[2023] Petit bilan de mars-avril

Carnet de lectures

Telle que je suis, Elle McNicoll (École des Loisirs) :
Elle McNicoll est une jeune autrice écossaise dont le précédent titre, Les Étincelles invisibles a été remarqué par les lecteurs et la critique. J’étais donc assez curieuse de découvrir celui-ci.
L’histoire : on découvre Cora, une jeune fille neurodivergente qui s’apprête à aller – contrainte et forcée – à une fête chez les Hawkins, les patrons de son frère, dans une maison luxueuse et froide, pour les 13 ans de leur fils Adrien, un garçon si spécial qu’il ne va pas à l’école. Alors qu’elle s’attendait à le détester, une profonde amitié se noue entre les deux adolescents, déclarés inadaptés et inclassables par la société. Mais une ombre plane sur cette relation lumineuse : celle du père d’Adrien et de son mystérieux institut Grenade, où l’on crée les clones digitaux de personnes afin que leurs proches puisse continuer à les voir après leur décès. Et justement, l’institut s’intéresse de très près à Cora et veut lui faire signer un contrat. Ils peuvent se montrer très persuasifs…
Le récit prend donc place dans un futur très proche du nôtre : la société est identique à la nôtre, les technologies aussi, hormis ce programme d’hologrammes de l’institut Grenade. Les protagonistes, eux, sortent clairement des sentiers battus de la littérature jeunesse : Cora est autiste, Adrien a un TDAH. A travers eux, on explore les regards sans concession ni compassion de la société : le harcèlement scolaire, les profs pas formés qui ferment les yeux ou empirent la situation (pas tous, heureusement), les parents qui aspirent à un enfant « normal »… On vit tout ça à travers les yeux des personnages, dont les pensées sont parfaitement retranscrites – ce qui ne nous fait que mieux comprendre les implications de leurs situations. En filigrane, l’histoire invite à questionner son propre rapport à la différence : la neurodivergence est-elle une maladie ? Faut-il la soigner ? Comment, en tant que parent, accueillir un enfant neurodivergent ? Tout cela est subtilement mené et sert, évidemment, le versant un peu plus SF du récit, qui ne prend toute sa place que dans la seconde partie du récit après un gros retournement de situation. Aux questions précédemment évoquées s’ajoutent celles sur le clonage, l’eugénisme, et la place des IA dans la société (un sujet tout d’actualité). Les deux parts du récit s’entremêlent vraiment bien, avec des péripéties bien dosées qui le rendent très prenant. A mes yeux de vieille lectrice, j’ai trouvé que le dénouement était un peu facile, mais je sais que j’aurais chéri cette lecture en étant plus jeune. L’autrice parvient à mêler récit innovant, questionnements sociétaux parfaitement menés et lecture accessible aux préadolescents, et c’est parfait !
Si vous avez aimé, je vous recommande chaudement de lire La Maison des reflets de Camille Brissot, qui a elle aussi exploré le thème des hologrammes post-mortem !

La Fille du train, Paula Hawkins (Audiolib). Lu par Valerie Marchand, Josephine De Renesse, Julie Basecqx
J’ai écouté La Fille du train, mon tout premier roman de Paula Hawkins ! Et si j’ai passé un bon moment dans l’ensemble… je suis restée un peu sur ma faim avec la conclusion !
L’histoire : depuis la banlieue où elle habite, Rachel prend le train deux fois par jour pour aller à Londres. Le 8 h 04 le matin, le 17 h 56 l’après-midi. Chaque jour elle est assise à la même place et chaque jour elle observe, lors d’un arrêt, une jolie maison en contrebas de la voie ferrée. Cette maison, elle la connaît par cœur, elle a même donné un nom à ses occupants qu’elle voit derrière la vitre. Pour elle, ils sont Jason et Jess. Un couple qu’elle imagine parfait, heureux, comme Rachel a pu l’être par le passé avec son mari, avant qu’il ne la trompe, avant qu’il ne la quitte. Rien d’exceptionnel, non, juste un couple qui s’aime. Jusqu’à ce matin où Rachel voit un autre homme que Jason à la fenêtre. Que se passe-t-il ? Jess tromperait-elle son mari ? Rachel, bouleversée de voir ainsi son couple modèle risquer de se désintégrer comme le sien, décide d’en savoir plus sur Jess et Jason. Quelques jours plus tard, c’est avec stupeur qu’elle découvre la photo de Jess à la une des journaux. La jeune femme, de son vrai nom Megan Hipwell, a mystérieusement disparu…
Le récit est tissé par trois voix différentes : celle de Rachel, la narratrice principale, celle de Megan, la disparue, et celle d’Anna, la nouvelle épouse de l’ex-mari de Rachel. Pourquoi Anna ? Car l’ancienne maison de Rachel, et donc désormais celle d’Anna, est située quelques numéros plus bas que celle des Hipwell, et que Rachel, traumatisée par son divorce, ne peut s’empêcher d’appeler encore et encore son ex. J’ai trouvé le personnage de Rachel vraiment très intéressant : c’est une femme seule, engluée dans sa routine et gravement alcoolique. L’autrice dépeint parfaitement le terrible engrenage de cette maladie, la façon dont les petits verres ou les grosses descentes se succèdent, entraînant Rachel dans des « trous noirs » dont elle ne garde aucun souvenir – ce qui évidemment, devient très intéressant dans un polar. Le roman évoque aussi avec brio la question du voyeurisme, la façon dont on fantasme ou dont on se projette sur les vies des autres. Tout cela crée un environnement plein de suspense ! Et il en faut, car j’ai trouvé le début du récit assez lent, à se demander où l’on va. Ce n’est pas gênant car, comme j’ai dit, on a plein d’autres choses à se mettre sous la dent, mais il ne faut pas s’attendre à une intrigue trépidante dès le départ. Là où j’ai été un peu déçue, parce que j’avais deviné une part de la résolution en amont, et parce que j’ai trouvé que l’on restait toujours un peu en surface des personnages – alors que des thèmes vraiment sombres sont abordés tout au long du roman. De plus, alors que le reste du roman est assez lent, la fin est réglée en deux coups de cuiller à pot, ce qui ne me l’a pas rendue particulièrement crédible. Donc j’ai passé dans l’ensemble un bon moment en écoutant ce titre, mais je ne suis pas certaine que la lecture me restera longtemps en tête !

Rayon bulles

Le jour où j’ai voulu sauver la forêt, Nora Dåsnes.
Cette BD a atterri sur ma PAL de boulot et j’ai passé un chouette moment avec !
L’histoire : Bao, 13 ans, est déléguée principale des élèves de son collège. Lorsque le conseil décide de raser la forêt jouxtant le collège pour en faire un parking, son sang ne fait qu’un tour : pourquoi les adultes ne comprennent-ils pas l’urgence climatique, alors que le pays est en proie à de violentes inondations ? Bao monte alors un comité de soutien pour la forêt et lance un programme de désobéissance civile, soutenue par ses amies de toujours, Emma et Linéa.
Si vous avez lu L’année où je suis devenue ado, vous connaissez déjà Emma. Ceci étant posé, les deux titres sont parfaitement indépendants. J’ai beaucoup aimé la façon dont l’autrice représente ce moment entre l’innocence de l’enfance et la gravité de l’adolescence. Bao, par exemple, joue avec ses amies dans la forêt et toutes trois défendent leur « base » face à la bande de garçons de l’autre classe de 5. Ils se chahutent, se tendent des embuscades, bref ils s’éclatent comme des enfants. Mais à côté de ça, Bao est très consciente des enjeux climatiques et écologiques, très investie dans son rôle de déléguée des élèves. Les deux tendances sont bien préservées dans le récit (surtout dans la première partie) et malgré la mise en scène de l’engagement très ferme de l’adolescente, l’autrice n’oublie pas de petits moments de respiration avec les histoires de cœur des personnages, ou quelques aperçus de leurs relations familiales (parfois tendues). J’ai trouvé que la BD parlait vraiment bien de l’engagement chez les adolescents, en sachant aussi mettre en scène le désarroi des parents un peu largués. Et du coup : c’est très prenant ! Côté illustrations, j’ai beaucoup aimé le travail à l’aquarelle et les jeux de couleurs bien choisis pour rendre les différentes ambiances. Cela m’a donné envie de lire son précédent titre !

Côté séries

La disparue de Lørenskog, Nikolaj Frobenius,Stephen Uhlander.
Des fois, on se lance dans des séries au synopsis alléchant, et des fois, eh bien ça ne le fait pas.
L’histoire : la femme d’un millionnaire disparaît. Alors que les ravisseurs exigent qu’il ne prévienne pas la police, celui-ci implique tout de même les forces de l’ordre, qui se voient contraintes d’enquêter dans le plus grand secret – pas d’enquête de voisinage, donc. Parallèlement, les médias finissent par découvrir le pot-aux-roses et se mêlent de l’enquête.
Je ne sais pas trop par où commencer… ! Le récit est porté à la fois par des personnages-enquêteurs et par des journalistes. Mais au lieu d’alterner les points de vue, on a plutôt des épisodes entiers consacrés aux uns, ou alors aux autres. Ce qui fait que l’histoire avance de façon assez bancale, puisqu’on est toujours dans le noir sur l’un ou l’autre des points de vue. De plus, le récit s’étend sur un temps extrêmement long (au moins deux ans). Je pense que c’est assez représentatif des vraies enquêtes, mais là on est dans une sorte d’inertie assez pesante : il ne se passe globalement rien, personne ne s’affole et… et c’est long. Le vide est meublé par quelques instantanés des vies personnelles de certains personnages, mais ça ne suffit pas à remplir les blancs : on a vraiment l’impression que c’est là pour caler les bouts branlants du scénario, et cela ne m’a pas passionnée.
L’enquête fait un bon subit dans les derniers épisodes, grâce aux avancées des journalistes, mais rien n’est bouclé. Car c’est bien le problème : la série s’achève en cul-de-sac, sans résolution. Ils sont partis dans tous les sens, on nous a montré les pistes privilégiées et … pas de conclusion. Je ne sais pas si c’était prévu en plusieurs saisons au départ, mais celle-ci ne m’a clairement pas convaincue !

Monster, Masayuki Kojima, d’après le manga éponyme de Naoki Urasawa.
Je crédite cette série dans ce bilan mensuel, mais vu la longueur (quelques 74 épisodes quand même), je crois bien qu’elle est entamée depuis décembre ! Je n’ai pas lu le manga éponyme, donc je ne me prononcerai pas sur l’adaptation en elle-même !
L’histoire : 1986, Düsseldorf, Allemagne de l’Ouest. Le Dr Tenma, un brillant neurochirurgien japonais installé en Allemagne, décide d’ignorer l’ordre de son supérieur (abandonner l’opération en cours d’un enfant pour sauver une célébrité locale arrivée après le bambin) et sauve la vie de l’enfant. C’est ainsi que commence cette horrible histoire ! Bientôt accusé de meurtre(s), le docteur Tenma cherche à résoudre le mystère et à sauver sa peau.
C’était vraiment excellent ! Je ne suis pas très friande des animes (je n’ai pas assez regardé le Club Dorothée apparemment) mais là, c’est vraiment un titre qui sort du lot. Malgré le classement sur les différentes plateformes, je ne le conseillerais pas à un public jeunesse (ado à la rigueur) : c’est sombre, c’est glauque, il y a du meurtre à tour de bras et psychologiquement, faut être bien accroché, quand même. L’histoire débute en 86 avant de faire un sacré saut en avant : on va principalement suivre Tenma alors que cela fait déjà une dizaine d’années qu’il enquête de son côté, tout en étant activement recherché par la police. Le récit est assez touffu, car l’histoire de cet enfant miraculé intéresse de nombreuses personnes (pas toutes hyper recommandables). De fait, l’anime est subdivisé en différents sous-arcs narratifs qui donnent l’impression qu’on explore une histoire montée en arbre, avec plein de petites ramifications de-ci de-là. L’avantage, c’est que tout est intéressant, donc même si on a l’impression de quitter le sentier central pour explorer des détails dans les sous-bois, on ne s’ennuie pas un instant ! Cela m’a donné envie de lire les mangas !

