Magicienne, Didier Quesne.

 

magicienne-didier-quesne

La tradition veut que les enfants roux soient suspectés d’être liés avec le Diable. Alors, quand on s’aperçoit que la petite fille née le jour de la fête des morts est rousse, il y a de quoi déclencher la vindicte populaire. Il est vrai que Sylve n’est pas une petite fille comme les autres. Bien qu’elle ne comprenne pas ce qui la différencie des autres. C’est vrai qu’elle possède de nombreuses facultés qui feraient trembler le moindre habitant de son village. Toutefois, il s’avérera qu’elle n’est pas un suppôt du Diable, mais une vraie magicienne …

Dans le duché de Matarne et aux alentours, il ne fait pas bon vivre lorsqu’on est roux… d’autant plus si l’on est une femme, bien faite de sa personne, intelligente et dotée de pouvoirs!
C’est l’histoire de Sylve que Didier Quesne nous raconte ici avec maestria.
Les personnages ont tous ce petit quelque chose en plus qui les rend attachants: Sylve, indépendante et fière peut tour à tour se montrer sans défense et extrêmement forte. Gault, quant à lui, perd un peu trop rapidement de sa superbe mais reste un personnage que l’on suit avec plaisir. Louise, de son côté, évite de justesse le cliché éculé de la femme guerrière et savante, et incarne à la perfection son rôle de gardienne, sans être omniprésente.

Les descriptions évocatrices qui émaillent le récit suffiraient à faire s’évader le lecteur… mais ce serait sans compter les dialogues! Didier Quesne reproduit à cette occasion un langage médiévalplonge directement le lecteur dans l’univers, le rendant d’autant plus attractif, tout en lui conférant un fort aspect de réel. On se fait très rapidement à cette façon de parler inhabituelle, car les mots sont accessibles et parfaitement compréhensibles dans le contexte et l’on sent que tout cela a été maintes fois travaillé pour obtenir cet effet sonore si caractéristique. Ce sont des dialogues que l’on imagine sans peine prononcésavec l’accent de l’époque, ce qui donne à certaines scènes un aspect solennel, à d’autres un aspect comique indéniable (ces dernières étant plus rares!) et qui mériteraient une lecture à voix haute pour le seul plaisir d’entendre s’écouler ces mots oublié et divinement agencés.

L’intrigue, si elle reste classique, est bien menée et alimentée; il y a du mystère, du complot, une larme d’histoire, une goutte de fantastique et un soupçon de paganisme folklorique, qui font que les divers éléments s’emboîtent remarquablement vite et bien, sans toutefois gâcher le suspense, ce qui contribue à faire de ce roman un opus de haut vol et d’une lecture fort agréable.

Magicienne propose, en somme, une jolie fable sur les inconvénients d’être une femme intelligente et ne correspondant pas aux canons de la beauté à une certaine époque… où tout signe distinctif est immédiatement interprété comme engeance du malin. Doublant cet argument d’une subtile dénonciation des croyances aveugles, Didier Quesne signe là un roman touchant, que l’on relirait avec grand plaisir.

Magicienne, Didier Quesne. Nestiveqnen, 2003, 315 pages.
8/10.

 

Si vous avez aimé, vous aimerez peut-être…

dons-chroniques-rivages-ouest-u-k-le-guin

Dons d’Ursula K. Le Guin.

Cette entrée a été publiée dans Fantasy.

2 commentaires sur “Magicienne, Didier Quesne.

  1. stelphique dit :

    Il me tente bien celui ci, je me le note!!!;)

    J’aime

Mettre son grain de sel