Héritages, Gardiens des Cités perdues #8, Shannon Messenger.

Sophie n’en peut plus de vivre dans le mensonge et l’illusion : cette fois, il lui faut des réponses. Mais la vérité n’est pas toujours bonne à entendre, surtout quand elle apporte son lot de nouvelles responsabilités… Et que la jeune fille n’est pas la seule concernée. Car le passé trouble de certains de ses amis n’a rien d’un hasard. Beaucoup sont porteurs d’un destin qui les dépasse, qui se joue d’eux et de leurs principes.Commence alors un jeu de pistes dangereux, où la fidélité de chacun se voit remise en cause. Et si les indices s’accumulent, le doute, lui, s’insinue dans le petit groupe à mesure que la frontière entre le bien et le mal se trouble. Une question occupe désormais tous les esprits : qui est véritablement digne de confiance ?À force de creuser pour découvrir ce que cachent les mystères qui l’entourent, Sophie Foster se retrouve dans ce huitième tome de Gardiens des Cités perdues face à elle-même et à ses illusions perdues. L’heure de vérité a sonné. Il ne reste plus qu’à savoir si notre héroïne et ses amis sont prêts à l’affronter…

Gardiens des Cités perdues est une série que j’apprécie, et ce depuis le début, malgré le caractère impossible de Sophie (disons que si vous n’aimez pas les premières de la classe parfaites, passez votre chemin).

Mais là… cette fois, la magie n’a pas du tout pris. J’ai peiné sur chacune des pages de cet interminable pavé (qui pèse plus de 760 pages, quand même !).

Déjà, dès le départ, quelque chose a coincé : le fait que l’on investisse Sophie de nouvelles responsabilités. Je trouvais déjà dans les tomes précédents qu’il y en avait un peu trop, mais là, on dépasse vraiment les bornes. Que font donc les adultes dans cet univers ?! Même Dumbledore n’a pas autant osé charger la mule, et pourtant on sait qu’il n’a pas lésiné quand il s’agissait de confier de lourdes responsabilités à des gamins à peine pubères.
Bref. Sophie se retrouve assortie d’une nouvelle mission, d’un nouveau titre (Régente, donc elle intègre la Noblesse sans passer par la case « Niveaux d’élite de Foxfire ») et d’un tas de nouvelles choses à faire. J’ai donc eu énormément de mal à adhérer à cette partie de l’intrigue, d’autant qu’il y avait déjà fort à faire avec TOUT ce qui est en suspens depuis le début (et il y en a !).

Sans surprise, tout cela vient alourdir une intrigue déjà bien embourbée. J’ai trouvé le roman terriblement long et mou. Les rares révélations ne surprennent que les personnages tant tout m’a semblé téléphoné, qu’il s’agisse de la situation avec les nains, ou la recherche de Sophie sur ses parents biologiques. Tout cela me semblait tellement évident ! En plus, cela prend complètement le pas sur la recherche de l’héritage de Keefe, qui était supposé être au centre de l’intrigue.
Dès lors, difficile de se passionner pour les péripéties (nombreuses) qui accablent (il n’y a pas d’autre mot) nos personnages.

Pour ne rien arranger, j’ai trouvé que tout traînait en longueur. Les dialogues sont excessivement longs, soit qu’on nous ressasse des informations que l’on connaît déjà / qui ne méritent pas autant d’explications, soit que le suspense est manifestement poussé au maximum sur des révélations qui, malheureusement, ne sont pas surprenantes tant elles ont été bien amenées. Du coup, on peut noter ce point positif : tout se tient, tout a été (peut-être trop) bien préparé en amont. J’avoue tout net que j’ai parcouru en diagonale certains de ces dialogues justement conçus pour « faire monter le suspense », tant j’étais à deux doigts de m’endormir dessus.
L’autre point qui m’a fortement agacée, c’est la façon dont sont résolues les péripéties. C’est quoi cette insolente facilité ? On nous répète depuis le départ combien c’est difficile, combien la situation est tendue (limite désespérée) et les personnages s’en sortent haut la main sans déplacer une mèche de leur brushing ? Mais ce n’est pas crédible !

Parlons maintenant des personnages. Dans le tome précédent, je regrettais que l’on intègre encore de nouveaux personnages à la cohorte déjà en présence. Cette fois, heureusement, pas de nouvelle tête : Stina Heks (la meilleure ennemie) est certes intégrée à la Brigade Prodigieuse souhaitée par le Conseil, mais il s’agit d’une tête déjà connue. Malgré cela, j’ai encore trouvé qu’on avait du mal à naviguer entre les très (trop !) nombreux protagonistes. Tous sont importants, et c’est assez difficile de s’intéresser tour à tour à chacun. Ils se retrouvent donc généralement réduits à leur capacité principale, ce qui les rend tous légèrement monolithiques (et c’est bien dommage).
Est-ce qu’on parle de l’arc narratif dévolu à la romance ? Allez, le triangle amoureux nous tient tout de même en haleine depuis le premier volume ! Ici, rien de neuf, hormis que Fitz glisse de plus en plus sur la (dangereuse) pente du pervers narcissique. Pourquoi personne ne lui met deux claques ? Il les mérite amplement ! Je sais qu’au départ de la saga, ma préférence allait à Fitz dans le triangle reliant Sophie, Fitz et Keefe, mais ma préférence va désormais à ce dernier (ou à aucun des deux, tiens, ce serait très bien aussi).

On peut donc dire que ce tome a été une intense déception. Je suis même déçue d’avoir été déçue, car j’apprécie vraiment la série (du moins, jusque-là). Malgré le côté entraînant de l’intrigue, en raison des multiples péripéties, difficile d’être complètement passionnée par le récit, qui était paradoxalement mou et lent. Au vu de la densité de retournement de situation aux cent pages, c’en est même étonnant !
J’espère donc vivement que ce tome était une petite baisse de rythme dans l’économie générale de la saga, et que celle-ci repartira d’un meilleur pied dans le prochain opus.

◊ Dans la même série : Gardiens des cités perdues (1) ; Exil (2) ; Le Grand Brasier (3) ; Les Invisibles (4) ; Projet Polaris (5) ; Nocturna (6) ; Réminiscences (7) ;

Gardiens des Cités perdues #8, Héritages, Shannon Messenger.
Traduit de l’anglais (États-Unis) par Mathilde Tamae-Bouhon et Laureline Chaplain.
Lumen, novembre 2019, 763 p.

Réminiscences, Gardiens des Cités perdues #7, Shannon Messenger.

Sophie Foster ne sais plus qui, ou même quoi, croire. Dans un conflit où les forces en présence sont si nombreuses, la pire erreur serait de se tromper d’ennemi.
Mais quand les Invisibles démontrent, sans doute possible, que la jeune fille est bien plus vulnérable qu’elle ne se l’était jamais imaginé, elle comprend qu’il est temps de changer de tactique. Ses pouvoirs, même immenses, ne peuvent la protéger que jusqu’à un certain point. Pour affronter des adversaires dénués du moindre scrupule, elle doit apprendre à se battre… Malheureusement, tous les entraînements au combat du monde ne peuvent rien pour alléger le fardeau d’un ami cher qui affronte un danger bien plus grand encore… Ce n’est pas en lançant des étoiles gobelines qu’elle pourra aider Fitz à surmonter le drame familial qui se joue chez les Vacker. La seule solution ? Prendre un risque encore plus grand que ceux que Sophie et ses camarades ont jamais couru. Mais c’est peut-être précisément ce qu’attendait l’ennemi depuis le début ! Il est temps de laisser se brouiller les frontières entre le passé et le présent !