The Sinner, Derek Simonds
Mon dilettantisme de l’année dernière ne m’a pas permis de vous parler de cette série policière qui m’a pourtant tenue en haleine durant trois saisons, et je le regrette ! Comme j’ai regardé cette année la quatrième (et dernière) saison, j’en profite !
L’histoire : alors qu’il est à la retraite, Harry Ambrose et sa compagne peintre, Sonya (rencontrée dans la saison précédente), posent leurs vacances sur l’île d’Hanover, dans le Maine. Alors qu’ils y sont depuis à peine une journée, Harry surprend une jeune pêcheuse du cru, Percy, en train de sauter de la falaise en pleine nuit. Quelques heures plus tôt, il avait eu avec elle un échange assez troublant. Alors que la famille, en situation de monopole sur l’île, peine à croire au suicide, Harry est associé à l’enquête.
Comme dans les trois premières saisons, l’enquête se déroule sur l’ensemble des huit épisodes. Et comme dans les trois premières saisons, on va explorer les tréfonds les plus sombres de l’âme humaine. Car oui, The sinner n’est clairement pas la série à regarder si vous avez déjà des envies de meurtre sur vos congénères : ça ne va pas vous aider à vous détendre (pas du tout). J’aime beaucoup la façon dont le scénario nous balade de-ci de-là, explore les faux-semblants, creuse les petits secrets de famille et fait exploser aux yeux des personnages la montagne qu’ils essayaient de cacher. Ce sont toujours des intrigues à tiroirs, qui nécessitent de bien creuser derrière les apparences et qui, généralement, mettent au jour les péchés des uns et des autres (en même temps, le titre est transparent). Harry est encore plus torturé que dans les saisons précédentes, l’histoire qui l’a opposé à Jamie (saison 3) ayant laissé des traces durables. Encore une fois, on est dans du glauque, du poisseux, du sombre, du désespéré, du qui-donne-pas-foi-en-l-humanité (mais bon, c’est le principe de la série !). Le rythme est assez lent, mais colle à l’ambiance générale !

Tops/Flops :

Sur ces deux mois, je n’ai qu’une lecture qui m’est vraiment tombée des mains (mais que j’ai quand même terminée), j’ai nommé Lightlark, tome 1, d’Alex Aster, qui bénéficie pourtant d’un excellent accueil critique sur les réseaux sociaux, que j’ai du mal à comprendre. Pourtant, ça partait bien, puisqu’on était dans du Hunger Games sauce fantasy.
Malheureusement, l’écriture franchement passable, les clichés à la queue-leu-leu et les rebondissements sans queue ni tête ont clairement eu raison de ma patience, et j’ai passé plus de temps à lever les yeux au ciel qu’à savourer l’intrigue (que j’ai trouvée très pauvre en plus). Bref : clairement pas la lecture du mois, et il est certain que je me dispenserai de lire la suite si elle paraît !

A côté de cela, j’ai eu un gros coup de cœur pour Pénélope, reine d’Ithaque de Claire North, qui inaugure avec ce titre une trilogie intitulée Le Chant des Déesses. On sait qu’Ulysse a répondu à l’appel d’Agamemnon parti assiéger Troie et que le voyage du retour, semé d’embûches, lui a pris plusieurs années. Mais pendant ce temps-là, que s’est-il passé à Ithaque ? Comment Pénélope a-t-elle ménagé la chèvre et le choux, pendant qu’elle aussi subissait le siège d’une centaine de prétendants ? C’est le point de départ de ce récit de fantasy historique qui m’a beaucoup plu. La narration est assez originale, puisqu’elle est menée par Héra, la déesse, qui pose un regard sans concession sur ses collègues divins, comme sur l’humanité. Le style est assez moderne (Héra n’est pas avare en grossièretés), ce qui tranche avec l’époque et apporte un peu de frais à ce qu’on pense est être un récit rebattu ! Cela m’a beaucoup plu et j’ai hâte de lire la suite !

Citations

« Wolf traînait au hangar en faisant mine d’entretenir son scaphandre. Il avait ouvert la trappe du coeur électronique et essayait de se rappeler à quoi servaient les différents composants. C’était une entreprise vouée à l’échec, qu’il poursuivait pourtant avec une obstination contrariée. Il n’avait jamais appris à quoi servaient ces pièces. En cas de besoin – pour un dépannage imprévu sur le terrain, par exemple -, son NHESTOR lui aurait listé le rôle et les caractéristiques de chaque module, chaque carte. Ces connaissances ne lui avaient jamais véritablement appartenu mais le résultat était le même : Wolf avait le sentiment d’avoir perdu quelque chose. »
Ce qui naît des abysses, Sylvie Poulain.

« C’est ce que m’ont appris mes séances de psy : les manques dans ma vie seront éternels. Il faut grandir autour d’eux, comme les racines d’un arbre autour d’un bloc de béton ; on se façonne malgré les creux. »
La fille du train, Paula Hawkins.

« Soyons francs, encore aujourd’hui, la valeur d’une femme se mesure à deux choses : sa beauté ou son rôle de mère. Je ne suis pas belle, et je ne peux pas avoir d’enfant. Je ne vaux rien. »
La fille du train, Paula Hawkins.

« Comment aurait-on pu remarquer nos souffrances ou entendre nos appels à l’aide, quand nous ne pouvions rien faire de plus que chuchoter dans le noir ? »
Si je dois te trahir, Ruta Sepetys.

« Darlington aimait à dire qu’avoir affaire à des fantômes, c’était comme prendre le métro: N’établissez pas de contact visuel. Ne souriez pas. N’entamez pas de conversation. Dans le cas contraire, vous ne savez jamais ce qui risque de vous raccompagner chez vous. »
La Neuvième maison, Leigh Bardugo.

[2023] Petit bilan de janvier-février

Carnet de lectures

The girl with no soul, Morgan Owen (La Martinière Jeunesse, 2022, 432 p.).

À Providence, la dictature de l’Ordre est totale. L’âme de chaque citoyen est scrutée, contrôlée. Et gare à celles qui s’écartent du droit chemin : elles sont aussitôt reprogrammées. Iris, elle, ne possède pas d’âme. Elle est Vide. Si cela lui permet d’échapper à la vigilance des Inspecteurs, c’est aussi ce qui l’empêche d’éprouver des sentiments et de se souvenir de son passé. Pourtant, au contact d’un bijou appartenant à une riche famille au pouvoir, son Étincelle, l’une des cinq composantes de son âme, se réveille. Des sentiments qu’elle pensait ne jamais éprouver surgissent et, avec eux, un désir irrésistible de découvrir d’où elle vient. Qui a volé l’âme d’Iris ? Et pourquoi ? Pour le savoir, elle devra s’approcher au plus près des secrets du pouvoir. Désormais traquée par l’Ordre, parviendra-t-elle à rassembler les pièces manquantes de son identité… et à recoller les morceaux de son cœur ?
Découverte mitigée avec ce titre : autant j’ai trouvé l’idée de l’âme aux cinq composantes assez originale et bien trouvée, autant le reste m’a semblé arpenter des sentiers déjà bien trop souvent rebattus en dystopie. On retrouve donc ce qu’il y a dans toute dystopie : une société écrasée par un ordre qui repose (évidemment) sur un mensonge éhonté ; une romance entre les deux protagonistes alors que tout semble les opposer ; un traître parmi la résistance. Alors oui, la romance reposait sur une pirouette joliment trouvée, mais le reste ne m’a malheureusement pas convaincue. Le traître ? Oublié entre deux chapitres sans explications. Le système de magie manque clairement d’explications. C’est très pratique, puisque cela permet aux personnages de se sortir de toute situation en un tour de main, mais honnêtement, ce n’est pas crédible pour un sou ! Pire : les personnages sont à peine creusés, et cela m’a laissé une méchante impression de roman inabouti. Bref : pas ma meilleure lecture de l’année !

L’Enfer, Marin Ledun (In8, collection Faction, 2021, 96 p.).
J’étais assez curieuse de découvrir la nouvelle collection young-adult d’In8, intitulée Faction. Quoi de mieux que de débuter avec un auteur apprécié ?
Qui se souvient des bagnes de Guyane ? Sur les îles du Salut, au large de Kourou, la France envoie ses détenus. Les prisonniers profitent peu du charme des tropiques. Le bagne, c’est l’Enfer. C’est là qu’arrive Ahmed, un jeune homme de 19 ans, condamné pour avoir bravé le couvre-feu en rendant visite à son amoureuse. Là-bas, tout menace. Les fièvres. Les insectes. Les requins. Les gardiens. Le désespoir. Jusqu’au jour où Ahmed croise le chemin d’une petite fille.
C’est Ahmed que l’on suit ici comme narrateur : on est donc aux premières loges pour « profiter du charme des tropiques quand on est bagnard ». Humiliations, mauvais traitements, soleil dardant à longueur de journée : l’ambiance est plus que rude. On comprend donc d’autant mieux pourquoi Ahmed se passionne pour les allées et venues de cet officier accompagné d’une petite fille, qui vont presque quotidiennement à l’hôpital – voir une maman et un bébé tout neuf, peut-être ? Cette vision sans cesse renouvelée permet au prisonnier de tenir, d’espérer sa future vie meilleure, y compris quand les signes néfastes s’accumulent. La tension monte donc peu à peu, en jouant sur le contraste entre la situation particulièrement sombre des prisonniers et sur le rayon de lumière apporté par la vision de Louise. Le texte, sensible et incisif, nous cueille au moment du bouleversant retournement final.

Comme ton père, Gilles Abier (In8, collection Faction, 2021, 133 p.).
J’ai donc enchaîné avec Comme ton père, de Gilles Abier, toujours dans la même collection.
Loris, 17 ans, n’a jamais connu son père. Alors quand il est convoqué chez la proviseure pour avoir agressé une camarade, et que sa mère l’accable d’un méprisant « T’es comme ton père, tiens ! », son univers explose, soudain trop exigu pour contenir les questions qui le submergent. Exclu trois jours du lycée, Loris décide alors de partir à sa recherche, prêt à tout tenter pour le retrouver.
J’ai beaucoup aimé ce titre haletant ! L’intrigue est dense et resserrée (tout se déroule sur 3-4 jours) et mélange beaucoup de choses (mais c’est bien fait). Il y a, évidemment, cette enquête très prenante, que mène Lorris sur les traces de sa mère adolescente et sur les circonstances de sa conception. Cette quête va brasser de nombreux thèmes : il est question de viol, de refoulement, de silence, de violence (psychique et verbale), de mensonge, de culpabilité, de ressentiment, de transmission. C’est dense, mais chaque thème a sa place et est justement traité. Je l’ai lu pas tout à fait d’une traite mais presque, avec entrain et passion. J’ai passé un excellent moment dans ce récit mené tambour battant, et qui convoque tant d’émotions si bien retranscrites !

