Les Aigles de Vishan Lour, Pierre Bottero.

Plume est une Ombre.
Grâce à ses talents d’acrobate, elle se glisse discrètement dans la nuit.
Jeune écuyer des Chevaliers du Vent, Estéblan accompagne la délégation chargée de rappeler au nouveau roi ses devoirs. Quand la délégation est assassinée, il est menacé à son tour.
Plume sera-t-elle son alliée ?

En 2005, j’étais toujours une lectrice assidue du mensuel Je Bouquine. J’avais donc été ravie d’y lire une nouvelle de Pierre Bottero, dont j’étais déjà très fan. Depuis, Les aigles de Vishan Lour a été republiée, toujours dans Je Bouquine (en 2015), mais jamais en volume tiré à part. Cette année, Rageot publie donc enfin ce texte qui manquait à l’œuvre complète de l’auteur, et c’est l’occasion de se (re)plonger dedans !

Premier point, l’intrigue ne se déroule a priori pas dans le méta-univers Gwendalavir auquel les autres romans de l’auteur nous ont habitués (quoique cela se pourrait, dans une contrée non citée dans les autres romans). Bien que la novella fasse moins de 100 pages, Pierre Bottero parvient à nous expliquer rapidement les tenants et aboutissants de l’univers, tant culturels que politiques.
De même, les personnages sont caractérisés rapidement. Les protagonistes collent à des stéréotypes (la voleuse, le chevalier), mais ce n’est pas gênant. D’une part parce que l’auteur ne sombre pas dans le cliché (du moins pour les protagonistes) et, d’autre part, parce qu’ils sont vraiment cohérents. D’ailleurs, Plume a des petits airs de Marchombre… d’Ombre à Marchombre, il n’y a peut-être qu’un pas ?

Le roman est dépourvu de concept magique hyper alambiqué – ce qui le rend donc accessible à des néophytes. L’originalité de l’univers, c’est l’importance qui y est accordée aux oiseaux. La Confrérie des Chevaliers du vent chevauche d’immenses aigles domestiqués mais néanmoins fiers. Rien que ce point avait suffi à me faire rêver à l’époque de ma première lecture, et m’a de nouveau embarquée cette fois-ci. Estéblan lui-même est maître d’un jeune autour, qu’il promène sur son bras. Plume, quant à elle, ne fait rien sans sa chouette effraie, qui lui sert aussi bien de complice que d’amie.

L’histoire débute in medias res et les lecteurs sont projetés directement dans le feu de l’action. Sur les quelques premières lignes, on peut avoir l’impression d’avoir raté des épisodes, mais rapidement l’auteur rattrape ses lecteurs. Évidemment, on a l’impression que cette petite aventure prend place dans quelque chose de bien plus vaste que l’on ne fait que toucher du doigt, mais ce n’est pas tellement gênant, car on a juste les détails dont on a besoin pour comprendre l’aventure que l’on suit.
Toutefois je mentirais en disant que je n’étais pas frustrée en terminant ma lecture. Le récit était si entraînant que j’aurais aimé en avoir plus, et je serais partie sans barguigner pour 300 pages (voire trois tomes) de plus !

En somme, retrouver l’écriture fluide et imagée de Pierre Bottero, même en relecture, était un plaisir. La nouvelle est bien menée, et propose un univers et des personnages convaincants – malgré la brièveté de l’ensemble. L’intrigue, comme le style, étant très accessible, je proposerais volontiers ce texte à de jeunes lecteurs, ou à de grands débutants en fantasy. 

Les Aigles de Vishan Lour, Pierre Bottero. Rageot, 11 septembre 2019, 96 p.

 

Le Joyau des Valoris, Les Sept Cités #1, Pierre Pevel.

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Dans la cité corrompue de Samarande, Iryän Shaän, voleur aux yeux de drac, est engagé pour voler un précieux diadème. Il s’acquitte de sa mission mais les joyaux qui ornaient le diadème sont dérobés peu après. Pourquoi ? Par qui ? Pour se disculper, Iryän et ses complices devront le découvrir et vaincre par la ruse et le fer de nombreux adversaires : voleurs, assassins, mages et spectres.

Cette série est un spin-off de la série Haut-royaume mais, si vous ne l’avez pas lue, pas de panique : les romans sont lisibles indépendamment (pour peu qu’on accepte d’être un peu largués au départ dans l’univers). En effet, l’histoire débute sur les chapeaux de roues et s’ouvre sur le vol commis par Iryän : ni une ni deux, on découvre univers et personnages d’un coup.

Et c’est délicieusement complexe ! Les cambrioleurs opèrent par bandes, aux intérêts pas toujours bien définis et, parfois, il peut être un peu difficile de savoir qui est train de trahir qui au juste. Il faut, de plus, faire la part des choses entre magiciens, voleurs et autres mercenaires. Bref : on ne sait pas où donner de la tête et cela donne au récit un côté aussi efficace qu’entraînant.
Toutefois, on regrettera que les personnages soient un peu semblables, ce qui les rend difficile à différencier de prime abord. De plus, pour qui n’apprécie guère les stéréotypes, il faut reconnaître que nos personnages s’inscrivent parfois dans ce cadre : ce n’est pourtant pas gênant ici, car cela permet de mieux discerner les rôles de chacun au sein de l’histoire, d’autant que celle-ci n’est pas très longue. Elle l’est cependant suffisamment pour que l’on se surprenne à se prendre d’attachement pour tel et tel personnage, malgré ses défaillances, ses petites compromissions et ses agissements parfois peu louables.

L’histoire, si courte soit-elle (elle tient en 200 petites pages !) est agréablement complexe – on l’a vu, notamment parce qu’elle oppose des bandes de malandrins aux intérêts souvent divergents. Il reprend ici tous les codes de la fantasy à capuches : l’ensemble est parfaitement ficelé et porté par la plume à la fois fluide et entraînante de l’auteur qui, décidément, s’y entend pour créer des récits très efficaces.
J’évoquais une certaine nébulosité au départ : en effet, on découvre tout de go l’univers des Sept Cités, ses subtilités et la mythologie particulière qui s’y rapportent. Mais l’intrigue étant ce qu’elle est, l’auteur donne assez vite les clefs nécessaires à la compréhension de l’histoire : qui (ou ce que) sont les dracs, alliances et inimitiés principales, réputations, spécificités géographiques… C’est bref, certes, mais suffisant pour rattraper un lecteur perdu ! Ainsi, cette trilogie est parfaitement accessible à qui n’aurait pas lu – comme moi – la série principale.

Finalement, le seul point que l’on pourrait regretter serait la brièveté de cette aventure. Car, si la novella semble s’achever sur une conclusion positive, on a envie de retrouver l’univers et les personnages tant l’ambiance de cette première aventure était prenante. Point positif : les deux tomes suivants sont déjà parus.

Les Sept Cités #1, Le Joyau des Valoris, Pierre Pevel. Bragelonne, 25 mai 2016, 288 p.

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