Enfin une petite pause dans une série habituellement menée tambour battant ! Alors, certes, on a de l’action, mais pour une fois ce n’est pas à tous les coins de pages. Car dans un premier temps, Sophie se trouve dans une mauvaise posture qui la contraint au calme. La majeure partie du roman se déroule donc dans une ambiance feutrée, réflexive, très posée et fort loin de l’effervescence habituelle. Si cela peut donner l’impression que le tome est un peu déséquilibré (toute l’action se concentrant sur la fin), j’ai apprécié que les tenants et aboutissants de l’intrigue soient si posément exposés. Cela change un peu de l’ordinaire !

Toutefois, je dois avouer que je suis un peu restée sur ma faim sur certains points : si le tome permet à nouveau d’étoffer l’univers, c’est en introduisant une nouvelle espèce (les trolls) et… un tas de nouveaux personnages. Là encore, ils sont soignés, bien caractérisés et chacun possède sa petite histoire personnelle mais je commence à trouver qu’ils sont un peu trop nombreux à évoluer dans l’univers. Avec autant de monde, j’ai du mal à me sentir impliquée pour chaque personnage, et c’est un peu dommage (oui : je suis monotâche, je le confesse). D’autant que certains ont tendance à se volatiliser ! Dex, où étais-tu dans ce tome-ci ?!

Heureusement, l’ensemble est suffisamment chouette et enthousiasmant pour reléguer aux oubliettes ces petites finasseries. Comme je le disais, l’intrigue est vraiment bien posée, les enjeux très clairs et les sous-intrigues assez détaillées. L’intrigue générale tourne autour des souvenirs : Sophie et ses amis sont toujours à la recherche des véritables caches (et du moyen de les ouvrir), mais il faut aussi restaurer la mémoire endommagée de Keefe (dont la propre mère fait partie des bad guys) et déterminer si Alvar, le frère renégat de Fitz et Biana, est bien victime d’une amnésie totale… ou s’il s’agit d’une nouvelle ruse des Invisibles. Par ailleurs, la question des souvenirs tronqués de Sophie est toujours là en toile de fond.
Comme celle de ses parents génétiques, d’ailleurs ! Si l’importance du Colibri est quelque peu mise de côté dans le gros du roman, la question de l’héritage génétique de Sophie revient de plein fouet dans les dernières pages — et alimente d’ailleurs un rebondissement final certes peu surprenant, mais encore une fois extrêmement bien amené ! Globalement, Shannon Messenger parvient à rappeler les différentes sous-intrigues qui courent sans perdre le lecteur dans la masse des infos : et vu l’épaisseur du roman d’un côté, la complexité de son univers de l’autre, ce n’était pas gagné. J’ai été ravie, ainsi, de retrouver Silveny, dont la présence dans ce volume, particulièrement importante, amène de nouveaux développements très inventifs !

L’autre point qui, cette fois, prend une place considérable, est l’âge de Sophie. Désormais à la tête de quinze bougies, la jeune fille devient une véritable adolescente. Qui doit donc, comme tout elfe qui se respecte, envisager de déposer sa candidature chez les Entremetteurs, si elle souhaite pouvoir être appariée avec un autre elfe. Pratique barbare qu’elle renie de toutes ses forces… mais qui la travaille tout de même. Tout comme, on s’en doute, ses sentiments. Il est beaucoup question du jeune elfe qui fait battre son cœur avec tout ce qu’on peut en attendre : cœur qui bat la chamade, mains moites, hésitations, regards énamourés de part et d’autre, discussions gênantes (mais hilarantes) avec les parents, etc. Heureusement, cette romance se mêle assez bien à l’intrigue plus magique et ne prend pas trop le pas (sans quoi j’aurais sans doute lâché l’affaire. Bon, et ils sont très mignons, il faut en convenir). Quoi qu’il en soit, cela va sans aucun doute alimenter le débat sans fin des Team Fitz/Team Keefe (et sans vous spoiler sur les péripéties, je dois tout de même avouer que j’ai définitivement changé d’équipe. Allez Sophie, ouvre les yeux !!).

Si le début peut donner l’impression qu’on est arrivé au bout de ce que proposait l’univers, la suite prouve au contraire combien Shannon Messenger maîtrise et son univers et son intrigue. Encore une fois, elle étoffe le tout de nouvelles coutumes fort intéressantes, tout en révélant juste le nécessaire sur le conflit larvé entre les elfes et les Invisibles. D’une part, l’intrigue progresse mais, d’autre part, on en garde suffisamment sous le coude pour alimenter les prochains tomes – dont j’espère qu’ils seront toujours aussi palpitants. Les personnages sont étoffés peu à peu et révèlent qui des bonnes choses, qui des traits de caractères que l’on aurait préféré ignorer… Et cela aussi, cela ajoute du suspense quant à la suite. 

♦ Dans la même série : Gardiens des cités perdues (1) ; Exil (2) ; Le Grand Brasier (3) ; Les Invisibles (4) ; Projet Polaris (5) ; Nocturna (6).

Gardiens des cités perdues #7, Réminiscences, Shannon Messenger.
Traduit de l’anglais par Mathilde Tamae-Bouhon. Lumen, 15 novembre 2018, 770 p.

Nocturna, Gardiens des Cités Perdues #6, Shannon Messenger.

Nocturna… Dans l’esprit de Sophie, embrumé par le chagrin et le deuil, ce nom brille comme un astre. À lui seul, il incarne tous les espoirs et toutes les craintes de la jeune fille. Car c’est là que se trouve sans doute sa famille humaine, enlevée par les Invisibles, là que l’attendent les réponses à toutes ses questions. Mais s’y rendre relève du tour de force – Sophie et ses amis sont donc bientôt contraints de revoir leur stratégie, quitte à pactiser avec plusieurs de leurs ennemis.
Dès cet instant, le compte à rebours est lancé : pour sa famille disparue, comme pour le reste du monde, il n’y a plus une minute à perdre. Rongée par l’incertitude et la peur, Sophie va devoir, plus que jamais, s’appuyer sur ses proches pour parvenir à aller de l’avant, pour éviter surtout de sombrer dans le désespoir. Car, même si elle est loin de s’en douter, les portes de Nocturna dissimulent un secret enfoui depuis des millénaires… un secret qui pourrait bien changer la face du monde à tout jamais !
Et si la clé de l’énigme se cachait dans le passé ?

Dès qu’il est sorti, je me suis jetée dessus, pressée que j’étais de retrouver la petite bande. Et j’avais presque fini pour rencontrer l’auteur à Montreuil (début décembre, donc) ! Mais si j’ai tant tardé à rédiger cette chronique c’est que, à la fin de ma lecture, je n’étais pas capable de vous dire autre chose que : « Lisez cette série, elle est tellement géniale ! ». Vous conviendrez que niveau arguments, c’est un peu plat. Maintenant que la pression est un peu retombée, on va tâcher de faire un peu plus consistant.