Rayon bulles

Sirius : twin stars, Ana Cristina Sanchez (Glénat, 2023, 156 p.).
Ai-je lu un shôjo ? Oui. Je sais, ça semble incroyable. Alors déjà, je dois dire qu’il était sur ma PAL de travail (donc lecture obligatoire) mais que j’ai vraiment, vraiment adoré ma lecture. (Encore plus incroyable).
L’histoire se consacre sur Daniela, dite Dani, une jeune joueuse de tennis prodige qui a vu sa carrière s’arrêter brusquement suite à une malaise cardiaque en plein match. Fragilisée après la lourde opération qu’elle a subie, et par la relation avec sa mère (qui était aussi sa coach) qui s’est terriblement dégradée, elle vient passer l’été dans un petit village de la côté espagnole pour se reposer, dans la maison familiale où se trouve déjà son cousin, qui prépare un difficile concours. Là, elle fait la rencontre de Bianca, une autre adolescente passionnée d’astronomie qui passe elle aussi l’été dans le village.
Le manga s’ouvre sur Dani, emmenée par son père, dans le petit village en question (avec un enthousiasme incroyable !). Le récit mêle parfaitement vie quotidienne et romance, avec une douceur dans la narration que j’ai hautement appréciée. A leur façon, chacune des deux protagonistes sort du moule, et tente de trouver sa place. Dans le cas de Dani, cela se double d’une lente et difficile reconstruction d’elle-même. La question des relations familiales (notamment avec la mère, pour Dani) est aussi très présente, ce qui entraîne quelques scènes que j’ai trouvées particulièrement touchantes – même si ce n’est pas le centre du récit.
Les graphismes collent à la douceur du récit. D’ailleurs, j’ai apprécié que l’histoire se déroule en Espagne, ce n’est pas un cadre que j’ai l’habitude de voir en manga ! Bref, j’ai passé un excellent moment avec ce titre plein de douceur et de bienveillance, qui a en plus le bon goût de dérouler une histoire complète en un tome. Je suis curieuse de découvrir les autres titres de l’autrice, maintenant !

Arcana #1, Le Coven du tarot, Serena Blasco (Drakoo, 2021, 119 p.).
J’adore le travail de Serena Blasco. J’avais acheté cette BD à sa sortie pour la bibli et pas du tout eu l’occasion de mettre la main dessus (apparemment, je ne suis pas la seule amatrice de Serena Blasco à la médiathèque !). Bref, j’ai donc attendu patiemment le retour pour enfin lire cette BD. Et autant j’ai adoré la série des Enola Holmes, autant j’ai moins accroché à ce titre.
Mais avant tout, de quoi ça parle ? Fauna et Flora, deux jumelles de 15 ans qui ignorent tout l’une de l’autre, ont grandi sur deux îles différentes. Envoyées sur l’île d’Arcana pour intégrer les brigades des arcanes majeurs au coven du tarot, elles découvrent leur parenté. Les deux sœurs ignorent encore qu’une terrible prophétie plane au-dessus d’elles.
Les graphismes sont, comme d’habitude, splendides. C’est une merveille à regarder et je me suis volontiers perdue dans les pages et double-pages pour observer chaque petit détail. L’histoire est assez chouette, notamment la partie où les deux sœurs se découvrent et apprennent leur gémellité. C’est plutôt l’univers qui m’a laissée de marbre : je suis totalement ignare en matière de tarot et j’ai trouvé le contexte hyper touffu. Il m’a parfois manqué des informations pour comprendre l’organisation, ou les rouages entre les arcanes. Malgré cela, j’ai lu l’ensemble avec un certain plaisir, car comme je le disais, les graphismes sont absolument magnifiques. Le T2 est sorti cette année et, malgré tout, il est possible que j’y jette un œil !

Giant Days #1, John Allison, Lissa Treiman et Max Sarin (Akileos, 2017, 96 p.)
Une collègue d’un précédent boulot m’avait beaucoup, beaucoup parlé de la série Giant Days : il était donc plus que temps que je m’y mette enfin !
En colocation à la fac depuis maintenant 3 semaines, Susan, Esther et Daisy sont très rapidement devenues d’excellentes copines. Mais face aux dragueurs lourdingues, à de drôles de moisissures dans leur chambre, à la grippe, au retour des réac’ et aux aléas de la fac, elles pourront se considérer chanceuses, si elles tiennent jusqu’au printemps…
Et c’était une chouette découverte ! Les personnages sont attachants et j’ai apprécié leurs échanges plein d’humour (même si parfois cela m’a semblé un peu décousu). La BD aborde des sujets d’actualité avec légèreté, et avec justesse, ce qui vraiment, ne gâche rien ! Je lirai sans aucun doute la suite avec plaisir.

Tops/Flops

Hormis The girl with no soul de Morgan Owen, dont j’ai parlé un peu plus haut, pas de grosse déception de lecture ce mois-ci. En revanche, plusieurs très bonnes lectures (pas encore chroniquées, mais ça va venir !).

J’ai attaqué l’année avec la suite de Capitale du Sud de Guillaume Chamanadjian (Aux Forges de Vulcain) dont j’avais adoré le premier tome. Comme dans le premier opus, on est dans un récit particulièrement prenant, que j’ai eu beaucoup de mal à lâcher. L’arrivée d’un nouveau personnage venu de l’extérieur de la cité renouvelle un peu les thématiques politiques et les enjeux. J’ai hâte de lire la suite et fin qui paraît tout bientôt !

Ensuite, j’ai lu avec beaucoup de plaisir Le silence des carillons d’Edouard H. Blaes (ActuSF). C’est le premier roman (à ma connaissance) de l’auteur, qui a par ailleurs publié des nouvelles. Ce one-shot nous plonge dans un mélange extrêmement réussi de fantasy et de récit de survie, dans une ambiance à la fois post-apo et dark academia. Je l’ai lu avec passion, tant la plume de l’auteur est fluide et mène brillamment le récit. Je suivrai les prochaines parutions de l’auteur !

Enfin, j’ai lu Le vol du boomerang, le dernier titre en date de Laurent Whale (Au Diable Vauvert), un auteur dont j’apprécie aussi bien les récits de SF que les thriller. Celui-ci nous entraîne en Australie, sur les traces d’un jeune Aborigène qui veut participer à une prestigieuse course de véhicules solaires afin de porter la voix de son peuple – tout ça sur fond de Covid19, de méga-incendies et de tensions extrêmes sur l’île. On est plus dans le roman d’aventure mâtiné de suspense que dans le polar et j’ai eu beaucoup de mal à reposer le roman tant je l’ai trouvé prenant !

Citations

« Vos têtes sont enfoncées tellement profond dans vos oliviers, vos pâtisseries et vos poissons que vous ne savez même plus qu’il y’a un monde, là dehors. »
Trois lucioles, Guillaume Chamanadjian.

« Tu es encore un peu jeune pour comprendre que les hommes sont pour nous comme les mets pour ton ami Eustaine. Seulement un tiers du plaisir est dans la présentation , un tiers est dans la saveur et le dernier tiers dans le vin qu’on déguste avec. »
Trois lucioles, Guillaume Chamanadjian.

« Elle avait trouvé l’interprétation de Macbeth des Tunstell plus fascinante que qui que ce soit d’autre, sans doute parce que les bouffonneries étaient juste à son niveau d’éducation, ou parce que vivre avec lord Akeldama l’avait préparée à un certain degré d’extravagance. »
Sans âge, Gail Carriger.

[2022] Petit bilan de novembre-décembre.

Cette période aurait dû être marquée par un énorme craquage livresque, puisque je devais aller à Montreuil (et voir mes ami.e.s, et ma famille) mais, malheureusement, les voies de la SNCF en ont décidé autrement. Ce sera pour l’année prochaine !

Carnet de lectures

Hypallage #3 : Écorce vive, Sylvain Pattieu (L’École des Loisirs).
J’ai trouvé ce titre sur ma PAL de boulot : j’étais un peu inquiète car je n’ai pas lu le deux précédents, mais il s’est avéré que cela pouvait se lire relativement indépendamment (je pense qu’on en profite plus en ayant tout lu, mais ce n’était vraiment pas vital d’avoir lu les deux premiers tomes).
L’histoire : à la fin de sa seconde, Zako est réorienté en section professionnelle et se retrouve dans un lycée du Jura en menuiserie. Dégoûté, loin de chez lui, il a d’abord du mal à trouver sa place et doit affronter des blagues sur son accent de banlieue, sa couleur de peau. Mais il va peu à peu prendre goût au travail du bois et s’y épanouir. Aimée descend à Marseille pour passer les détections dans un centre d’entraînement de foot féminin. La maladie de sa mère va contrarier ses plans. Va-t-elle devoir sacrifier sa carrière pour s’occuper de sa petite sœur ?
La première chose qui m’a surprise en ouvrant le roman, c’est qu’il est entièrement écrit au style indirect libre : pas de marque de dialogue, peu de ponctuation et cette impression d’être directement dans la tête des personnages. Cela demande une légère gymnastique pour savoir qui parle, ou qui pense, mais cela se fait de façon très fluide et bientôt, on n’y pense plus du tout !
Les personnages principaux sont Zako et Aimée, mais leurs amis ont aussi droit à leurs arcs narratifs, durant lesquels la bande d’amis passe par tous les maux de l’adolescence et de notre époque : amour, amitié, orientation professionnelle ou sexuelle, drogue, consentement, relations familiales… Le récit est très riche, et les thèmes sont à la fois bien amenés, et bien traités. Au final, ma seule interrogation sur ce roman restera celle du vocabulaire : très ancré dans son époque, le roman étale autant de termes « de jeunes » que possible. Déjà, j’ai été obligée d’en chercher la moitié (bonjour, vieillerie :D) mais je me demande comment ce type de récit peut durer dans le temps ? Qui sait si ce vocabulaire sera toujours usité dans quelques années, ou si en le présentant à des ados, ce ne sera pas perçu comme périmé ? L’avenir le dira ! Quoi qu’il en soit, j’ai passé un très bon moment avec ce titre, et ça m’a donné envie de lire les deux précédents !

Coin bulles

Saga #1, Brian Vaughan & Fiona Staples (Urban Comics).
J’ai profité de mon abonnement dans une nouvelle médiathèque pour emprunter le premier tome de Saga, le comics de Brian K. Vaughan et Fiona Staples, dont j’avais beaucoup entendu parler, sans jamais m’y aventurer. Et je regrette de ne m’être pas lancée plus tôt dedans ! J’ai adoré !
L’histoire : Un univers sans limite, peuplé de tous les possibles. Une planète, Clivage, perdue dans la lumière froide d’une galaxie mourante. Sur ce monde en guerre, la vie vient d’éclore. Deux amants que tout oppose, Alana et Marko, donnent naissance à Hazel, un symbole d’espoir pour leurs peuples respectifs. L’espoir, une idée fragile qui devra s’extraire du chaos de Clivage pour grandir, s’épanouir et conquérir l’immensité du cosmos.
L’univers est très très riche, j’ai bien accroché aux personnages et j’ai trouvé que ce premier tome donnait à la fois assez d’infos de base pour tout suivre, tout en donnant hyper envie de lire la suite. Très bonne pioche, donc, et je pense bien emprunter la suite en 2023 ! Par contre, je ne sais pas si je vire puritaine, mais je l’ai trouvé au rayon jeunesse-ado, et vu la quantité de scènes de sexe, ce n’est pas le rayon auquel je l’aurais préférentiellement rangé… S’il y a d’autres bib dans la salle, je veux bien votre avis !



