Le Gardien invisible, La Trilogie du Baztán #1, Dolores Redondo.

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Le cadavre d’une jeune fille est découvert sur les bords de la rivière Baztán dans une étrange mise en scène. Très vite, la mythologie basque surgit : et si toute cette horreur était l’oeuvre du basajaun, un être mythologique ?
L’inspectrice Amaia Salazar, femme de tête en charge de l’enquête, se voit contrainte de revenir sur les lieux de son enfance qu’elle a tenté de fuir toute sa vie durant. Jonglant entre les techniques d’investigation scientifique modernes et les croyances populaires, Amaia Salazar devra mettre la main sur ce gardien invisible qui perturbe la vie paisible des habitants d’Elizondo.

Dolores Redondo squatte, avec sa Trilogie du Baztán (titre non officiel en français), le top des ventes en Espagne ; une adaptation cinématographique est même en cours de tournage !

Le moins que l’on puisse dire, c’est que cela démarre vite et bien : il ne faut pas attendre longtemps avant que l’intrigue montre des aspects un tantinet fantastiques et que la mythologie basque ne s’invite dans l’affaire. De fait, les scènes de crime multiplient les indices références au mythe du basajaun – sorte d’homme sauvage, à la fois protecteur de son espace naturel et croque-mitaine redoutable ; se prononce « bachadiaoun ».

Amaia Salazar, inspecteur chef au Bureau des Homicides de la police forale de Navarre est donc dépêchée aux alentours d’Elizondo, petite ville qu’elle a fui avec un immense plaisir et qui semble abriter quelques secrets de famille sur lesquels elle n’a guère envie de se repencher. De fait, l’intrigue oscillera sans cesse entre enquête policière, mythes, légendes et histoire personnelle d’Amaia. En effet, dès son retour, Amaia est parasitée par des angoisses terribles qui resurgissent et dans lesquelles s’entremêlent son passé, les éléments d’enquête et sa situation présente. De plus, elle est pétrie de contradictions : elle est un excellent flic, mais se fait allègrement détester par ses collègues en raison de ses bons résultats. Elle veut donc bien faire, mais ne souhaite pas être mal vue, sans toutefois bâcler son travail. Des intérêts difficile à concilier. Le personnage est extrêmement intéressant et fouillé à souhait : si l’enquête passe parfois au second plan, c’est pour mieux examiner la psychologie du personnage. Si Amaia est centrale, les autres protagonistes sont à l’avenant et tous s’avèrent aussi travaillés les uns que les autres et qui dépeignent une vaste palette d’émotions.
L’intrigue faisant appel aux mythes et légendes, elle est non seulement complexe à souhait, mais flirte en plus allègrement avec le fantastique. L’auteur s’appuie sur le folklore et les superstitions locales, les mâtinant de suffisamment d’éléments réalistes pour instaurer un doute raisonnable dans l’esprit du lecteur et ce quasiment jusqu’à la fin.

L’intrigue est, en outre, portée par une plume fluide et des descriptions puissamment évocatrices, qui donnent envie d’aller arpenter la vallée du Baztán. D’ailleurs, les lecteurs ne s’y trompent pas et ont relancé le tourisme local. On regrettera cependant que la traduction française soit riche en erreurs et incohérences, qui gâchent un peu la lecture…

Le Gardien invisible, excellent roman noir poétique, aura été une lecture fascinante, marquée par une plume soignée, une intrigue délicieusement complexe qui plonge dans les légendes basques et portée par des personnages fouillés, que l’on suit avec plaisir et que j’ai hâte de retrouver dans la suite, De chair et d’os. 

La Trilogie du Baztán #1, Le Gardien invisible, Dolores Redondo. Traduit de l’espagnol par Marianne Millon.
Stock, 2013, 464 p.

 

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2 commentaires sur “Le Gardien invisible, La Trilogie du Baztán #1, Dolores Redondo.

  1. Ça donne envie ! En plus je ne connais pas du tout les légendes basques, ça pourrait être l’occasion mais j’avoue que ton avis sur la qualité de la trad me fait peur …

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    • Sia dit :

      Je ne sais pas si cela gênerait un non-bascophone mais moi j’ai été un peu gênée par des tournures extrêmement étranges (des « Hein ?! Mais jamais de la vie, on ne dit pas ça comme ça ! »). Ceci dit, c’était vraiment les petits détails qui viennent gâcher une super lecture, ce n’est pas non plus insurmontable ou trop présent !

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