J’ai été ravie de retrouver les personnages à peu près là où on les laissait dans le tome 5. Et, fait étrange, bien que ce soit en pleine action et en plein questionnement, j’ai trouvé que le début était un peu indolent – sans que ce soit gênant, notez, car sur 762 pages de lecture, on peut bien commencer en douceur.
Rapidement, le rythme reprend tout son allant et on est bien vite accaparé par les questions qui s’accumulent. En effet, le mystère autour de la disparition des parents de Sophie reste (assez longuement) entier, ce qui induit un suspens latent dans l’intrigue. À celui-ci s’ajoute un suspense plus courant car outre la disparition des parents de Sophie, la petite bande a fort à faire. Il faut en effet découvrir les dessous du projet Polaris, les petites cachotteries des Invisibles, le plan secret (et sans doute machiavélique) de Lady Gisela et, bien sûr, l’allégeance finale de Keefe, toujours en balance suite à sa trahison (à la fin du tome 4). Encore une fois, c’est donc un tome riche en questions ; on ne peut pas dire que Shannon Messenger soit avare en réponses mais, ce qui est sûr, c’est qu’à l’issue du volume, les réponses ont apporté de nouvelles questions – ce qui présage sans doute de nouveaux tomes pleins de suspense.

Pour autant, l’histoire avance réellement. D’une part parce que la diplomatie prend une nouvelle tournure. Alors que, jusque-là, on avait (assez schématiquement) les elfes VS les autres espèces magiques (celles-ci étant en position de dominés), une certaine partie de la population elfe fait enfin preuve d’un peu d’ouverture d’esprit – et franchement, vu d’où l’on partait, ce n’est pas du luxe. De même, Shannon Messenger s’attache à démonter les apparences de la société elfique, si parfaite de premier abord et qui s’avère finalement raciste, fermée et pleine de préjugés. Là où cela devient passionnant, c’est lorsque l’on se met à repérer des petits travers de notre société – et qui semblent d’autant plus condamnables ainsi mis en intrigue. De même, l’intrigue, par moments, fait écho à de nombreux faits historiques réels. La transposition est intéressante et cela montre, si c’était encore nécessaire, que les littératures de l’imaginaire sont tout à fait aptes à questionner le réel.

Dans ce volume, on a également affaire à de nouveaux personnages : certains sont des personnages que l’on connaît déjà, mais que l’on découvre sous un nouveau jour – Dimitar, par exemple, qui s’est complètement révélé dans ce volume – tandis que d’autres sont totalement neufs. C’est le cas de Romilda – Ro pour les intimes – qui apporte un peu de sang neuf et nous fait découvrir la société ogre sous un tout nouvel aspect ! Il est vrai que les personnages étaient déjà fort nombreux, mais Ro s’intègre parfaitement à l’intrigue et à l’équipe.

Bon, tout cela pour dire que cet opus m’a encore fait passer par toutes les couleurs. Comme je l’ai dit, le suspens est au rendez-vous, aussi étais-je très impatiente de reprendre ma lecture. En même temps, j’ai été ravie de découvrir de nouvelles facettes de la société elfique et de l’univers et d’autant plus ravie de voir qu’au bout de 6 gros tomes, Shannon Messenger était toujours capable de nous surprendre. J’ai hautement apprécié que l’histoire mêle aussi habilement intrigue magique et petits tracas du quotidien : il ne faut pas oublier que nos personnages sont des adolescents et qu’ils ont donc, sans trop de surprises, des problèmes d’adolescents. Amitiés, amours, relations familiales, tout cela est traité assez habilement et vient coller au reste de l’histoire. Les relations familiales occupaient d’ailleurs une grande place dans l’intrigue car Sophie se retrouve tiraillée entre l’amour qu’elle porte à Grady et Edaline et celui qu’elle porte à ses parents humains, tout en sachant qu’eux l’ont complètement oubliée. À ce titre, je dois confesser que Shannon Messenger a su me tirer quelques larmes, au cours d’une scène proprement déchirante !

J’étais donc très impatiente de lire ce sixième tome, qui ne m’a pas déçue, malgré un début un peu indolent et (tout de même) une ou deux facilités glissées dans l’intrigue. J’y ai retrouvé tout ce qui me plaît dans cette saga : un univers original, une intrigue palpitante et fournie, des personnages nuancés et un intéressant mélange entre les sous-intrigues purement liées à la quête magique et celles liées à la vie quotidienne de la petite bande d’adolescents. Comme dans les tomes précédents, on s’aperçoit que la société elfique, d’apparence si parfaite et si géniale, est percluse de petits travers, qui ne sont pas sans rappeler ceux de notre propre société. Du coup, la série est divertissante à souhait, mais permet également de réfléchir à ce qui se passe dans notre société. Il va sans dire que j’attends désormais de lire la suite !

◊ Dans la même série : Gardiens des cités perdues (1) ; Exil (2) ; Le Grand Brasier (3) ; Les Invisibles (4) ; Projet Polaris (5) ;

Gardiens des Cités Perdues #6, Nocturna, Shannon Messenger. Traduit de l’anglais par Mathile Tamae-Bouhon.
Lumen, novembre 2017, 762 p.

J’ai lu ce roman de concert avec Allisonline ! Et on a aimé toutes les deux !

Projet Polaris, Gardiens des Cités Perdues #5, Shannon Messenger.

Après un passage mouvementé par Exillium, l’école réservée aux bannis, Sophie et ses amis sont de retour à l’académie Foxfire, où la jeune Télépathe n’est pas la seule, cette fois, à bénéficier de la protection d’un garde du corps. Car certains masques sont tombés : les nouveaux membres du Cygne Noir, ainsi que leurs familles, sont plus que jamais en danger… D’autant que les Invisibles, ces rebelles qui menacent les Cités perdues, multiplient les attaques.
Tandis que la tension monte avec les ogres, forçant les elfes à accepter des changements drastiques de leurs modes de vie, notre petite troupe tente d’en découvrir plus sur le plan de l’ennemi. Sophie ne dispose pourtant que de maigres indices : son nom de code est « Projet Polaris », un étrange symbole semble en être la clé et il serait depuis le début lié à… Keefe !

Vous aurez sans doute l’impression que je me répète (et j’espère bien continuer avec les tomes suivants), mais chaque nouveau tome me semble meilleur que le précédent !
À la fin du quatrième tome, la petite équipe se trouvait séparée et devait faire face à des convictions opposées : pas toujours facile à vivre au sein d’un groupe d’amis.

Cette fois, l’intrigue prend de nets accents de thriller, Sophie se chargeant de l’enquête sur le fameux Projet Polaris, cherchant à savoir de quoi il retourne et en quoi elle est concernée, au juste. Ce qui est particulièrement prenant, c’est que cette partie de l’intrigue s’entremêle merveilleusement à la partie plus politique. Depuis les événements du tome précédent, celle-ci s’avère de plus en plus complexe : les elfes et les ogres sont à couteaux tirés et leurs différends risquent de faire aussi sombrer les autres peuples des Cités Perdues, gnomes, gobelins et autres créatures magiques incluses. De fait, on sent qu’on s’achemine doucement mais sûrement vers une guerre ouverte.
D’autant que chez les elfes, le Conseil est loin de faire l’unanimité et on dénombre pas moins de trois factions, en comptant le Cygne noir et les Invisibles, chacune ayant des choses à reprocher aux autres et des intérêts pas toujours convergents. Ce qui pimente allègrement la partie et tient le lecteur en haleine de bout en bout.

L’autre excellent point, c’est la façon dont se tissent et se développent les les relations entre les personnages. On l’a vu, les dissensions entre le petit groupe viennent alimenter le débat. Plus que jamais, c’est l’union qui fera la force mais il est difficile de rester unis lorsque l’on a des points de vue totalement opposés. Mais Shannon Messenger ne se contente pas de mettre en avant nos jeunes héros. J’ai trouvé qu’elle accordait un soin particulier à ses personnages secondaires et à leurs relations, notamment du côté des adultes (les parents et Sandor ont ainsi droit à leur quart d’heure de gloire) et j’ai vraiment apprécié qu’on ne se concentre pas uniquement sur les protagonistes, tout en leur accordant aussi le soin nécessaire.