Les Bras armés #1 : Les désignés, Enrico Orlandi et Olivier Pog (Dupuis).
Et hop, un titre de ma PAL de boulot, dont je ne savais rien avant de l’ouvrir !
L’histoire : le jeune Fidel vit heureux sur son île, partagé entre ses jeux avec son amie Tima et la pêche en compagnie de son père. Et rien ne semble devoir assombrir ce bonheur ! Car les humains, autrefois asservis par les Anciens Dieux, sont maintenant protégés par les Bras Armés, qui possèdent dans un de leurs bras une redoutable puissance volée à leurs anciens maîtres… Mais voilà que la vieille Mako, Bras Armé de l’archipel, arrive en ville afin de désigner cinq adolescents, parmi lesquels elle doit trouver son successeur. Fidel, qui fait partie des désignés, va devoir suivre une étonnante formation, qui fera de sa vie une succession d’aventures, de dangers et de révélations jusqu’à ce que – peut-être – il devienne à son tour un Bras Armé. Mako doit vite trouver celui qui la remplacera… Car au loin pointe déjà la menace des Dieux dégénérés ivres de vengeance prêts à fondre sur l’archipel !
C’est donc le premier tome d’une série de fantasy pour préadolescents que proposent les deux auteurs. L’univers est assez original : on est dans un archipel loin de tout, ambiance Hawaii et cocotiers, mais avec un soupçon de magie. Les fameux Dieux dégénérés ressemblent à l’iconographie assez classique des aliens (des têtes triangulaires, de longues pattes arachnoïdes). Je n’ai pas vraiment accroché aux graphismes, que j’ai trouvés un peu trop angulaires et enfantins à mon goût. L’intrigue, de son côté, reprend le schéma classique du récit d’initiation. Donc c’est sympa, mais pas non plus inoubliable et je dois dire que si la suite n’arrive jamais sur ma PAL de taf, je n’en ferai clairement pas une maladie !

Colossale #1, Rutile & Diane Truc (Jungle).
Et on continue avec cette fameuse PAL de travail, sur laquelle a atterri le premier tome de Colossale, par Rutile et Diane Truc.
L’histoire : la vie mondaine de Jade est toute tracée : des soirées luxueuses, des études dans un lycée prestigieux, un carnet bien rempli; il ne lui reste plus qu’à trouver le galant idéal (riche, afin de renflouer la famille). Mais comment réussir à rentrer dans le rang quand la seule chose qui l’obsède, c’est faire de la musculation à longueur de journée ?
Excellente surprise que cette BD qui a d’abord connu un succès retentissant au format webtoon. J’ai adoré le mélange « univers de princesses », notre époque et le thème ô combien improbable de la muscu. C’est loufoque, mais ça fonctionne ! On suit Jade dans ses déboires adolescents, coincée qu’elle est entre ses aspirations et celles de sa mère (qui veut à tout prix la marier). Les autrices jouent sur les codes de la comédie romantique, tout en évoquant des thèmes d’actualité (grossophobie, construction de soi, poids des apparences, attentes familiales, etc.) avec légèreté, mais sans les minimiser. Point bonus : la comédie n’est pas oubliée, on se moque gentiment des romances, j’ai beaucoup ri et j’attends avec impatience le tome 2 !

Mukai #1, Kriko Jr (Omaké Books).
Toujours sur la PAL de travail, qui recèle des pépites et aussi des trucs nettement moins bien, comme ce premier tome de Mukai.
L’histoire : Mukai est un ado qui vit et travaille dans la ferme laitière de son grand-père. Une nuit, il fait un cauchemar horrible, dans lequel un démon arrache les yeux de son grand-père. Or, au réveil, il apparaît que le papi a effectivement perdu la vue durant la nuit. Mukai décide alors de le venger en devenant un guerrier des rêves. Il découvre au passage qu’une effroyable conspiration menace le monde…
Je crois que j’ai rarement autant soufflé en lisant un manga. L’intrigue est hyper linéaire et manque clairement d’originalité (l’orphelin élu, blablabla). Le seul truc qui sort un peu du lot, c’est le lait magique et la vache qui parle mais, dans la mesure où ce manga est une commande du lobby laitier pour assurer sa pub, j’imagine que c’était le minimum syndical ! Je n’ai découvert cette information qu’en cherchant des infos sur le titre, donc ça passe assez bien dans le récit sans faire propagande. Mais bon, il faut quand même se fader le découpage hyper artificiel (avec un résumé en fin de chapitre et une tentative d’effet d’annonce pour la suite qui ressemble à un mauvais scénario de série Z !) et l’humour particulièrement lourdingue. Je m’abstiendrai donc de lire la suite !

Quatre sœurs, intégrale #1, Malika Ferdjoukh et Cati Baur (Rue de Sèvres).
Un peu de douceur pour finir l’année, avec la réédition en intégrale des deux premiers tomes de la série Quatre sœurs : Enid et Hortense !
L’histoire : les quatre sœurs Verdelaine (qui sont en fait cinq) vivent, depuis la mort tragique de leurs parents, à la Vill’Hervé, en bord de mer. Charlie, l’aînée, tente de joindre les deux bouts, les autres vivent leurs vies d’adolescentes et préadolescentes. Enid, depuis la dernière tempête, est persuadée qu’un fantôme hante le parc (elle l’entend hululer toutes les nuits) et est bien décidée à enquêter sur ce mystère. Hortense, elle, tente de vaincre sa timidité en rejoignant une troupe de théâtre.
Les deux premiers tomes sont consacrés aux deux sœurs les plus jeunes, mais les intrigues mêlent les arcs narratifs de toute la sororie, ce qui rend d’une part le récit très prenant et, d’autre part, donne diablement envie de lire la suite. Le récit, très équilibré, sait ménager suspense, humour, mais aussi des passages plus émouvants lorsqu’il est question des parents décédés (qui apparaissent sous forme de fantômes). L’ensemble dégage une impression de chaleur et de bienveillance très agréable, d’autant que les dessins et couleurs de Cati Baur (ronds et douces), collent à l’ambiance générale. Bref, j’ai hâte de lire la suite !
J’avais mis ce titre dans mon Cold Winter Challenge pour la catégorie Iceberg, donc hop, une catégorie de validée !

Top/Flop

La seule lecture qui m’a laissée de marbre (et plus si affinités), en cette fin d’année, est donc le manga Mukai évoqué juste au-dessus. Je crois que je suis assez difficile en manga, surtout en shonen, et là, clairement, rien ne m’a convenu !

Par contre, niveau bonnes lectures, et dans des genres totalement différents, je vais citer trois titres (pas encore chroniqués, mais j’espère que ça va venir) !

Bien que j’aie fait des études littéraires, je suis assez à la bourre sur les classiques. Donc j’ai enfin lu Jane Eyre, de Charlotte Brontë et bien m’en a pris car j’ai passé un excellent moment !
J’avais peur de me décourager (c’est quand même une sacrée briquette dans cette édition), mais que nenni, cela m’a bien trop plu. Je connaissais déjà l’histoire (je pense avoir vu au moins deux adaptations), donc j’ai un peu moins profité de l’association ambiance mystérieuse + révélation, mais je me suis tout de même laissée embarquer dans ma lecture. Si vous prévoyez de le lire, je vous conseille quand même de vous tenir éloignés des adaptations, ça gâche une partie du plaisir !
J’ai trouvé le texte fluide et facile à lire et, sur certains aspects, le propos hyper moderne (Jane ne veut pas se marier, c’est quand même à souligner). Bref, une très chouette lecture, et je pense que je vais continuer à piocher dans les romans de cette époque et de cette veine pour lire ma romance annuelle !

Ensuite, j’ai lu, avec un immense plaisir là encore, Vers les étoiles, le tome 1 de la série Lady Astronaut, de Mary Robinette Kowal, que j’avais envie de découvrir depuis longtemps.
L’uchronie est intelligente et hyper bien menée : on a effectivement une Amérique des années 50 un brin chamboulée, mais question mentalités, on est bien dans ce qu’on connaît. Donc le récit fait la part belle à la course à l’espace, mais aussi à des sujets de société vraiment d’actualité comme la lutte pour les droits civiques, ou la place des femmes. Au départ j’ai été un peu déstabilisée par les ellipses, qui sonnent l’impression de lire de multiples petites scénettes, mais en fait tout ça forme un tout cohérent qui n’a pas tardé à m’embarquer. J’ai hâte de lire la suite (vu que la série est déjà intégralement parue) !

Enfin, je l’avais gardé au chaud pour mon mois de décembre, j’ai lu Le Temps du Teuz de Morgan of Glencoe, un hors-série dans sa série La Dernière Geste (toujours pas chroniquée ici, mais je vous la recommande plus que chaudement). Ces 24 textes portent tous sur le solstice d’hiver, une fête importante dans l’univers de la Geste : 24 histoires donc, avant, pendant ou après les trois tomes déjà parus (gare aux spoilers donc), qui explorent différents personnages. Évidemment c’est chaleureux et mignon tout plein, mais pas que ! Certains récits réservent leurs lots de drames et franchement, je n’étais pas toujours prête.

Citations

« Les érables bavards constituaient l’une des plus anciennes prouesses technologiques des alchimistes et leur échec le plus retentissant. Initialement développée pour envoyer des messages d’une ville à une autre, la science des feuilles et de la sève s’était avérée d’une effroyable complexité. La légende populaire racontait qu’un alchimiste, chargé de transmettre un message à l’amant d’une reine, l’avait envoyé à son mari, le roi, suite à un mauvais calcul, provoquant son renvoi immédiat et la chute d’une dynastie. Abandonnés par les alchimistes, les érables s’étaient néanmoins reproduits et, cinq ans auparavant, ils s’étaient remis à chanter des informations. Nul ne savait si les arbres sifflaient les messages de leur propre volonté ou si quelqu’un les manœuvrait dans l’ombre. En tout cas, les informations qu’ils propageaient étaient souvent sulfureuses. »
Le Serment des Traqueurs, Laëtitia Lajoinie.

« Ces petites filles me croyaient capable de tout. Elles me croyaient capable d’aller sur la Lune. Et grâce à ça, elles se croyaient capables d’y aller elles aussi. Voilà pourquoi je devais continuer. À leur âge, j’aurais eu besoin de quelqu’un comme moi. D’une femme comme moi. »
Vers les étoiles, Mary Robinette Kowal.

« Qu’il n’y a pas de chaînes à nos pieds ou de coup de fouet sur notre dos parce que ce n’est pas nécessaire. Car si tu ne fais pas les quatre volontés de la Compagnie, tu meurs. Tu meurs parce que tu ne peux pas payer les médecins pour te soigner. Tu meurs parce que la police ne viendra pas si tu n’es pas assuré. Parce que les pompiers ne couvrent pas ton quartier, parce que tu ne peux pas décrocher un travail, parce que tu ne peux pas payer ta nourriture, parce que l’eau a été coupée, parce qu’il n’y a pas de lumière la nuit et si ça ce n’est pas de l’esclavage, si ça ce n’est pas le monde qui est devenu fou si ça ce n’est pas… »
84K, Claire North.

« Tout ce qui est perdu n’est pas voué à être retrouvé… […] Mais tout ce qui disparaît n’est pas forcément perdu. »
Sirem et l’oiseau maudit, Yasmine Djebel.

« Le bûcher s’éteint peu à peu. L’Église pense pouvoir mettre ainsi un terme à la Réforme. Elle ne réalise pas que les flammes ne brûlent pas les hérésies, mais seulement les liens qui retiennent la colère de ceux qu’elle cherche à opprimer. »
Du roi je serai l’assassin, Jean-Laurent Del Socorro.

[2022] Petit bilan d’octobre

Fin octobre, je suis allée au salon littéraire jeunesse Frissons à Bordères, un petit salon qui existe depuis 23 ans au fin fond des Pyrénées-Atlantiques. J’y ai rencontré des auteurs jeunesses fort chouettes et… j’avoue que j’ai bien fait monter la PAL !

Carnet de lectures :

Pendant Frissons à Bordères, j’ai fait le plein d’albums de Claire Garralon – j’avais des cadeaux à faire ! J’en ai profité pour en lire deux que je n’avais pas encore lu, j’ai nommé Chat ! et Le nouveau canard.

