Miss Peregrine et les enfants particuliers, Ransom Riggs.

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Jacob a toujours eu une existence parfaitement normale malgré l’étrangeté de son grand-père, survivant de la seconde guerre mondiale. Celui-ci a toujours raconté  à Jacob de nombreuses histoires, mettant en scène des enfants particuliers, aux pouvoirs spéciaux, d’après lui. Enfant, Jacob y croyait dur comme fer. Et puis, il a grandi, et la magie a peu à peu quitté son monde, laissant place à l’effarante banalité : l’esprit de son grand-père errait dans des limbes inaccessibles, et la folie le grignotait peu à peu. Et c’est ainsi qu’une réconfortante routine s’est installée.
Jusqu’au jour où il se passe quelque chose d’absolument terrible. Ce jour-là, la vie de Jacob prend un sérieux virage et se sépare selon un point central, qui marquera désormais l’Avant et l’Après.
Car le jour où il voit les monstres et s’aperçoit que son grand-père ne fabulait pas, il comprend que sa vie ne sera plus jamais la même. En partant à la recherche des enfants particuliers, Jacob va tâcher de rattraper le temps perdu pour mieux comprendre son énigmatique aïeul.

La première chose à remarquer en prenant ce livre, c’est qu’on a affaire à une très belle édition polychrome. La typographie, le papier, les motifs et les pages en couleur, tout est très bien réalisé, et cela donne un très beau livre, agréable à feuilleter et à regarder. Il est rare que je m’extasie sur un livre en tant qu’objet mais là, je dois avouer que la remarque s’imposait. Miss Peregrine et les enfants particuliers est un roman qui, visuellement, en jette.

Côté contenu, en revanche, je dois avouer que j’ai été un peu déçue. La quatrième de couverture promet une intrigue qui, finalement, s’avère totalement différente, et bascule allègrement dans le fantastique, auquel je ne m’attendais pas du tout. Cela étant, ce roman reste un très bon roman, à l’intrigue intéressante. Celle-ci se déroule sur deux niveaux : la progression intime de Jacob, un personnage en souffrance, en quête de réponses, et la progression de l’enquête sur l’histoire d’Abe, le grand-père de Jacob. L’auteur parvient à mêler très habilement les deux niveaux, les faisant progresser en parallèle, ce qui donne cette intrigue à l’apparence dense, et à la complexité bienvenue. Les choses mettent de longs chapitres à se mettre en place et, passé un certain point, on comprend que cette mise en place était absolument nécessaire à la bonne compréhension des tenants et aboutissants. Ce qui est bien, ici, c’est que la mise en place, bien qu’elle soit longue, n’est pas ennuyeuse. Le lecteur est plongé dans une sorte d’expectative très stimulante, et l’auteur sait distiller mystère, et envie de poursuivre la lecture dans ses lignes. Le récit est très maîtrisé (et très bien écrit, ce qui ne gâche rien), et on n’a ni l’impression de s’ennuyer, ni celle de se faire balader par un auteur en manque d’idées.

A côté de ça, le gros plus ce sont bien sûr les photos qui émaillent le récit. Étranges, un peu effrayantes ou tout simplement joliment originales, elles sont très bien choisies et illustrent fort bien le propos de l’auteur. Leur âge est, bien sûr, une sorte de valeur ajoutée, puisque selon l’auteur, toutes font partie de collections privées anciennes et n’ont pas été retouchées. Elles sont donc parfaitement adaptées à la période durant laquelle se déroule l’histoire (du point de vue de l’esthétique même, ou de ce qui y est représenté), et collent vraiment bien au texte. Le seul bémol, c’est que certaines tombent parfois un peu comme un cheveu sur la soupe, et qu’on sent que l’auteur a voulu à toute force les caser, ce qui casse un peu le rythme général de l’intrigue, malheureusement (mais cela ne concerne qu’un faible pourcentages de photos). Associées au récit bien géré, aux personnages atypiques – mais néanmoins bien choisis -, elles font de ce roman une très agréable découverte.
L’autre point négatif (car il y en a malheureusement un autre), c’est qu’une fois le récit bien implanté (disons à la moitié du livre), les développements manquent un peu de surprise, et l’intrigue file vers un affrontement vaguement manichéen et bien pressenti décliné comme suit  : la bande des gentils enfants un peu spéciaux VS la bande des gros méchants vraiment vilains (ce qui s’avère, finalement, sans grande surprise). De plus, dès l’instant où l’intrigue a basculé dans le fantastique, je m’attendais vraiment à une ambiance hyper glauque et stressante, accordées aux photos, qui n’arrive jamais (ou alors par très très légères touches), ce qui fait que je me suis sentie légèrement flouée sur la marchandise. Et ce d’autant plus que la fin du tome 1 démontre très clairement qu’il faut s’attendre à une suite (je m’attendais vraiment à un one-shot). Cela dit, voyons le côté positif : cela signifie que l’on repartira à l’aventure aux côtés de ces personnages hors-norme et ça, c’est vraiment chouette.

En gros, et pour conclure en quelques mots (et, qui sait, peut-être vous donner envie de le lire), je vous dirais que Miss Peregrine et les enfants particuliers, c’est une bonne intrigue sous forme de roman-photo (fait assez original pour être signalé), qui flirterait même allègrement avec la S.F. (que demande le peuple?) et soutenue par des personnages aussi bizarres que touchants, le tout présenté dans un packaging qui fait rêver. Ce n’est probablement pas le roman du siècle, mais on passe tout de même un très bon moment de lecture avec, et c’est tout ce qui compte !