En lisant Projet Polaris, j’ai eu l’impression qu’on franchissait un cap. Jusque-là, Sophie était une enfant débarquée dans un monde d’adultes mais là, on sent clairement pointer l’adolescente (Sophie a désormais quatorze ans). Elle est plus mature et cela se ressent dans ses prises de positions, dans ses réactions, dans sa façon d’appréhender l’échiquier sur lequel elle se place. Comme c’est une adolescente, elle traverse aussi une phase qui fait la part belle aux sentiments (avec des scènes qui laisseront sans aucun doute les lecteurs sur des charbons ardents). Mais, là encore, cela sert à Shannon Messenger à étoffer son univers et à en démonter un des aspects censément utopiques : pour l’occasion, on découvre comment se marient les elfes – via des listes de compatibilité établies par une agence assermentée – ce qui permet à Shannon Messenger de dénoncer la théorie eugéniste qui gouverne la société elfique.
Ce trait, que l’on retrouve à chaque tome, fait partie des raisons pour lesquelles cette série me plaît tant. Lorsque l’on a découvert les Cités Perdues, dans le premier volume, Shannon Messenger nous les a présentées sous des traits parfaitement idylliques mais, au fil des volumes, elle nous montre comment la société elfique s’est construite sur des parti-pris parfois monstrueux. C’est fait intelligemment et subtilement et c’est donc d’autant plus percutant !

Dans cet opus, le rythme est, lui aussi, très soigné. Impossible de décrocher, car il n’y a aucun temps mort. Mieux : au fil des pages, on s’aperçoit que chaque paragraphe compte et que tout vient alimenter l’intrigue générale. Et si vous trouviez que le tome 4 se terminait sur un insupportable retournement de situation, attendez de découvrir l’incroyable conclusion choisie par Shannon Messenger : de quoi vous faire regretter de lire la série au fil des dates de parution, tant l’attente pour le tome 6 va sembler longue !

Après l’excellente surprise du quatrième tome, j’attendais ce volume de pied ferme et je n’ai pas été déçue par ce qu’a inventé, cette fois encore, Shannon Messenger. L’intrigue est hautement prenante et on ne s’ennuie pas un seul instant. L’intrigue, délicieusement dense, vient compléter un univers lui aussi merveilleusement complexe, et dont on découvre sans cesse de nouveaux aspects. Mieux : la fin est telle que l’on pressent une suite elle aussi palpitante ! Que j’attends donc, vous l’aurez compris, avec une certaine impatience. 

◊ Dans la même série Gardiens des Cités Perdues (1) ; Exil (2) ; Le Grand Brasier (3) ; Les Invisibles (4) ;

Gardiens des Cités Perdues #5, Projet Polaris, Shannon Messenger. Traduit de l’anglais par Mathilde Tamae-Bouhon. Lumen, février 2017, 664 p.

Les Invisibles, Gardiens des Cités perdues #4, Shannon Messenger.

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Finis les cours à Foxfire et les messages énigmatiques envoyés par le Cygne Noir, Sophie rejoint enfin la mystérieuse organisation clandestine qui lui a fait voir le jour ! Accompagnée de Fitz, Biana, Keefe et Dex, elle quitte les Cités perdues pour Florence, où se trouve le premier indice qui la mènera jusqu’au repaire du Cygne Noir. Là-bas, la jeune fille espère en apprendre plus sur elle-même, mais aussi sur les Invisibles, le groupe de rebelles qui cherche à déstabiliser le monde des elfes. Pour comprendre l’étrange épidémie qui décime les gnomes, préparer l’évasion de Prentice, prisonnier d’Exil, et affronter la menace grandissante que représentent les ogres, la jeune Télépathe va devoir s’appuyer sur ses camarades et se retenir de foncer tête baissée vers le danger ! D’autant que si de nouveaux alliés apparaissent, des traîtres sortent aussi de l’ombre…

J’avais déjà écrit, à propos du tome 3, qu’il était le meilleur de la série mais la lecture de ce tome 4 a changé la donne : c’est, jusque-là, indéniablement le meilleur volume !
Cette fois, l’histoire change un peu car Sophie et ses amis ne retournent pas à Foxfire… dont ils ont été renvoyés. Nos jeunes camarades se retrouvent donc embringués dans un nouveau cycle d’apprentissage, plutôt haut en couleurs, à Exillium.
Comme souvent, il faut un petit moment avant que les événements décrits dans le résumé ne se mettent en place mais on ne s’ennuie pas pour autant : Sophie et ses camarades ont en effet fort à faire avec leurs nouveaux cours, ainsi qu’avec les entraînements auxquels ils s’astreignent afin de maîtriser leurs talents.
De ce point de vue-là, l’univers s’étoffe. Biana teste en effet tout un tas de méthode pour rendre son pouvoir efficace en toutes circonstances, y compris sur les gnomes, jusque-là immunisés.

Après avoir étudié les rouages de la société elfique, donné un bon aperçu des ogres, Shannon Messenger nous emmène sur les traces des gnomes – excellents jardiniers dans les Cités perdues – ici décimés par une mystérieuse épidémie. L’histoire est passionnante, car elle mêle plusieurs axes forts en suspens : il y a l’affrontement tripartite entre le Cygne noir, les Invisibles et le Conseil, la menace de guerre des ogres, la question de l’épidémie des ogres, mais aussi les histoires personnelles de nos jeunes aventuriers, qui viennent enrichir l’intrigue. Si Sophie n’a pas cessé d’enquêter sur les circonstances exactes de la mort de Jolie, les révélations qu’elle déterre, peu à peu, ont un impact sur l’ensemble du groupe. Or, celui-ci semble de plus en plus ne tenir que par l’effet du miracle… Soyez prévenus : révélations fracassantes, alliés inattendus et traîtres insoupçonnables sont nombreux à se révéler dans ce tome, ce qui ne le rend que plus passionnant !

Car sous l’histoire apparemment fantastique, Shannon Messenger évoque le sujet poignant de l’abandon. Nos aventuriers ne tardent pas à rencontrer deux jeunes elfes de leur génération, vivant seul, suite au renvoi de l’un des deux par leurs parents (l’autre a suivi par solidarité). Or, ces parents, plutôt que d’assumer leur rôle de protection et de soutien, ont préféré se débarrasser du problème. Tel autre souffre de l’attitude ô combien blessante de parents a priori peu aimants, très froids, le rabaissant sans cesse et dont il s’aperçoit que la loyauté est plus que douteuse. À la blessure d’amour propre s’ajoute la blessure d’amour filiale, et celle-ci peut faire des ravages. Mais ce qui est intéressant, c’est que l’auteur met tout cela en balance avec un autre système familial, apparemment plein d’amour et de bienveillance, mais dans lequel la graine de la sédition a également bien pris. Loin d’avoir un discours culpabilisant, elle montre que parfois, tout l’amour du monde ne suffit pas à changer les gens – ce qui, somme toute, est très humain. De fait, l’auteur parvient à nous surprendre avec les évolutions que connaissent ici ses personnages.