Chat !, Claire Garralon (éditions Talents Hauts – Badaboum).
Alors qu’un chat se repose sur le canapé, un petit enfant tente de l’attraper, de le caresser et de lui tirer les poils. Mais le chat n’est pas un jouet et l’enfant comprend que la plus belle des preuves d’amour, c’est le respect.
Eh oui, un album sur le respect et le consentement pour les 0-3 ans, c’est possible ! Les illustrations, à hauteur d’enfant, montrent comment celui-ci s’approche de plus en plus du chat, avant de finir par respecter son espace vital. Le texte, de son côté, par des phrases simples et efficaces, montre parfaitement que nos envies ne sont pas prioritaires sur celles des autres êtres vivants !


Le nouveau canard, Claire Garralon (éditions MeMo).
Il y a un nouveau canard dans la mare… mais il est bizarre. Est-ce vraiment un canard ?!
J’adore les canards de Claire Garralon (si vous ne connaissez pas, je vous recommande chaudement La Promenade des canards, un album hyper graphique !). Cette fois, son canard au look habituel croise des canards de pêche-aux-canards. Qui se posent bien des questions sur ce nouveau canard si différent. Comme toujours, le texte permet d’aborder plein de sujets, ici l’apparence, la différence et les préjugés. La fin fait un gros clin d’œil à l’album C’est ma mare ! mais si vous ne l’avez pas lu (ce qui était mon cas), ce n’est pas gênant, car cela peut ouvrir à pas mal de discussions. Les illustrations sont comme toujours très graphiques et très colorées, ça donne envie de fabriquer des petits canards à la maison !

Changement d’ambiance cette fois avec deux récits qui ont pour cadre les Pyrénées et qui sont plutôt destinés aux préados et plus !

Belle & Sébastien, nouvelle génération : le roman du film, Christine Féret-Fleury, Pierre Coré et Cécile Aubry.
Sébastien, dix ans, devait passer ses vacances d’été en Corse, avec son meilleur ami Dimitri et les parents de celui-ci. Suite à une grosse bêtise, il est puni et sa mère l’expédie dans les Pyrénées, chez Corinne, sa grand-mère maternelle qu’il connaît à peine. Les relations de celle-ci et de sa fille étant compliquées, Corinne est assez peu ravie de le voir débarquer, d’autant qu’elle se prépare pour la transhumance. Alors qu’il s’ennuie ferme, Sébastien fait une rencontre qui va changer sa vie : celle de Belle, une chienne des Pyrénées maltraitée par son maître, qu’il va libérer sans se préoccuper des conséquences.
J’adore la série Belle & Sébastien. J’ai été biberonnée aux romans dans mon enfance et à la série en noir et blanc. J’étais donc assez curieuse de cette nouvelle sortie (d’autant que, fun fact, la scène chez le notaire dans le film a été tournée dans une des bibliothèques du réseau de médiathèques où je travaillais ! Celle d’Aureilhan, pour les curieux, qui vaut le détour ne serait-ce que pour son look architectural). Ayant raté le film au ciné, je me suis rabattue sur la novellisation.
Le récit reprend les grandes lignes de l’histoire originale : un garçon, une chienne, les Pyrénées en toile de fond d’une amitié indéfectible. Et c’est à peu près tout ! Exit les Angelina, docteur Guillaume et autres César (même si celui-ci est brièvement cité). D’ailleurs, Sébastien n’est même plus orphelin ! (Mais sa nouvelle maman de papier s’appelle Cécile, j’avoue que ça m’a fait rire !) Bref : place au neuf.
Cette nouveauté se ressent aussi dans les enjeux de l’intrigue : si Sébastien est calé chez sa grand-mère, c’est parce que sa mère a un déplacement professionnel. L’ado glandouille sur Instagram (c’est d’ailleurs comme ça que Belle, qu’il a volée, sera retrouvée par son propriétaire), et le récit s’appuie aussi sur des thèmes d’actualité, notamment autour de la montagne. Il est donc question de la farouche opposition bergers/loups, de la pression touristique, du changement climatique, et de la survivance (ou pas) des modes de vie traditionnels (notamment de la transhumance). C’est à peine creusé, car le sujet est vraiment l’amitié de Sébastien et de sa chienne, mais ça fait une toile de fond sympa. Côté texte, c’est très fluide, très facile à lire, et idéalement agrémenté d’un cahier photos des grandes scènes du film au milieu (ne commencez pas par ça, car il y a des spoilers !).
Une chouette lecture donc, pour le petit côté Madeleine de Proust, même si je ne suis pas sûre de m’en rappeler dans dix ans ! (alors que Le refuge du grand Baou, que j’ai pourtant lu assez jeune, semble gravé dans ma mémoire !).

Polar vert, saison 2, épisode 1 : La Malédiction de l’ours, Thierry Colombié (éditions Milan).
Klervi a une adolescence mouvementée : impliquée dans un trafic de civelles en Bretagne, elle a accepté d’aider la gendarmerie à coffrer les têtes pensantes du réseau, espérant ainsi alléger sa peine. En attendant son procès, elle vit dans un camping dans les Pyrénées, sous la protection de Marceau, l’un des deux gendarmes qui chapeautaient son travail d’espionne. Elle s’y fait appeler Claire et, conformément à ce que lui a conseillé le juge, elle réalise un service volontaire dans une association de défense de l’environnement. L’ambiance au village n’est pas des plus sereines, un combat acharné entre les pro-ours et les anti-ours sévissant. En effet, la réintégration de l’ours n’est pas du goût de tout le monde, notamment des éleveurs, des chasseurs, mais aussi des trafiquants qui voient ainsi la forêt leur échapper. Or la situation dérape lorsqu’une ourse est tuée de façon barbare et son petit kidnappé…
Vous reprendrez bien un peu de Pyrénées ? Alors avant toutes choses, je dois dire que je n’ai pas lu la saison 1 de Polar vert… et ce n’est pas grave, car les événements qui s’y déroulent sont suffisamment rappelés en début de roman (c’est conçu pour être lu indépendamment de toute façon). Le récit commence assez fort, avec une rando dans les hauteurs qui tourne assez mal, Klervi et ses camarades assistant en direct au meurtre de l’ourse et au kidnapping de l’ourson. J’ai trouvé le récit bizarrement équilibré : d’un côté, l’enchaînement des péripéties, le style lapidaire donnent l’impression que tout va assez vite. De l’autre, les atermoiements des personnages entraînent des répétitions et donc, des longueurs.
Malgré ça, j’ai trouvé l’intrigue intéressante, notamment parce qu’elle met bien en scène les enjeux qui secouent les Pyrénées et notamment la Bigorre : réintroduction de l’ours avec force manifs des deux camps, cette rivalité entre les « écolos » et les « locaux » (comme s’ils ne pouvaient pas être les mêmes), les problèmes induits par le tourisme ou la proximité avec la frontière (tentante pour les trafiquants de tous bords), mais aussi les projets industriels qui secouent régulièrement les montagnes. (J’ai assumé que ça se passait en Bigorre à cause de la mention du projet de méga-scierie – sans doute celle de Lannemezan – et de la mention des grands-parents du président qui sont « de la vallée d’à côté ».)
J’ai été très déstabilisée par la fin : en fait le récit s’arrête en plein dialogue ! C’est vraiment conçu comme deux épisodes de série, avec la coup bâtarde pour créer un cliffhanger. Du coup, effet réussi, j’ai hyper envie de lire la suite (le récit m’a bien accrochée quand même), mais un peu déçue de cette coupe franche et nette en plein milieu du dialogue !

Toujours pour les préados, mais cette fois au rayon fantastique-horreur, j’ai lu Peur sur le lac, de Katherine Arden, le troisième tome de sa série Small Spaces (éditions Pocket jeunesse, collection PKJ). C’est un roman qui allait dans ma PAL boulot, donc il se trouve que je n’ai pas lu les deux premiers. Ce n’était pas hyper gênant, mais dans la mesure où les enfants essaient de résoudre, en toile de fond, un problème depuis le tome 1, je pense qu’il vaudra mieux pour le lectorat cible de les lire vraiment dans l’ordre.
Ollie, Brian et Coco, alors qu’ils faisaient du bateau sur un lac en famille, se retrouvent piégés sur une île mystérieuse et non répertoriée, gardés par un monstre marin particulièrement féroce. Le récit horrifique fonctionne très bien, avec moult scènes d’attaques, de nuit angoissantes, de bruits bizarres dans la forêt et de fantômes pas très nets. L’intrigue fait monter doucement mais sûrement la tension et j’ai trouvé les personnages très attachants. Suffisamment pour me donner envie de lire le début, comme la suite ! En tout cas je me la note pour la conseiller, parce que le récits fantastiques ne sont pas légion en littérature jeunesse ! (en littérature vieillesse non plus, du reste).


Rayon bulles

Paul & Pauline, H. Tonton (Kennes)
Mai 1944. Paul, un vieil homme que ses jambes ne peuvent plus porter, et Pauline, une jeune fille abandonnée en quête de ses parents exilés, tentent ensemble de s’extirper de la sauvagerie qui oppose les forces allemandes aux troupes maquisardes. De la profonde Corrèze aux plages sétoises, leur périple va bouleverser leur vie, créer des liens singuliers et les contraindre à affronter leurs démons.
Hop, une BD achetée pendant Frissons à Bordères et magnifiquement dédicacée par son auteur, à l’aquarelle ❤
J’ai lu cette BD d’une traite, plongée que j’étais dans les graphismes, qui m’ont un peu rappelé Gibrat (dont j’ai poncé l’œuvre grâce à la médiathèque municipale quand j’étais au lycée). L’histoire nous plonge donc en pleine deuxième guerre mondiale, dans un village ravagé par une colonne allemande. Pauline est la seule rescapée, car elle a pu se cacher. Elle décide d’aller retrouver ses parents exilés, accompagnée de Paul, un vieil homme ronchon cloué dans un fauteuil. La relation entre les deux est assez touchante ! Le récit repose sur un gros retournement de situation que je me suis bêtement divulgâché en regardant bien les petits détails des illustrations… Ceci dit, la révélation fonctionne tout de même ! J’ai apprécié ma lecture dans l’ensemble, mais j’ai été un peu déçue de découvrir à la dernière page… qu’il s’agissait du tome 1. Du coup, cette impression de récit un peu facile s’explique par le fait qu’on n’en a là qu’une seule partie, un détail que j’aurais aimé connaître dès le départ et qui m’aurait permis de profiter à fond de ma lecture (merci les maisons d’édition d’y penser ! C’est particulièrement pénible !). Du coup, j’attends la suite de pied ferme, car malgré cette légère contrariété, j’ai apprécié ma lecture !

