Les Manteaux de gloire, Sebastien de Castell

les-manteaux-de-gloire-sebastien-de-castell

 

Le roi est mort, les Manteaux de gloire, sa fidèle caste, ont été séparés. Falcio Val Mond et ses amis Kest et Brasti sont réduits à travailler comme gardes du corps pour un noble qui refuse de les payer. Il y a plus grave : une conspiration royale se trame dans la cité la plus corrompue du monde et menace tout ce pourquoi Falcio, Kest et Brasti se sont battus. S’ils veulent déjouer le complot et réunir les Manteaux de gloire, les trois amis ne pourront compter que sur leurs épées et le serment qu’ils ont prêté…

 

Premier roman pour Sebastien de Castell ! Et la première chose que l’on peut dire, c’est que le jeune auteur maîtrise l’art de la narration. On entre directement dans le vif du sujet : pas de temps mort, pas de pauses, on s’accoquine directement avec Falcio, Brasti et Kest, nos trois Manteaux de gloire déchus et, osons-le dire, franchement poissards. Après avoir été des magistrats itinérants chargés de faire respecter les lois (en les chantant, et ça c’est quand même la classe), ils sont devenus les hommes les plus détestés par la population, ce qui n’est pas évident pour trouver du travail ou faire ce dont on a envie. Heureusement, les trois hommes ont un sens de l’humour à toute épreuve, qui occasionne des réparties pour le moins mordantes et apporte une touche de légèreté bien appréciable à l’histoire.

Car celle-ci est plutôt sombre : le roi a été sauvagement assassiné, les Manteaux de gloire sont des parias et, évidemment, il y a de graves luttes politiques visant à mettre la main sur le pouvoir – et le trône qui va avec. Luttes politiques dans lesquelles notre trio va plonger tête baissée. Si cette partie est plutôt fournie, c’est l’univers et les personnages qui pêchent un peu.
En effet, la narration est menée à la première personne, puisque c’est Falcio qui raconte l’histoire : du coup, les autres personnages – notamment Brasti et Kest – semblent un peu plus fades, car moins creusés, n’étant pas toujours sous le feu de l’action. Heureusement, on se rattrape avec Falcio, dont la psychologie torturée est largement explorée – un peu trop, même parfois, tant son entêtement à ressasser sa culpabilité peut sembler agaçant ! De plus, les ressorts psychologiques de l’histoire sont à peine creusés et c’est bien dommage : on retrouve des événements hyper récurrents en fantasy, qui semblent presque plaqués là sans façons. Un peu comme si on partait du principe que le lecteur sait quel schéma appliquer dans ces conditions ! Du coup, on a l’impression d’aller un peu vite sur certains points et les réactions des personnages, pour spectaculaires qu’elles soient, semblent injustifiées, voire carrément disproportionnées.

Côté univers, c’est la magie qui semble à la fois trop complexe et pas assez détaillée. On y croise des poudres aux diverses propriétés, des amulettes, des sortilèges alambiqués, des expériences confinant aux manipulations génétiques, mais aussi des sorts liés aux Feys et à la magie propre à ce peuple. Tout cela forme un amalgame dont on a du mal à déterminer les limites et caractéristiques. En soi, ce n’est absolument pas gênant pour la lecture, soyons honnêtes, mais lorsque l’on aime savoir ce qui fonctionne, pourquoi et comment, c’est un peu léger.
Hormis ces petits points d’achoppement, on est dans de la fantasy à la Dumas : difficile de ne pas penser aux Trois Mousquetaires en suivant les aventures de nos trois larrons, surtout lorsqu’elles sont perturbées dès le départ par une véritable Milady de Winter ! Cet effet «Dumas» est accentué par les scènes de combat, nombreuses, extrêmement visuelles – quasi cinématographiques ! L’auteur s’y connaît et ça se sent : on adhère totalement aux multiples échauffourées qu’il nous présente, qui rythme le récit avec une cadence très confortable.

L’intrigue est donc rondement menée et, si on aurait apprécié que Falcio soit un poil plus malin (il met des plombes à comprendre les évidences, alors on finit par le prendre pour un bretteur talentueux mais un poil borné), on ne s’ennuie pas dans cette petite enquête mâtinée de vengeances diverses et variées. En plus, le roman dispose d’une vraie fin – ouverte – alors ce serait franchement dommage de se priver !

En bref, Sebastien de Castell offre un premier roman peut-être pas très équilibré (puisque l’univers manque de détails et que la psychologie des personnages n’est pas aussi creusée qu’elle l’aurait méritée), mais néanmoins très divertissant. Le rythme soutenu, le style très visuel et le trio roublard et cynique font le charme de cette première enquête du Cantor Falcio val Mond !

Les Manteaux de Gloire #1, Sebastien de Castell. Traduit de l’anglais par Mathilde Roger.
Bragelonne, juin 2015, 410 p. 

 

wielstadt-pierre-pevel

Cette entrée a été publiée dans Fantasy.

12 commentaires sur “Les Manteaux de gloire, Sebastien de Castell

  1. Miss Violette dit :

    Je viens de découvrir ce roman dans ma boîte aux lettres (gagné à un concours que je ne savais pas avoir gagné) et ta critique me donne envie de m’y plonger à présent sans hésitation. Merci de cet avis !

    J’aime

  2. cassie dit :

    arrrggggg je voulais l’acheter lundi mais je l’ai reposer dans les rayons après un accès de conscience, sotte suis je!!!!

    J’aime

  3. solessor dit :

    Ah, dommage pour les personnages pas assez creusés, ça me freine un peu en sortant d’Aeternia. Ceci dit, le reste a quand même l’air pas mal du tout !

    J’aime

  4. Licorne dit :

    De quoi mettre l’eau à la bouche… Je ne le passe pas mes priorités à cause du petit déséquilibre… mais il est noté dans un coin… Merci Sia

    J’aime

  5. […] Les Manteaux de gloire, quoique fort sympathique, s’est avéré un poil moins tripant que ne le promettait la mention « Révélation fantasy » en première de couverture, notamment parce que les personnages et l’univers n’étaient pas tout à fait creusés à mon goût. Mais au vu de l’histoire, du trio mis en place et du très bon compromis entre fantasy et roman de capes et d’épées, je lirai très volontiers la suite. […]

    J’aime

  6. […] Autres critiques : Gillossen (Elbakin) ; Jean-Philippe Brun (L’Ours inculte) ; Sia (Encres & Calames) […]

    J’aime

  7. […] Brown *Sebastien de Castell Brian Niemeier *Andy Weir *Alyssa […]

    J’aime

  8. […] ciel et enfer (Fleuve éditions), traduction d’Alexandra Maillard. – Sebastien DE CASTELL, Les Manteaux de gloire (Bragelonne), traduction de Mathilde Roger. – Isuna HASEKURA, Spice and Wolf, t. 2 (Ofelbe), […]

    J’aime

Mettre son grain de sel