Miss Peregrine et les enfants particuliers #1, Ransom Riggs. Bayard Jeunesse, 2012, 432 p.
7,5/10

20 commentaires sur “Miss Peregrine et les enfants particuliers, Ransom Riggs.

  1. Lou-b dit :

    Je suis en plein dedans ! =) 

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  2. Pauline dit :

    J’ai bien aimé ce livre qui est très bien fait mais je suis d’accord en ce qui concerne 4ème de couv, je m’attendais à quelque chose d’assez différent!

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    • Sia dit :

      Oui, c’est un objet magnifique (chose à laquelle je ne suis habituellement pas trop sensible), mais la quatrième de couverture n’est pas terrible, c’est dommage !

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  3. solessor dit :

    En commençant la lecture de ta chronique, je m’attendais à quelque chose deplus négatif ! Je me suis trompée apparemment ! ^^ Ceci dit, en allant jeter un oeil aux photos dont tu m’avais parlé, et que j’ai trouvé assez flippante, je m’attendais à un roman bien plus perturbant, qui met mal à l’aise… et je suis un peu déçue que ce ne soit pas ça, du coup j’ai moins envie de le lire !

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    • Sia dit :

      Après, ça reste un bon roman. En le finissant, j’étais hyper déçue mais, en relativisant, je me suis dit que le roman était intéressant et bien fait. Dommage pour l’ambiance (je m’attendais à un truc nettement plus glauque et déjanté), mais ça reste une bonne lecture.

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  4. Lou-b dit :

    Pour le moment je n’ai toujours pas fini, mais j’aime bien l’univers j’espère que ça va continuer comme ça =) 

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  5. J’ai remarqué ce livre il y a quelques mois et l’avais mis dans ma WL, un peu oublié depuis mais du coup, ton article malgré les points négatifs que tu soulignes, me donne quand même bien envie de le lire… Peut-être même à cause de l’ambiance étrange et de ces photos ^^

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    • Sia dit :

      L’ambiance et les photos sont vraiment sympa, c’est vrai, mais la quatrième de couv’ vend du rêve qu’on ne retrouve pas par la suite (d’où l’aspect un peu négatif). En plus, comme c’est un premier tome, il souffre un peu de l’effet « présentation », auquel on ne s’attend pas du tout. Je pense que si on aborde la lecture en n’ayant pas ces a priori là en tête, ça se passe nettement mieux, et on peut se laisser convaincre par ce que propose Ransom Riggs !

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  6. C’est bien pour ça que je lis rarement les 4èmes de couverture ^^ Je préfère me baser sur le résumé des personnes qui ont lu le livre. En fait, les cas où je lis le résumé éditeur sont quand je vais en librairie et que je tombe sur un livre dont je n’ai pas entendu parler et parfois à la bibli 🙂

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    • Sia dit :

      Je trouve que les résumés étaient meilleurs avant ; plus ça va, plus ils sont ratés, je trouve. C’est dommage, parce que c’est essentiel pour choisir un bouquin (en librairie et bibliothèque, par exemple).

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  7. Radicale dit :

    Ha cette 4ème de couv’ à la con, je me suis demandée où ils avaient bien pu aller chercher ça… Par contre moi du coup ça m’a fait l’effet inverse, je n’étais pas emballée par l’histoire du nazisme, beaucoup plus par le côté fantastique.

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    • Sia dit :

      En fait, je venais juste de lire Ce qu’ils n’ont pas pu nous prendre, donc j’étais dans la période « récits de guerre », ce qui fait que j’attendais vraiment que ça parle clairement du nazisme, sous le prisme fantastique. D’où ma légère déception, mais c’est essentiellement dû au moment où je l’ai lu, je pense. Dans d’autres circonstances, j’aurais certainement plus apprécié !

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  8. Radicale dit :

    Ha oui je comprends. Moi, à l’inverse, j’ai failli passer à côté parce que je ne suis pas trop « roman historique », beaucoup plus littérature fantastique ou de science-fiction…

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    • Sia dit :

      Moi aussi mais de temps en temps, ça ne me déplaît pas ! Ce résumé est donc assez raté, je crois que tout le monde tombera d’accord là-dessus.

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  9. […] (Gallimard) L’Éveil des macchabs, de Ty Drago (Bayard) Humains, de Matt Haig (Hélium) ♦ Miss Peregrine et les enfants particuliers (Tomes 1 et 2), de Ransom Riggs (Bayard) La Malédiction Grimm, de Polly Shulman […]

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  10. […] Miss Peregrine et les enfants particuliers (Tomes 1 et 2), de Ransom Riggs […]

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  11. Mince, dommage que tu aies été déçue 😦
    J’ai bien aimé – c’est vrai que l’histoire manque parfois de subtilité mais j’ai quand même hâte de lire la suite pour voir ce que l’auteur nous réserve 🙂

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    • Sia dit :

      Je crois que je m’attendais vraiment à quelque chose de plus centré sur la guerre. J’ai bien aimé, mais sans plus, en fait – et je ne pense pas aller voir le film, d’ailleurs.

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