Côté séries :

La rentrée aura été l’occasion de se pencher sur la série de SF Snowpiercer, de Josh Friedman et Graeme Manson.
Sept ans après que le monde soit devenu inhospitalier, en raison d’une glaciation artificielle et durable, les survivants ont trouvé refuge à bord d’un immense train – 1001 wagons – qui sillonne perpétuellement la Terre à toute vitesse, à raison de 2.7 révolutions par année. La discipline rigoureuse de M. Wilford, le richissime homme d’affaires qui a affrété le train, est appliquée par le service de l’Hospitalité, représenté par Ruth et Melanie Cavill, qui est également l’ingénieure en chef. A bord, la vie est très règlementée, et les passagers des différentes classes ne sont pas autorisés à se mêler (du moins, ceux des basses classes ne peuvent espérer monter). Tout au bout du train sont entassés 400 « sans-tickets », des gens qui ont pris d’assaut la Queue du train le jour du départ, et qui sont utilisés pour les plus basses besognes. Quand un corps est retrouvé émasculé en 3e classe, M. Wilford envoie Melanie extraire un ancien policier, Andre Layton, de la Queue. Or, celui-ci est également le leader révolutionnaire de la Queue, qui s’apprêtait justement à se soulever. Alors que l’enquête débute, la tension entre les classes et les wagons est à son comble…
J’ai un avis mitigé sur cette série car, d’une part, j’ai adoré et, d’autre part, il y a quand même des points qui m’ont laissée sur ma faim. Avant toutes choses, je dois préciser que j’ai souvent fermé les yeux, car il y a des passages hyper violents (voire un peu gores), et ce n’est clairement pas ma tasse de thé.
L’ambiance polaire est bien mise en scène, de même que le régime totalitaire qui règne à bord du train. Les tensions inter-classes, de fait, sont bien rendues et j’ai aimé suivre plusieurs sous-intrigues à la fois, celles-ci mêlant petites histoires du quotidien et gros complots des familles.
Mais il y a quand même des petits trucs qui l’ont moins fait. J’ai beaucoup aimé les deux premières saisons, mais j’ai trouvé la troisième complètement bancale : il ne s’y passe positivement rien et d’un coup il se passe plein de trucs, de préférence tous en même temps, si bien que les revirements des uns et des autres n’ont aucun sens. Par ailleurs, certains personnages sortent du tableau sans qu’on sache pourquoi pour y revenir comme des fleurs plus tard… et je n’ai pas trouvé ça crédible. Miles, par exemple, le fils adoptif des deux leaders révolutionnaires, envoyé à l’école des ingénieurs (donc chez l’ennemi) et dont on entend plus du tout parler ?! Pas réaliste ! Au chapitre du réalisme, il m’a manqué aussi des données sur l’univers : pourquoi et comment y a-t-il des rails sur des étendues océaniques ? (oui parce qu’ils passent comme qui rigole d’un continent à l’autre). Qui les a installés et quand ? Les enchaînements dans les wagons du train ne sont parfois pas logiques, j’ai eu l’impression que les voitures changeaient de place dans l’ordre qu’elles occupe. Et puis comment les voies sont-elles aussi bien maintenues en état ? Bref, des petits points, mais ça m’a manqué pour profiter pleinement de l’expérience. Et ça ne m’empêchera aucunement de regarder la saison 4 lorsque celle-ci sortira ! Et d’enfin lire la BD !

Top/Flop


Pas de flop ce mois-ci, car il est difficile de choisir entre les lectures un peu plus mitigées. Le top, quant à lui, est une très bonne lecture !

Ce mois-ci, j’ai donc enfin découvert Jo Walton, en lisant Ou ce que vous voudrez. J’ai eu un peu de mal à rentrer dedans mais ensuite, quel plaisir de lecture ! Le récit alterne entre un vrai récit de fantasy et des monologues intérieures de la protagoniste, Sylvia, une autrice reconnue de SFFF, qui discute avec un personnage indéfinissable, à mi-chemin entre ami imaginaire et muse artistique. Le roman propose une intéressante réflexion sur l’art et la création, et mêle habilement les deux fils du récit, celui qui se passe de nos jours dans la réalité et celui qu’écrit Sylvia. C’était une très chouette découverte, même si je ne conseillerais pas forcément ce titre pour entrer dans l’œuvre de Jo Walton !

Citations

« Je me suis rendu compte que je n’avais jamais pensé à ma chance d’être né libre. »
La Longue marche des dindes, Kathleen Karr & Léonie Bischoff.

« Il faut qu’on trouve une solution rapidement. Il ne faut pas qu’Ollie et ma mère partent à notre recherche.
— Exact, acquiesça Brian. Hmm, il a peur du feu, selon vous ?
— Pourquoi ? demanda Phil.
— Si c’est le cas, alors Ollie et les adultes ne risquent rien sur la rive tant que leur feu ne s’éteint pas. Peut-être qu’on pourrait embraser des pommes de pin et lâcher quelques-uns de ces hameçons aussi ? suggéra Brian, pris d’une inspiration soudaine. Ça pourrait peut-être l’effrayer et nous donner une chance de nous enfuir ?
— Des pommes de pin ? répéta Phil. Ce truc est gros comme un bateau !
— Et si on arrivait à les lui lâcher dans le gosier ?
— Il n’ouvre la bouche que quand il est en colère ou qu’il compte dévorer quelque chose…, commenta Coco. Vous n’y pensez pas. (Elle regarda les garçons.) D’accord. Vous y pensez. Vous voulez mettre le serpent en colère. »
Peur sur le lac, Katherine Arden.

Elle s’empare avec morosité d’une des notes de Bella et y voit le croquis d’une femme crachant du feu par la bouche.
« C’est un sort d’embrasement ?
— On dirait, oui.
— Je peux l’essayer ?
— Est-ce que tu peux allumer un feu magique dans une tour remplie de papier et de cuir ?
Genièvre réfléchit un instant. « Même si c’est un tout petit feu ? »
Le Temps des sorcières, Alix E. Harrow.

« Enfin, en passant devant le garage, ils entendent de la musique. A fond ! Sébastien pousse la porte. Une déferlante de sons le fige sur place.
— Les Clash, commente Cécile derrière lui. Du punck rock. Ta grand-mère adore ça.
Au fond, une gerbe d’étincelles nimbe d’une lueur bleue une silhouette en combinaison de travail, penchée sur une vieille moto.
— Salut, risque Seb.
Pas de réponse. Il force sa voix et hurle :
— SALUT !
Corinne, sa grand-mère – car c’est bien elle -, sursaute et se retourne, surprise, en ôtant ses lunettes de soudeur. Les yeux écarquillés, elle fixe le garçon qui se tient devant elle.
— Qu’est-ce que tu fous là, toi ?
— Bonne question, répond Seb, stupéfait. »
Belle & Sébastien, nouvelle génération : le roman du film, Christine Féret-Fleury, Cécile Aubry et Pierre Coré.

« TU CROIS VRAIMENT QU’ON A BESOIN DE ça EN CE MOMENT ?
Je comprenais ce qu’elle voulait dire. En même temps, on pouvait aussi en discuter calmement. Pas la peine de s’énerver. Je ne me sentais même pas ivre. Juste léger et bienheureux. Était-ce un mal étant donné les circonstances ? Je ne croyais pas, non. Je ne savais pas trop comment engager la conversation sur un mode plus serein. Il valait mieux attendre qu’elle se calme.
— BIZARRE ! vociférait ma mère. GOTHIQUE ! DIABÉTIQUE ! ET MAINTENANT ALCOOLIQUE ! UN SACRÉ BOULET, HEIN !
Heureusement qu’elle ne m’avait pas vu fumer.
— Je sais, je sais, ai-je bafouillé sur un ton que je voulais conciliant. Je sais que l’alcool c’est pas bien. Mais d’abord, je ne suis pas saoul, et ensuite je me sens bien. C’est sûr que les alcooliques ont tort. Ils boivent trop. Il faudrait peut-être leur dire d’envisager l’alcool pas comme un loisir, tu sais, avec les bars, la musique, la fête, tout ça, mais comme… (j’ai réfléchi afin de bien préciser ma pensée), mais comme un médicament (j’étais fier de ma trouvaille) ! Parce que ça détend vachement quand même. Je me sens bien. Si bien si tu savais. Par exemple tu gueules et ça me fait rien. Je ne suis pas stressé ou tendu, rien. Toi aussi tu devrais boire quelque chose. ça te détendrait.
J’étais bavard, bavard, bavard. Je ne pouvais pas m’arrêter de parler. Ma mère fulminait. »
Grand Passage, Stéphanie Leclerc.

[2022] Petit bilan estival.

Ne serait-il pas temps, après une trop longue interruption – un an me souffle-t-on dans l’oreillette -, de reprendre les petits bilans du mois ?
Pardon d’avance pour la longueur de cet article, sans doute pas très digeste, mais qui sera bien utile à ma mémoire défaillante dans quelques mois/années, quand je me demanderai ce que j’ai pensé de tel ou tel titre non chroniqué in extenso !

Carnet de lectures

J’ai beaucoup lu cet été, grâce à des congés forcés (pas merci les services RH) et malgré pas mal de travaux (je me suis découvert un engouement particulier pour la démolition de murs).

Terre promise, de Philippe Arnaud (Sarbacane).
J’aime bien lire, de temps en temps, des western, mais je dois dire que celui-ci a souffert des comparaisons avec Celle qui venait des plaines et Sans foi ni loi. Déjà parce que j’ai trouvé la structure assez maladroite, en raison d’allers-retours pas toujours justifiés entre passé et présent (qui m’a laissé un goût d’artificialité pas très agréable). Par ailleurs, j’attendais beaucoup (peut-être trop ?) du personnage de la femme shériff, et j’ai été un peu déçue, car je l’ai trouvée légèrement caricaturale (la femme badass et libérée). A ce titre, j’ai trouvé qu’il y avait peut-être un poil trop de scènes de sexe pour que l’ensemble fonctionne à merveille !
Malgré cela, le propos était intéressant : on suit un personnage sudiste jusqu’à la moelle, qui va se retrouver confronté à des Noirs libres, et à des femmes de tête. Shocking ! Les pensées – racistes et sexistes – du protagonistes sont assez pénibles à lire, mais font partie de son évolution. Soyez justes prévenus ! Je pense que j’ai placé trop d’attentes sur ce titre, ce qui ne m’a pas permis de l’apprécier pleinement.

Le Livre de Phénix, de Nnedi Okorafor (Actusf).
Je n’ai toujours pas lu Qui a peur de la mort ? mais j’ai lu d’autres titres de l’autrice, qui m’ont beaucoup plu. Donc je me suis lancée dans cette préquelle du titre précédemment cité, qui nous emmène dans un univers post-apocalyptique assez effarant, et sur les traces d’une femme qui est aussi un organisme génétiquement modifié, créé dans le but de devenir une arme de destruction massive. Autant j’ai apprécié le mélange entre SF et fantasy, les réflexions politiques et philosophiques, l’ambiance qui confine à la poésie, au mythe et au désespoir le plus profond, autant j’ai eu parfois du mal à suivre l’intrigue, dont les circonvolutions m’ont semblé quelque peu confuses et dures à suivre. Découverte mitigée donc, mais qui ne m’empêchera pas de lire la suite de ses œuvres, parce que j’avais adoré le reste.

La Maison des feuilles, Mark. Z. Danielewski (Monsieur Toussaint Louverture).
Oui, ça y est, j’ai enfin lu (et surtout TERMINÉ) La Maison des feuilles, qui est clairement une lecture de l’été, puisque je l’ai attaqué fin août et terminé… début octobre. Là aussi, sentiment mitigé : j’ai été bluffée par la construction littéraire, les récits enchâssés, les narrateurs non fiables qui se suivent (et ne se ressemblent pas) et les expérimentations littéraires diverses et variées. Mais je dois aussi avouer que je me suis rapidement lassée des digressions du narrateur principal (Hoss, que je considère comme le principal) et ses innombrables histoires de sexe que j’ai eu follement envie de passer (mais je ne l’ai pas fait, puisque le diable étant dans les détails, il faut lire les multiples notes de bas de page de ce titre).
Je ne pense pas faire de chronique détaillée (mais qui sait ?), donc je le pose là. A lire si vous voulez jeter un œil à cette performance littéraire, donc, je pense que ça vaut le détour pour ça, mais à éviter si vous n’aimez ni les escape game, ni les romans à tiroir, parce qu’on est dans une espèce de mélange étrange entre les deux.