Dans le tome précédent, l’ambiance était plus sombre, et c’est à nouveau le cas ici : fini de plaisanter, la guerre est imminente, tous les coups bas sont permis et l’atmosphère s’en ressent dans le petit groupe. Si les relations qui les unissent sont toujours plus fortes et belles, elles sont mises à mal par les épreuves que nos jeunes camarades doivent affronter. Tout cela nous achemine doucement vers une fin qui laisse le lecteur sans voix. On prie pour trouver un épilogue caché et ne pas rester sur cette effroyable conclusion… Las, il faudra attendre le tome 5 pour savoir si l’on pourra s’en remettre !

Inutile de dire que l’on voit à peine passer les quelques 650 pages qu’offre ce petit pavé. Shannon Messenger nous propose à nouveau une intrigue haute en couleurs, palpitante, prenante à souhait et qui ne laisse personne indemne – ni le lecteur, ni les personnages. Ceux-ci évoluent franchement dans cet opus, ce qui en fera peut-être grogner plus d’un au vu des développements choisis par l’auteur. Il va donc sans dire que j’ai furieusement envie de découvrir le cinquième volume !

◊ Dans la même série : Gardiens des cités perdues (1) ; Exil (2) ; Le Grand brasier (3) ;


Gardiens des Cités perdues
#4, Les Invisibles, Shannon Messenger.
Traduit de l’anglais par Mathilde Tamae-Bouhon.
Lumen, 2016, 656 p.

Le Grand Brasier, Gardiens des Cités perdues #3, Shannon Messenger.

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Voilà plusieurs semaines que Sophie Foster n’a plus aucune nouvelle du Cygne Noir, l’organisation clandestine qui l’a créée. Si elle se sent abandonnée, la jeune Télépathe redoute surtout qu’un traître n’ait infiltré leurs rangs. Pourtant, elle a bien vite d’autres chats à fouetter : un mystérieux traqueur est découvert sur Silveny l’alicorne ; Vertina, le miroir spectral de Jolie, refuse obstinément de révéler ce qu’elle sait ; et le Conseil ordonne à Sophie de guérir Fintan, le Pyrokinésiste à l’esprit brisé, malgré l’immense menace qu’il représente…
Toujours accompagnée de Keefe, Dex, Fitz et Biana, la jeune fille est entraînée dans un tourbillon de révélations et de rebondissements… à tel point que, déterminée à démasquer les rebelles qui menacent les Cités perdues, elle va commettre un terrible faux pas !

Après un coup de cœur pour le premier tome et un deuxième volet avec quelques points à corriger, Shannon Messenger reprend le fil des aventures de Sophie et offre un troisième tome haut en couleurs et, sans aucun doute, le meilleur des trois depuis le début.

Le meilleur, mais aussi le plus sombre. Finies les découvertes sympathiques et acidulées des débuts ! Cette fois, Sophie est dans les ennuis jusqu’au cou. Alors qu’elle se morfond (le Cygne noir ne donne plus de nouvelles et Vertina refuse de parler), des événements étranges s’enchaînent. En premier lieu, la découverte d’un traceur ogre sur Silveny. Après deux tomes plutôt cantonnés dans la société elfique, on passe à l’extérieur ! Et les découvertes ne sont pas des plus roses, la nation ogre ne comptant pas que des amis des elfes. De fait, l’aspect géo-politique est bien plus présent dans cet opus que dans les précédents et ce n’est pas plus mal, puisque l’histoire de Sophie vient s’inscrire dans un tout un peu plus vaste que précédemment.
L’histoire est plus sombre, comme je le disais plus haut, d’une part parce qu’une menace de guerre finit par planer sur l’assistance et, d’autre part, car Shannon Messenger flirte avec le thriller. En effet, cette histoire de traceur ogre turlupine les elfes, d’autant que Silveny est censée être très protégée. Qui l’a posé là, comment et pourquoi ? Pour une fois, ce n’est pas à Sophie de régler le problème : elle a déjà bien à faire avec ses études et la société elfique semble avoir enfin compris (mais pas tout à fait) qu’on ne peut pas attendre d’une gamine de 12 ans qu’elle sauve le monde. Donc… Sophie enquête de son côté, bien entendu. À cela s’ajoute le mystère posé par Vertina : le miroir sait manifestement des choses sur la mort de Jolie et Sophie est bien décidée à en savoir plus. Tous ces mystères apportent un suspense indéniable. Or, les péripéties sont à l’avenant et on se surprend à se demander où l’auteur nous emmène à plusieurs reprises, craignant le pire – vraiment, ce tome est bien plus sombre !
Conclusion : on n’a pas le temps de s’ennuyer dans cet opus. Surtout que les événements se précipitent et mettent Sophie à mal.

Autre point sur lequel on n’a pas le temps de s’ennuyer : les personnages. Plus que jamais, Sophie a besoin de son entourage pour s’en sortir. L’auteur met vraiment en valeur les liens amicaux et le soutien du cercle amical dans ce volume. On est donc assez loin du schéma du héros solitaire sauvant la communauté avec ses petits bras ! Et vu l’accueil que lui réservent les elfes, désormais – sa cote flirte avec le néant abyssal – elle a plus que jamais besoin d’être entourée. Les personnages ont grandement évolué depuis l’opus précédent. Sophie est de plus en plus mature – mais pas tout à fait une grande fille non plus : on oscille donc dans un entre-deux lui permettant d’avoir des réactions très mûres et d’autres beaucoup plus enfantines. Dex est dans le même cas : de moins en moins farceur, on le voit prendre de plus en plus de responsabilités. Et si Fitz descend enfin de son piédestal de glace, c’est bien Keefe qui est à l’honneur dans ce volume, assurant Sophie de son indéfectible soutien. C’est d’ailleurs l’occasion de montrer, encore une fois, combien cette société elfique, qui semblait si idyllique au départ, est en faite gangrenée et à l’image de la société humaine. Côté adultes, si l’attitude d’Edaline était à la limite du supportable dans le tome 2, elle trouve son explication ici, la mère adoptive de Sophie n’étant pas aveugle sur son comportement ; cette auto-critique est bien agréable et arrive à point nommé pour redorer le blason du personnage ! Mais si Edaline étonne par son recul, Grady, lui, surprend (voire, choque !) par les facettes sombres de sa personnalité qu’il dévoile. On le pensait doux et effacé, on le découvre belliqueux et déterminé. Il n’y a pas à dire, Sophie a encore des choses à découvrir sur ses parents adoptifs…

À chaque fois que l’on pense avoir atteint un tournant du récit, ou une accalmie, l’auteur nous surprend avec une nouvelle péripétie ou un nouveau rebondissement inattendu. Sans tomber dans le piège d’un rythme effréné (et fatigant), elle renouvelle son intrigue ; le rythme est maintenu d’un bout à l’autre, ce qui fait qu’il est assez difficile de s’arrêter, il faut l’avouer.

Après un deuxième tome un poil en-dessous du premier, Shannon Messenger signe un troisième tome bien plus sombre, dense et qui laisse le lecteur sur des charbons ardents ! On continue de découvrir les travers de cette société elfique avec les – nombreux – ennuis qui tombent sur les épaules de Sophie, dont l’attitude est de plus en plus mature. Cette fois, l’auteur mêle à son récit de fantasy des accents de polar, qui ajoutent au suspens général. Et au vu de la fin, on attend impatiemment le volume suivant !

