restée sur ma faim… Je note !

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