Coin bulles

J’ai dévoré totalement par hasard The Sound of my soul de Rin Saitô (Akata), un manga qui parle de musique, d’amitié et de handicap. On y suit Mizuki, 11 ans, atteint d’hypoplasie cérébrale (qui provoque une paralysie partielle). Son rêve : devenir violoniste professionnel et toucher de sa musique son meilleur ami sourd et très bon danseur. Pour ce faire, il quitte son école spécialisée et rejoint un collège ordinaire… où il se retrouve en butte au validisme et à l’hostilité de son nouvel entourage (enfants comme adultes). Le choc des cultures est violent entre la première partie pleine d’amour, d’amitié et de bienveillance et la seconde, affreusement violente, dès que l’on entre au collège.
L’originalité de ce manga, c’est que, d’une part, Rin Saitô romance la vie du véritable Mizuki Shikimachi et que, d’autre part, le manga romancé occupe les deux-tiers du volume environ, le dernier tiers étant occupé, lui, par un manga plutôt documentaire, dans lequel la mangaka a retracé les premières années de la vie du jeune garçon – un récit qui met donc en avant la force de sa mère, qui lui a donné goût à la musique et s’est battue pour améliorer son bien-être. Un titre très touchant, et qui m’a donné envie de lire la suite !

Côté ciné

Incroyable, mais vrai, je suis allée trois fois au cinéma cet été. (Je dis incroyable car la moindre sortie ciné implique une heure de route, donc vous comprendrez que tout cela ne se fait pas au débotté).

Mille ans après tout le monde (au bas mot), j’ai vu Top Gun : Maverick, un film truffé d’avions de chasse, d’adrénaline et de testostérone (même si le récit tente d’insérer un peu plus de femmes dans des rôles allant au-delà de la pin-up et de la plante verte, et c’est pas mal).
J’ai passé un très bon moment avec ce film, même si le scénario n’est pas démentiel. En même temps, ce n’est pas pour ça qu’on va le voir, mais pour s’en mettre plein les yeux dans les scènes aériennes (lesquelles sont très réussies). Le film m’a même donné envie de voir Top Gun premier du nom, c’est dire !

Ensuite, je suis allée voir As Bestas, un film franco-espagnol de Rodrigo Sorogoyen. On y découvre la vie de deux agriculteurs français partis ouvrir une petite exploitation bio dans une vallée paumée de Galice, ce qui va crisper le village et cristalliser l’hostilité (le tout autour d’une sombre histoire d’éolienne à installer). Alors, déjà, sachez qu’on est dans du roman noir, mais au cinéma (je ne sais pas comment se nomme ce style). L’ambiance est lourde, poisseuse, la tension monte crescendo jusqu’à la rupture. J’ai mis un long moment à comprendre la scène d’intro (où l’on voit deux hommes dompter un cheval sauvage), qui n’a rien à voir avec la suite, mais j’avoue que la construction est particulièrement bien faite (car oui, cette scène a évidemment un rapport avec la suite). J’ai beaucoup aimé la fin, j’en suis sortie en me disant « mais alors, du coup … ? » et j’aime sortir d’un film en me posant des questions sur la suite, ce qu’on ne voit pas. Avec ça, la photographie est sublime, et c’était assez plaisant de voir ce film en VO, puisqu’il est tourné en castillan, en galicien et en français (de toute façon, je vous déconseille vivement d’aller le voir en VF si d’aventure il est dispo en VF, car vous perdriez tout le sel et les enjeux du film). Bref : excellente découverte !

Et, last but not least, je l’ai attendu avec impatience, il a fini par arriver, je suis allée voir avec un immense plaisir Le Visiteur du Futur : le film !, de François Descraques, et qui est la non-suite de la web-série éponyme, que je vous recommande très chaudement si vous ne l’avez pas encore vue !
L’histoire se déroule en 2555, dans un futur dévasté : l’Apocalypse menace la Terre et le dernier espoir repose sur Renard, un homme capable de voyager dans le temps. Sa mission : retourner dans le passé et changer les événements, en échappant à la Brigade Temporelle, qui le traque à travers toutes les époques.
Si vous n’avez pas vu la série, ce n’est pas un drame, car le film est visible indépendamment (si vous l’avez vue, vous apprécierez à sa juste valeur les petits clins d’œil de fan-service qui parsèment le récit).
C’est rare au ciné, mais il faut le dire : voilà un très bon film de SF made in France ! L’univers post-apo est bien mis en scène, les effets spéciaux sont très réussis (mais pas envahissants) et le fait d’avoir introduit deux personnages tout neufs rendent les explications assez naturelles. Le message n’est pas moralisateur (et non, ce n’est pas un film anti-nucléaire comme cela a été dit, c’est un film anti-obsolescence programmée plutôt), et malgré l’ambiance un brin tendue (fin du monde, tout ça), il y a des touches d’humour et quelques scènes comiques parfaitement intégrées. Bref, c’était un vrai plaisir, et j’espère qu’une suite sortira !

Tops/Flops

L’été aura été marqué par deux titres de fantasy qui ne m’ont pas passionnée :

Concernant Arkana, de Sébastien R. Cosset : j’ai trouvé l’univers intéressant, le choix narratif qui sert de rebondissement central très audacieux, mais le personnage archi-cliché a clairement eu raison de ma patience !

Dans le même style, Une couronne d’os et d’épines d’Emily Norsken, que j’ai dû lire dans le cadre du PLIB, m’a plu pour son univers, et passablement agacée pour le reste, qu’il s’agisse de l’intrigue qui ne m’a pas embarquée, des incohérences dans le récit, ou des multiples coquilles.

A côté de ça, j’ai eu trois coups de cœur – la vie étant bien faite, un par mois.

Tout d’abord La sorcière secrète, le deuxième tome de la série Le Garçon sorcière de Molly Knox Ostertag : c’est beau, l’histoire est prenante, et ce n’est pas parce qu’on est dans le tome 2 qu’il ne s’y passe rien ! J’ai hâte de lire la suite (et fin, malheureusement).

Ensuite, au rayon polars, j’ai dévoré La Valse des tulipes, d’Ibon Martin, qui mêle secrets de famille, résurgences politiques et cadre enchanteur. Je suis très contente de savoir qu’en VO, il s’agit d’une série, parce que j’ai hâte de lire la suite !

Et pour finir, encore une série, j’ai nommé Les Voyageurs de Becky Chambers, un roman que je relirai sans aucun doute, et dont je suis curieuse de lire les autres opus (même si on change apparemment de personnages).

Citations

« Alors… c’est comment ? Aller à l’école, vivre en ville et tout ça ?
– C’est normal. Bon, j’imagine que pour toi, ça n’a rien de « normal ». Je monte dans un gros bus jaune avec un tas d’autres enfants pour me rendre dans un bâtiment en briques où on mange de la nourriture dégueu et où on apprend les maths.
– ça paraît pas trop mal…
– Tu sous-estimes à quel point la nourriture est mauvaise. »
La Sorcière secrète, Molly Knox Ostertag.

« Rolande eut un sourire en coin qui était quasiment un abrégé de perfidie. »
La semeuse d’effroi, Eric Senabre.

« La mère d’Izzy utilisait les termes « naturel » et « végétal » pour tout ce qu’elle considérait comme bénéfique, tandis que « toxine » était pour elle synonyme de « néfaste ». A aucun moment elle ne nomma de toxine particulière, mais ma maison, ma nourriture et, apparemment, mon maquillage en étaient bourrés. […]
– Et voilà la partie que je préfère, souffla-t-elle en caressant du bout des doigts l’image travaillée. Les huiles essentielles.
Elle avait prononcé cette dernière phrase sur le ton qu’un dragon aurait employé pour dire « doublon espagnol ».
L’étreinte des flammes, Patricia Briggs.

« La barge avait emprunté une route sinueuse qui montait vers le sommet d’une falaise. Assez large pour le véhicule, mais tout juste. Ashby risqua un regard par-dessus bord et le regretta aussitôt. Comme beaucoup de spatiaux purs et durs, une fois au sol, il avait le vertige. Contempler une planète de haut d’une orbite, ce n’était pas un problème : tomber, c’était flotter. A l’intérieur d’un vaisseau, si on tombait – disons dans le conduit moteur d’un gros colonisateur -, on avait le temps de crier « Chute ! ». Ce qui préviendrait l’IA locale de désactiver le filet antigrav concerné. La descente s’arrêtait net, et on dérivait tranquillement jusqu’à un point d’accroche. On encourait la grogne des camarades occupés à boire du mik ou à bricoler sur des petites pièces, mais rester en vie valait bien ce prix. Ce cri était également très apprécié par les gamins, pour qui l’inversion soudaine de la gravité sur une passerelle bondée ou dans une salle de classe était le comble de l’humour. Mais, en surface, pas de filet antigrav. Tombez de trois ou quatre mètres seulement et vous risquez la mort. Ashby, pour apprécier la gravité, voulait pouvoir l’éteindre. »
L’espace d’un an, Becky Chambers.

« J’aime les livres. J’adore tout ce qui s’y rapporte. Je chéris la sensations des pages au bout de mes doigts. Ils sont assez légers pour être transportés, et pourtant lourds de mondes et d’idées. J’aime le bruit des pages tournées contre la pulpe de mes doigts. Empreintes imprimées contre empreintes digitales. Les livres réduisent leurs lecteurs au silence, et pourtant leur message résonne si fort. »
Le Livre de Phénix, Nnedi Okorafor.

« Pourquoi un élan ? demande Anna.
Elle avait vu quelques élans depuis qu’elle avait emménagé dans le Montana. Même les loups-garous se méfiaient d’eux.
– Il faudrait que tu sois un garçon de dix-huit ans qui cherche à impressionner une fille pour comprendre, dit Charles.
Max rit.
– De seize ans, ça marche aussi, déclara-t-il. »
Entre Chien et Loup, Patricia Briggs.

[2021] Petit bilan d’octobre

Octobre aura été un petit mois de lecture : seulement 4 romans, quelques albums jeunesse et une bande-dessinée. Pas la meilleure pioche de l’année !

Carnet de lectures

Rayon bulles

J’ai lu, en fin de mois, le tome 1 de l’adaptation en BD de Dune, faite par Brian Herbert et Kevin J. Anderson (le duo d’auteurs qui a repris la série suite au décès de Frank Herbert), illustrée par Raúl Allén et Patricia Martín (éditée par Huginn & Munnin).
Je n’ai toujours pas lu le roman (ça va venir), mais j’avais envie, après être allée au cinéma, de continuer ma découverte de cette œuvre.
Assez bizarrement, je me suis sentie plus démunie face à la BD que face au film. En fait, heureusement que j’ai découvert la BD en second, car le visionnage du film m’a apporté pas mal de clefs de compréhension pour ma lecture ! La BD est sans doute une très bonne adaptation, mais j’ai l’impression qu’elle s’adresse plus à un public de connaisseurs qu’à des néophytes.
Les graphismes sont sympa, mais beaucoup plus froids et sévères que la très belle couverture (puisque les illustrateurs de l’intérieur n’ont pas réalisé la couv’, comme souvent en comics).

Rayon romans :

J’ai profité d’un week-end hyper ensoleillé pour engloutir Lullaby, de Cécile Guillot (édité au Chat noir). L’histoire se déroule aux États-Unis, dans les années 20. Hazel aime écrire des histoires horrifiques, rêve de devenir écrivaine et soupire après sa jolie voisine, Blanche. Rien qui soit du goût de ses parents qui, lorsqu’ils découvrent ses penchants et aspirations, la font tout simplement internet à Montrose Asylum. Là, Hazel rencontre la fougueuse Jo et la fragile Lulla qui, comme elle, entendent une mystérieuse berceuse s’élever la nuit, dans les couloirs déserts. Une berceuse qui les emmène dans un jardin abandonné, au milieu de la bâtisse…
Le récit, très court, nous plonge immédiatement dans un début de XXe siècle incroyablement puritain, qui ne laisse aucune chance à Hazel d’assouvir ses passions (aucune d’entre elles, d’ailleurs). Hazel narre ses déboires (puisqu’elle n’a plus le droit d’écrire), ce qui donne une vision directe de ce qui se déroule au sein de l’asile (et c’est effrayant). Si le style est hyper fluide, j’ai pourtant eu du mal à ressentir l’horreur et l’angoisse que devraient susciter l’asile et les horreurs qui s’y déroulent, sans doute parce que le récit est assez descriptif (et laisse donc peu de place aux suggestions). De même, le fait d’être directement dans la tête d’Hazel, qui analyse en permanence ce qu’elle traverse, ne m’a pas permis de ressentir ses doutes et ses angoisses, ce qui fait que j’ai eu du mal à m’impliquer dans le récit. Malgré cela, j’ai apprécié les nombreuses incises de poèmes de Renée Vivien, qui m’ont bien donné envie de lire son œuvre !