◊ Dans la même série : Gardiens des cités perdues (1) ; Exil (2) ;

Gardiens des Cités perdues #3, Le Grand Brasier, Shannon Messenger. Traduit de l’anglais par Mathilde Bouhon.
Lumen, 2015, 598 p.
ABC Imaginaire 2015

Et en bonus, l’interview que Shannon Messenger m’a accordée au Salon du Livre et de la Presse Jeunesse de Montreuil, le 5 décembre 2015 : 

J’étais en train d’écrire Gardiens des cités perdues et je faisais beaucoup de recherches, notamment sur les créatures mythiques et mystiques. J’étais donc en train de lire un livre et je tombe sur une entrée « Sylphes ». Et ce qui m’a interpelée, c’est qu’il n’y avait qu’une seule ligne de définition : « élémentaire de l’air, être lié à l’air ». Je me suis rendue compte qu’avec une définition si courte, il était possible d’inventer une créature. Donc, forcément, cela a suscité mon intérêt : le vent peut être une légère brise, ou une tempête. Ça laissait un champ très large et, immédiatement, cette possibilité a attiré mon attention.

  • Comment vous est donc venue l’idée de créer quatre ordres de Sylphes, opposés les uns aux autres ?

Je voulais un monde avec des différences et la construction d’univers est vraiment ce que je préfère. C’est la partie la plus divertissante ! Je me suis toujours intéressée à la mythologie et on trouve aussi ces différences dans la mythologie grecque. Dans le panthéon grec, par exemple, il y a un dieu pour chaque vent, qui ont donné les ordres de Let the sky fall. Mais je me suis appuyée sur l’idée de quatre langues différentes pour dépasser l’idée des dieux grecs.

  • Certains livres vous ont-ils inspirée pour vos séries ?

En général, quand je suis en train d’écrire, j’essaie de ne pas trop m’inspirer de livres, sinon on pourrait rapprocher ça du plagiat. Je préfère garder une pensée originale. Bien sûr, dans sa forme, Gardiens des cités perdues ressemble à des livres comme Percy Jackson, Harry Potter… Sauf qu’au lieu d’avoir une fille (comme Hermione !) qui vient aider les protagonistes, j’ai préféré avoir une fille héroïne, entourée d’une bande de garçons qui l’aident.
Pour Let the sky fall, j’ai remarqué que dans ce type de romans (on va dire la romance fantastique), c’est souvent le garçon qui a des pouvoirs surnaturels et la fille la demoiselle en détresse. L’inversion me semblait plus tentante, donc j’ai préféré avoir une histoire où le héros, un garçon, ignore ses capacités et est sauvé par la fille.

  • Passons à Gardiens des Cités perdues. Comment est née cette série ?

J’ai eu deux sources. J’aime beaucoup Legolas, l’elfe dans Le Seigneur des Anneaux, donc j’avais envie d’en faire une histoire. Mais j’aime aussi beaucoup X-Men. Alors j’ai mélangé les éléments. La magie et les pouvoirs qui apparaissent dans Gardiens des Cités perdues viennent de X-Men, où chaque mutant possède une capacité ou un talent unique. J’aimais vraiment beaucoup cette idée et j’ai voulu la réinterpréter. Dans Gardiens, il n’y a pas de différences physiques, pas de peau bleue ou de personnages couverts de poils. Mais tous les elfes sont différents par leurs capacités uniques.

  • J’ai beaucoup aimé l’univers de Gardiens des cités perdues qui est très riche, notamment au niveau de la faune. Il y a tout de même des dinosaures et une alicorne ! D’où vous est venue l’idée ?

J’adore les animaux ! Ça a toujours été une constante dans ma vie. Du coup, je voulais en mettre beaucoup dans ma série, mais sans me cantonner aux choix attendus. Bien sûr, j’allais mettre des griffons et des licornes, mais j’en voulais d’autres. C’est comme ça que sont arrivés les dinosaures. Mais je ne voulais pas seulement des dinosaures pour faire un livre différent, il fallait que cela reste logique. Donc j’ai réfléchi à cette société elfique et je me suis dit : « Et si leur mission était de préserver de l’extinction ces animaux disparus chez les humains ou en voie de disparition ? ». À partir du moment où ça a été décidé, l’idée était que s’il existait des êtres supérieurs – ce que sont les elfes – cela faisait sens qu’ils essaient de rectifier les erreurs humaines comme les extinctions des animaux, ou les dommages causés à la planète. Cela cimente le rôle des elfes. L’aspect sympathique, c’est que ça m’a permis d’inventer un panel de créatures très très large !

  • À ce stade de l’interview, je peux révéler que j’ai littéralement adoré Gardiens des cités perdues. La société des elfes semble absolument parfaite mais, au fur et à mesure, on s’aperçoit qu’elle est moins idéale qu’il n’y paraît et il arrive des choses très dures à Sophie. À la fin du tome 3, j’ai une grosse inquiétude : est-ce que Sophie va trouver la paix et réussir à vivre heureuse dans cette société ?

J’avais envie qu’on pense, en commençant la série, que les elfes vivaient dans une société idéale alors qu’elle est truffée de défauts, que je voulais utiliser, au fil des tomes, pour pouvoir les mettre en évidence. Sophie a un gros fardeau sur les épaules. Elle va devoir se montrer digne et, au travers de son personnage, les défauts de la société elfique vont peut-être pouvoir se résoudre. Mais Sophie subit tout de même une pression énorme pour une petite fille de 13 ans.
Son prénom, Sophie, vient du grec et signifie « Sagesse ». Je l’ai choisi pour ça. Les elfes ont beaucoup de connaissances. Mais c’est différent d’avoir des connaissances et de savoir les appliquer. Ça, c’est de la sagesse. Sophie a grandi parmi les humains ; ça lui permet d’amener de nouvelles choses, parce qu’elle a une perspective différente que les elfes.

  • L’histoire contient des choses très dures ; vos jeunes lecteurs ne sont pas surpris ?

Je pense que nous vivons dans un monde violent et les enfants sont exposés à des choses beaucoup plus difficiles qu’autrefois. L’idée, c’est de commencer par la préface du roman, qui est un genre de teaser, parce qu’elle est toujours tirée de la scène la plus intense du roman. Les jeunes lecteurs peuvent la lire, comme ça, s’ils sont trop impressionnés, ils peuvent garder le roman pour plus tard. J’ai tiré ça de ma propre expérience car, petite, j’étais très sensible au contenu des livres que je lisais. Donc je voulais respecter l’histoire de Sophie, mais permettre aux jeunes lecteurs de vérifier avant de se lancer.

  • Team Dex, Keefe, ou Fitz ?

Définitivement Team Sophie ! Pour être honnête, j’aime tous les garçons de l’histoire de manière égale et je ne sais vraiment vraiment pas qui Sophie va choisir. En fait, je connais tous les événements qui vont se dérouler mais ce que j’ignore, c’est comment les personnages vont réagir. À force, ils ont fini par avoir leur vie propre. Pour ce qui est des garçons, j’ai une bonne idée de comment les événements vont affecter leurs relations,  mais je ne sais pas encore comment cela va affecter la façon dont Sophie les perçoit.

  • Avez-vous des projets pour d’autres séries ou livres ?

J’ai un ouvrage en cours d’écriture, qui en est à peu près à la moitié. Mais les livres de Gardiens des cités perdus sont longs et, d’ailleurs, la série est longue. Elle consume tout mon temps d’écriture. Je ne suis pas sûre de publier cette idée ou si je vais la garder pour moi, car toute ma concentration va à Sophie. On me demande souvent si je vais faire un spin-off : l’univers de la série est assez vaste, mais l’histoire de Sophie me demande trop de concentration pour faire autre chose, donc je ne suis pas encore disponible.

