C’était juste un jeu, David Moitet.

Simon et sa petite bande adorent pratiquer l’Urbex, l’exploration de lieux abandonnés. Pour tous, c’est une manière de s’évader d’un quotidien familial pesant et, pour être populaire au lycée, il n’y a rien de mieux car les vidéos de leurs exploits cartonnent. Lorsque Vlad, un nouveau, débarque dans leur classe, La belle Hina s’intéresse à lui, au grand désespoir de Simon. Le garçon décide alors de jouer des tours à Vlad, en guise de bizutage. Jusqu’à la blague de trop : Un rendez-vous nocturne est donné dans une usine désaffectée. L’idée est juste d’effrayer le nouveau, rien de bien méchant. Mais l’un d’entre eux va disparaître et tout va basculer… Une enquête commence. Et cette fois, ils vont avoir peur… pour de vrai !

J’aime beaucoup les romans de David Moitet aussi étais-je très curieuse de découvrir sa nouvelle parution !

Pas de touche fantasy ou fantastique, cette fois, mais un bon polar contemporain sur fond d’urbex, une activité qui semble bien seoir au genre – Le bureau des affaires non résolues de Christophe Guillaumot en parle aussi !
Le roman suit une bande de quatre adolescents (Simon, Zia, Tom et Hina) qui pratiquent donc cette activité à l’insu de leurs parents et connaissent aussi leur lot de questions et autres soucis liés à leur scolarité. C’est d’ailleurs comme cela que tout commence : un nouveau arrive au collège, s’immisce malgré lui dans le quatuor extrêmement soudé et cette arrivée va tout chambouler. Les tensions montent dans le petit groupe et vont amener à la disparition d’un des adolescents – et j’ai été surprise, car la personne qui disparaît n’est pas celle à laquelle je pensais de prime abord !
Cette tension psychologique est notamment présente dans la première partie, celle qui met patiemment en place les tenants et aboutissants de l’intrigue.

La seconde partie, quant à elle, ne démérite pas côté rythme, mais a un côté un peu plus attendu qui fait que je me suis sentie légèrement moins impliquée dans ma lecture. Comme dans beaucoup de romans destinés aux adolescents, ceux-ci prennent le pas sur les enquêteurs, mènent leur propre enquête au mépris du danger et, il faut le reconnaître, résolvent parfois certaines situations de façon assez peu réaliste – disons que les planètes s’alignent souvent pour eux !
En même temps, l’auteur en a complètement conscience et joue de cet état de fait, qu’il nomme « l’effet Stranger Things », évoquant justement ces ados qui se substituent aux adultes lorsqu’il serait justement plus sage de leur faire appel ! Cela atténue, de fait, l’aspect un peu moins réaliste de cette seconde partie.

Le récit est vraiment porté par ses personnages, auxquels l’auteur a accordé beaucoup de soin. Chacun a sa trajectoire, ses problématiques et/ou blessures. Et ils ne sont pas tous bons. Simon, notamment, n’est pas avare de farces ou répliques cruelles envers ses camarades de classe, toujours à la limite du harcèlement. Une attitude qui, elle aussi, favorise les tensions au sein du petit groupe, tout le monde n’appréciant pas « l’humour » du leader de la bande. Outre les scènes d’urbex et de vie au collège, on a aussi quelques aperçus des vies privées des personnages, et des différentes situations familiales qu’ils vivent, ce qui est l’occasion d’évoquer quelques thèmes comme le deuil, le divorce, les relations familiales ou encore la maladie. On n’échappe pas à quelques réactions caricaturales, mais rien de franchement gênant au regard de l’ensemble.

Avec C’était juste un jeu, David Moitet signe un roman pour adolescents vif et prenant, mêlant trajectoires personnelles et intrigue policière, le tout sur fond d’urbex. Le récit est rythmé par des chapitres courts, dans lesquels la tension est très présente. L’intrigue, comme les personnages, n’échappent pas à quelques clichés, mais rien d’insurmontable ou de particulièrement gênant. Les vies privées des personnages, que l’on entraperçoit au gré des chapitres, sont l’occasion de traiter de sujets plus profonds (comme la maladie, ou les relations familiales). En bref, l’auteur signe un roman unique qui, s’il n’est pas mon préféré dans l’ensemble de sa bibliographie, plaira sans aucun doute aux collégiens !

C’était juste un jeu, David Moitet. Didier jeunesse, 8 mars 2023, 169 p.

Si vous avez aimé, vous aimerez peut-être :

Mettre son grain de sel