  • L’histoire de Jolie ferait un très bon spin-off, d’ailleurs…

L’histoire de Jolie a du potentiel, c’est vrai, mais je ne veux pas tomber dans le piège Star Wars. On connaît déjà la fin de l’histoire de Jolie et c’est très compliqué de réussir une bonne trilogie dont la chute est déjà connue. Je pourrais en faire une nouvelle plutôt, mais j’ai peur du syndrome George Lucas avec les longues séries ! Ceci dit, je ne dis jamais non à une idée, mais j’attends la bonne idée.

  • Des deux séries, j’ai préféré Gardiens des cités perdues, mais j’ai trouvé que Let the sky fall a un côté très cinématographique. Pourrait-il y avoir, un jour, une série ou un film sur l’une ou l’autre des deux séries – ou les deux ?

Je possède les droits audiovisuels pour les deux séries et je suis ouverte à l’idée. Pour Gardiens des cités perdues, j’avais pensé à un film d’animation, parce que Sophie ne prend pas un an par ouvrage et, avec un film, l’actrice principale vieillirait trop vite. Pour Let the sky fall, ça pourrait fonctionner mais, en ce moment, après Twilight, les adaptations sont plus à la mode de la dystopie dans le genre de Divergent et Hunger Games, avec des héroïnes fortes, et des histoires pleines de tension et de batailles. Let the sky fall pourrait correspondre, mais je pense que le premier tome est trop léger niveau combats. Le deuxième tome est meilleur de ce point de vue-là, mais je ne sais pas si la série serait choisie.

Exil, Gardiens des Cités perdues #2, Shannon Messenger.

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Depuis son arrivée à Foxfire, Sophie n’a pas manqué d’attirer tous les regards sur elle… et son enlèvement n’a rien arrangé ! Le monde elfique, pour qui le mot « crime » était jusque-là quasi inconnu, est en émoi et la révolte gronde…
Heureusement, une fabuleuse découverte pourrait ramener le calme au sein des Cités perdues ; au gré d’une randonnée, Sophie et Grady découvrent une alicorne, une créature fabuleuse que les elfes croyaient disparue, symbole pour eux d’un nouvel espoir. Sophie est enchantée, sa nouvelle vie lui sourit enfin ! Le plus stressant, c’est la rentrée prochaine à Foxfire. Sauf que… le Cygne noir revient sur le devant de la scène avec ses messages énigmatiques qui inquiètent Sophie, puis l’agacent prodigieusement. Son entêtement à résoudre le mystère va la mettre en danger… et menacer la vie d’un de ses proches. La rentrée ne s’annonce vraiment pas de tout repos… 

Second tome des aventures de Sophie au sein du monde des elfes et, malgré quelques points qui grincent, c’est encore un excellent volume !
Commençons donc par les points qui grincent. Comme dans le premier tome, on pourra reprocher à Shannon Messenger de laisser Sophie un peu trop fréquemment dans la panade : c’est un peu trop souvent à elle de régler les problèmes de la communauté elfe qui, de son côté, la laisse un peu trop souvent mettre la main à la pâte. Certes, tout cela est justifié, mais on apprécierait que, de temps en temps, les adultes de cet univers soient un peu plus présents : depuis le premier tome, ces elfes me semblent affreusement distants et ne font pas grand-chose pour aider Sophie !
Côté personnages, ce sont Edaline et Bronte qui font grincer des dents : la première semble avoir la larme à œil en permanence… et c’est assez agaçant, d’autant que c’est souvent injustifié. Quant au second, il manque un peu de nuances durant la majeure partie du roman ; heureusement, la fin vient, justement, amener quelques nuances à ce personnage fortement antipathique.
Ceci ayant été évoqué, passons à ce qui a rendu la lecture d’Exil si agréable !

En premier lieu, il y a l’intrigue. Le premier volume se déroulait essentiellement dans l’univers scolaire ; ici, c’est l’inverse. La rentrée n’intervient, finalement, qu’assez tard dans l’histoire : l’intrigue est donc moins linéaire que celle du premier tome (car elle n’est pas rythmée par les journées d’étude) et la quête identitaire de Sophie va s’entremêler à l’enquête quasiment policière qu’elle va mener pour débusquer le Cygne noir. Le mystère est au rendez-vous  ! Si on progresse nettement sur ce point, l’auteur nous laisse avec une foule de questions à l’issue du volume – et donc l’envie impérieuse d’en savoir plus !
Comme l’histoire ne se déroule plus spécifiquement à l’université, c’est l’occasion de développer l’univers, le monde des elfes. Un monde perturbé par l’enlèvement de Sophie, et où la révolte gronde ; le Conseil est vilipendé, les elfes ont peur, les rebelles commencent à désavouer publiquement le gouvernement… le récit est constamment sous tension, et on ressent parfaitement l’ambiance glaciale et sombre, déjà annoncée par le titre.
À propos d’Exil, on découvre un aspect insoupçonné de l’univers elfique ; le premier volume laissait l’impression que la société elfique était parfaite (ou presque) et que la violence n’y avait pas sa place. Grossière erreur : finalement, la société elfique a les mêmes travers que les autres. La justice y est parfois expéditive, et les peines… fatales. On en vient même à se demander si cette société est aussi utopique qu’elle le laisse croire ; les failles s’accumulent, et on est très loin du cliché bienheureux qui semblait, jusque-là, se profiler.

Une impression confirmée avec la présence de l’alicorne (pour ceux qui se demanderaient ce que vient faire ce a- en préfixe, sachez qu’une licorne ne peut avoir d’ailes, et qu’un pégase ne peut avoir de corne ; l’alicorne de Shannon Messenger présente ces deux attributs, d’où le préfixe) ; dès l’instant où l’équidé pailleté apparaît, des fantasmes d’arc-en-ciel et de vols planés vers le soleil couchant jaillissent dans la tête du lecteur. Et des arc-en-ciel pailletés et des vols planés (vers le sol), il y en a ! Mais, à nouveau, Shannon Messenger va jouer sur les représentations induites initialement pour les balayer et proposer une lecture bien plus originale, comme pour l’apparente perfection des elfes.

L’autre point fort du roman, ce sont ses personnages. Si Edaline est rapidement assez agaçante, Grady s’avère nettement plus complexe. De ses coups de sang incompréhensibles à son instinct protecteur, tout est fait pour faire fondre le lecteur (alors qu’il paraissait si froid et distant jusque-là !). Tout ce second volume vient nuancer les portraits tirés jusque-là. Les trois garçons qui évoluent autour de Sophie en font également les frais : Dex, dans sa jalousie, devient un poil pénible, Fitz se comporte comme un détestable crétin de première … il n’y a guère que Keefe qui garde sa sympathie – quoique sa bonhomie habituelle soit, elle aussi, modérée. Sophie, de son côté, est touchante dans ses efforts d’intégration, et de protection de ses proches. Ce qu’on apprécie, finalement, c’est que les personnages aient grandi et mûri depuis le premier volume ; l’univers et l’intrigue sont plus sombres, et cela se ressent sur les étudiants de Foxfire, qui quittent doucement l’enfance pour l’adolescence – avec tous les petits tracas que cela peut occasionner.

Exil confirme le coup de cœur pour les aventures de Sophie ! Malgré quelques points à améliorer (la psychologie de certains personnages, par exemple), c’est encore un excellent volume mariant les rebondissements inattendus, les scènes drôles, touchantes, et les passages nettement plus angoissants avec brio. On apprécie de voir que les personnages mûrissent, progressent, et prennent de l’ampleur pour certains : Team Keefe, sortez vos drapeaux ! 
L’univers si chatoyant esquissé jusque-là gagne en noirceur et en profondeur ; au vu de la façon dont Shannon Messenger détourne les clichés qu’elle semblait avoir mis en place, on a hâte de voir ce que va donner le tome 3. C’est aussi surprenant qu’agréable à découvrir.
Une fois n’est pas coutume, voilà un tome 2 qui surpasse le premier. Et il va sans dire qu’on attend le suivant de pied ferme !

◊ Dans la même série : Gardiens des cités perdues (1) ;

Gardiens des Cités perdues #2, Exil, Shannon Messenger. Traduit de l’anglais par Mathilde Bouhon.
Lumen, 2015, 566p.

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Gardiens des cités perdues #1, Shannon Messenger.

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Sophie se sent à part à l’école : elle n’a pas besoin d’écouter les cours pour comprendre, et a plusieurs années d’avance. Le tout grâce à une mémoire photographique qui ne laisse passer aucun détail. Mais ce qu’elle n’a révélé à personne, c’est qu’elle entend penser les autres, exactement comme s’ils lui parlaient à voix haute. Seul moyen pour y échapper : écouter de la musique à plein volume, ce à quoi Sophie s’occupe ce matin où sa classe visite le musée d’Histoire naturelle. Perdue dans ses pensées, elle ne remarque pas de prime abord ce jeune homme qui la suit. Lorsqu’il l’aborde, c’est toute sa vie qui bascule : elle n’est pas ce qu’elle croyait être et doit abandonner école, famille, maison, pour rejoindre un autre univers qu’elle a quitté 12 ans plus tôt. L’y attendent une pléiade de nouveaux condisciples, amis, et ennemis, et surtout une question obsédante : qui est-elle ? Pourquoi a-t-elle été cachée parmi les humains ? Pourquoi n’a-t-elle que des souvenirs très partiels de son passé ?

Gardiens des Cités perdues, qui paraît aujourd’hui, est le premier roman de Shannon Messenger traduit en français ; au vu de la qualité, on espère que la suite ne tardera pas et, qui sait, que son autre série, Let the sky fall aura également droit à une traduction !
Gardiens des Cités perdues, c’est donc l’histoire de Sophie Foster, 12 ans, surdouée et télépathe, qui découvre inopinément que ses facultés n’ont, pour ainsi dire, rien d’anormal : elle n’est tout simplement pas humaine. Malheureusement, cela signifie également qu’elle doit quitter sa famille, afin de rejoindre un autre univers, celui des immenses cités perdues (Shangri-La, l’Atlantide, Eternalia…), afin d’y rejoindre son peuple naturel, et intégrer la prestigieuse université de Foxfire dans laquelle elle suivra une formation adéquate. Mais si Sophie est surdouée dans l’univers humain, c’est loin d’être le cas dans l’univers de ses origines : la petite première de la classe a des années de retard, ne comprend rien à rien, et enchaîne les bourdes. Tout en essayant de se faire à sa famille d’adoption, et en enquêtant sur son passé : pourquoi, au juste, a-t-elle été exilée dans son enfance, et pourquoi les catastrophes semblent-elles fleurir sous ses pas ? Mystère. Mais c’est bien le centre de la question.

Shannon Messenger va donc évoquer des thèmes chers à l’enfance avec, en premier lieu, le déracinement. S’ensuivront les difficiles problématiques des amitiés et inimitiés que l’on se crée à l’école. Sophie étant un «transfuge» dans son nouvel univers, elle crève d’envie de bien faire et surtout d’y arriver seule : évidemment, on voit rapidement la limite de son comportement. Non contente de perpétrer bourde sur bourde (elle détruit l’uniforme d’un professeur par accident en cours d’alchimie, par exemple), elle va également se mettre en danger par souci de bien faire et de prouver son intégration à la communauté. Son désir de bien faire est vraiment touchant et, loin de la condamner, le lecteur ne peut que compatir à son besoin d’affection.

Autour de Sophie gravite une belle palette de personnages, tant du côté des adolescents que des adultes. Chacun a sa petite histoire personnelle, ses aspirations, ses qualités et ses défauts. En un mot, ils sont consistants. Et c’est donc agréable de passer de l’un à l’autre, de tenter de deviner quelles vont être leurs interactions, ou de saisir les liens qui existent entre chaque : Sophie le découvre pas à pas, et le lecteur avec. Le tout en enquêtant, évidemment, sur le mystère qui sous-tend ce premier tome, mystère qui passionne et perturbe Sophie, et dont on sent que certains adultes connaissent des bouts qu’ils refusent de révéler… ce qui contribue largement à alimenter un suspens savamment entretenu.

L’intrigue est menée de main de maître : on passe de la révélation fracassante sur la nature de Sophie à l’acclimatation à son nouvel univers, et à la rentrée à Foxfire. Là, on retrouve une organisation assez scolaire, l’université étant organisée en niveaux d’études et en semestres, et les étudiants suivis par des Mentors. On pense de suite, évidemment, à Harry Potter, pour ce point-là ; à ceci près que, dans l’univers de Sophie, on n’apprend pas réellement de sortilèges : les étudiants sont invités à travailler différentes matières en relation avec la magie, certes, mais il n’y aura ni duel magiques, ni cours de métamorphoses. L’univers des cités perdues est plutôt basé sur une vision idéalisée d’une nature sauvegardée, nourricière, et qu’il faut à tout prix protéger – des actions humaines, par exemple.
Par ailleurs, l’auteur ne se contente pas de faire évoluer ses personnages dans le système scolaire : il y a également des péripéties plus personnelles (entre Sophie et ses amis, ou liées à sa famille d’adoption, par exemple) et d’autres rebondissements dignes des meilleurs récits d’aventure.
À cela il faut ajouter que le récit est vraiment bien écrit, et qu’on le lit avec un grand plaisir ; l’auteur varie les tonalités, joue à la perfection des émotions, et sait glisser quelques notes d’humour lorsque c’est nécessaire. C’est un vrai bonheur à lire, et on enfile les pages sans sourciller.

La fin laisse le lecteur avec une infinité de questions car, si une bonne partie de l’intrigue a été résolue, il reste toujours le fil rouge qui semble conduire la série. Si la conclusion du tome est très satisfaisante, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur la suite… et donc d’être impatient de la lire !

Ce premier volume de la série Gardiens des Cités perdues a donc le mérite de poser les bases d’un univers riche, et d’une intrigue qui s’annonce haletante. Sophie est un personnage aussi touchant que bien pensé, et c’est avec plaisir qu’on la suit dans ses pérégrinations. Malgré quelques passages que l’on ressentira comme un peu clichés, l’intrigue est menée tambour battant, dans un style fluide et très agréable à la lecture. On se passionne pour l’aventure, les personnages, cet univers que l’on rêve de découvrir plus avant et qui devrait plaire aussi bien aux jeunes qu’aux moins jeunes lecteurs ! Pour résumer, Gardiens des Cités perdues est un gros coup de cœur, et c’est avec impatience que j’attends la suite !

Le petit plus ? Interview de Shannon Messenger !

 

◊ Dans la même série : Exil (2) ; Le Grand Brasier (3) ;

Gardiens des Cités perdues #1, Shannon Messenger.
Lumen, 2014, 510 p.
9/10. 

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