Côté ciné :

Eh bien on prend les mêmes et on recommence, ai-je envie de dire ! Je suis donc allée voir Dune, de Denis Villeneuve.
Normalement, j’aime bien avoir lu d’abord les romans adaptés au cinéma mais bon, vu que j’ai bien procrastiné sur cette lecture, j’ai fait l’inverse. Je n’allais pas manquer la possibilité de voir Dune sur grand écran ! (Parce que je trouve que les films de SF, ça s’apprécie mieux sur grand écran).
Et donc, que dire ? Eh bien j’ai adoré. A tel point qu’en sortant j’avais envie de retourner au ciné pour un second visionnage dans la foulée !
Déjà, j’ai trouvé que le film situait vraiment bien les enjeux de l’univers, les différentes factions en présence, et les trajectoires des personnages. Sans avoir lu le roman, j’ai quand même suivi, sans me sentir perdue et c’était hyper confortable. (En même temps, j’avais conscience des raccourcis, donc ça m’a donné encore plus envie de le lire).
La photographie est superbe. Les images du désert sont absolument incroyables et les décors, les costumes et les différentes prises de vue contribuent à créer une immersion parfaite. Avec ça, j’ai trouvé le jeu d’acteurs très convaincant. Du coup… je n’ai pas vu passer les 2h30 ! J’ai donc hâte (et espoir !!) de voir la partie 2 du film !

Tops/Flops

Ce mois-ci, je n’ai pas été hyper convaincue par Lullaby, cité ci-dessus ni par Time Salvager, de Wesley Chu, qui démarrait pourtant plutôt bien. On y suit un Chronman, un agent temporel, chargé (dans la Terre post-apocalyptique) d’aller piller le passé afin de récupérer des ressources énergétiques vitales pour la population de son époque. Le postulat est intéressant, mais les personnages ne sont pas assez creusés, ni les enjeux des voyages temporels : passée une très bonne première partie, le roman reste plutôt côté divertissement. Donc c’est très sympa… mais il m’a vraiment manqué quelque chose !

Côté très bonnes découvertes, en revanche, il y a eu le troisième tome du Cycle de Syffe, j’ai nommé Les Chiens et la Charrue de Patrick K. Dewdney (Au Diable Vauvert). J’étais ravie de retrouver Syffe (surtout après avoir enchaîné les deux premiers tomes). Comme dans les opus précédents, celui-ci est coupé en différentes parties, correspondant aux étapes du parcours de Syffe. Celui-ci passe encore une fois par un tas d’épreuves, qui rendent le récit particulièrement palpitant. L’aspect politique est encore plus prégnant ici que dans les tomes précédents, ce qui rajoute encore au suspense du récit. Bref : que du bonheur. J’attends la suite avec grande impatience !

Citations

« Travailler. Tu n’y penses pas. Pourquoi travailler alors qu’un mari peut subvenir à tous tes besoins ? »
Lullaby, Cécile Guillot.

« Le Chronocentre avait diligenté une étude quelques années plus tôt sur ce taux de suicide élevé parmi ses agents. Les chercheurs avaient émis l’hypothèse que l’excès de voyages temporels provoquait des lésions au cerveau. James aurait pu leur épargner cette perte de temps et d’énergie en leur expliquant la vrai raison du problème : c’était un boulot de merde. »
Time Salvager, Wesley Chu.

« J’ai le sentiment que toutes les époques avant la nôtre étaient meilleures. On ne fait que lécher les miettes de la civilisation. »
Time Salvager, Wesley Chu.

« Alex fait la grimace.
– Ne dis rien à maman, s’il te plaît !
– C’est une blague, j’espère ? rugit son interlocutrice. Tu te farcis l’air de rien un putain de dignitaire étranger – qui, au passage, est tout de même un homme – pendant le plus gros événement avant l’élection, dans un hôtel bourré à ras bord de journalistes, dans une ville truffée de caméras, alors que le scrutin est tellement serré que son résultat pourrait littéralement basculer à cause d’une connerie de ce genre, c’est juste la réalisation d’un de mes pires cauchemars, et tu me demandes en plus de mentir à la présidente ? »
My Dear Fuck*** Prince, Casey McQuinston.

[2021] Petit bilan estival.

Carnet de lectures :

La nuit des requins, Jean-Christophe Tixier (Rageot – Flash Fiction).
Je ne sais pas si vous connaissez la collection Flash Fiction, chez Rageot : elle est pensée pour une lecture confortable, pour les lecteurs avec un petit appétit de lecture ou des difficultés. Depuis cette année, des auteurs ados sont entrés au catalogue de cette collection. J’ai lu celui d’Olivier Gay (qui coche toutes les cases du page-turner mais m’a laissée un peu sur ma faim) et La nuit des requins de Jean-Christophe Tixier, donc, qui m’a nettement plus emballée.
Léo et sa famille fêtent l’anniversaire de Camille, la petite sœur, dans leur maison de famille, isolée sur une île. Mais alors qu’ils s’apprêtent à profiter du gâteau, deux braqueurs font irruption et exigent du beau-père de Léo 1 million d’euros. Si celui-ci ne s’exécute pas, ils emmèneront Camille. Léo n’a dès lors qu’une seule idée en tête : il doit s’enfuir, prévenir les secours, et sauver sa petite sœur.
Le récit est très resserré dans le temps, puisque la totalité de l’histoire se déroule entre le vendredi soir et le dimanche matin. Le suspense est donc hyper présent (dès le départ), tout comme le rythme, le personnage principal ne se laissant pas du tout abattre. L’ensemble est super bien mené, et se prêtera volontiers à une lecture à voix haute. J’ai beaucoup aimé la note douce et positive sur laquelle l’auteur conclut le récit !


Mon beau grimoire, Chrysostome Gourio (Casterman – Hanté).
On continue avec les romans pour préados ! Hanté est une petite collection de romans d’horreur/épouvante pour les plus jeunes lecteurs (à conseiller à ceux qui ne décollent pas de la collection Chair de Poule !).
Pénélope est la fille du gardien de cimetières. A cause de cela, elle est harcelée par les trois K, trois garçons de son collège, qui la traitent de sorcière. Un soir, elle rencontre une vieille femme… qui lui propose un grimoire octroyant de sombres pouvoirs. Pénélope accepte… et c’est la descente aux enfers !
Là aussi, le récit est assez court, mais hyper bien mené. L’horreur monte lentement, au fil de l’escalade de violence que connaissent les personnages. Ce que j’ai trouvé intéressant, c’est que le récit joue sur deux peurs bien différentes : la peur issue des pouvoirs que Pénélope pratique d’un côté, la peur de ce que vont faire les harceleurs, qui vont de plus en plus loin. Le récit mêle donc fantastique et thèmes très actuels, parmi lesquels le harcèlement scolaire, les relations familiales ou l’amitié. La fin, douce-amère, clôt à merveille ce roman d’épouvante jeunesse.

Le second souffle, Gilles Marchand et Jennifer Murzeau (Rageot).
Ulysse, 16 ans, vit avec d’autres sous la coupole protectrice du Centre, dont il n’est jamais sorti. Dehors règne la Bête. L’extérieur est hostile, empoisonné. Les enfants gravement asthmatiques, à la santé précaire, sont encadrés par des médecins. Ava, elle, habite Paris. Elle milite pour la planète avec sa meilleure amie Nour. Un jour, elle découvre un terrible secret. Le moment de l’impact est venu. Ava et Ulysse incarnent une histoire commune, celle du changement.
Une lecture en demi-teinte après les deux très bonnes découvertes citées ci-dessus. Le second souffle mêle deux arcs narratifs : l’un très contemporain, l’autre qui semble se situer dans l’anticipation. Le récit alterne de façon assez classiques les voix des deux personnages – dont j’ai d’abord pensé que l’un se situait dans le futur de l’autre. De fait, le suspense est assez présent et c’est vraiment cette interrogation qui m’a fait tenir, car le début du roman était assez lent, voire un peu répétitif. Le rythme s’accélère drastiquement dans la seconde partie, où l’on quitte les pistes de réflexion pour l’action un peu plus pure. L’ensemble est sympa mais pas particulièrement original dans l’ensemble : les dessous de l’affaire sont compris assez vite. Il en reste quelques pistes de réflexion sur l’environnement et l’écologie, mais pas amenées très subtilement, ce qui est un peu dommage vu l’importance du propos.

Coin bulles :

Petit Robot, Ben Hatke (Frimousse).
D’un côté, il y a une petite fille. Elle est bricoleuse et débrouillarde. De l’autre un petit robot tombé d’un camion… La rencontre a lieu et l’aventure commence. Il faut tout d’abord réparer ce petit robot qui visiblement est cassé. Mais heureusement la petite fille a de l’idée. Et les voilà bien vite à marcher tous les deux. Elle lui montre son univers. Mais à l’usine, les machines implacables donnent l’alerte. Il manque un robot…
J’adore Ben Hatke. Il fait partie de mes auteurs de comics chouchou (non pas que j’en ai des tonnes mais voilà). Après le coup de foudre pour Zita, la fille de l’espace, j’étais curieuse de lire ses autres titres, donc je n’ai pas attendu lorsque Petit Robot m’est tombé entre les mains. Comme dans Zita, on est là dans un comics avec très peu de texte, ce qui le rend très accessible aux plus jeunes lecteurs. Ben Hatke maîtrise à la perfection l’art du récit en images et sait garder le lecteur en haleine. L’intrigue mêle action et moments plus doux, dans un très bon équilibre, qui m’a fait tourner les pages à un rythme très confortable. Même avec peu de texte, il évoque tendrement l’amitié, la solidarité, et la quête de liberté. En plus de ça, c’est beau ! Les personnages sont nuancés, la palette de couleur est douce, bref, ce n’est que du bonheur. Voilà un comics à mettre aussi bien dans les mains des enfants que des adultes.

Le voyage d’Esteban, tome 1 : Le Baleinier, Mathieu Bonhomme (Milan).
Esteban a douze ans. Ce jeune Indien rêve d’océan, d’aventure. Il réussit à embarquer sur un baleinier, direction : le cap Horn ! Le cap Horn… Un des endroits les plus dangereux du globe. Mais aussi la route qu’empruntent les baleines pour aller d’un océan à l’autre. Douze ans… C’est peu lorsqu’on se retrouve face à ce monstre des mers…
J’ai lu cette BD totalement par hasard, cet été (parce que j’étais en vacances et que j’ai oublié ma lecture en cours dans l’habitation principale… je me suis rabattue sur une BD trouvée dans la chambre !), et je l’ai découverte avec plaisir ! On plonge dans un récit d’aventure historique vraiment bien troussé qui montre la (dure) vie à bord d’un baleinier, tout en creusant un peu la personnalité et l’histoire d’Esteban, le protagoniste (avec plein de mystères autour de la relation entre sa mère et le capitaine). Le décor est assez sombre, sujet oblige, mais le graphisme très lisible ! Cela m’a donné envie de lire la suite !

Côté ciné :

Évidemment, je n’ai pas échappé à LA sortie de l’été (et j’espère ne pas échapper à celle de l’automne ^^), j’ai nommé Kaamelott. Et ? Et carton plein ! J’ai adoré !
Je ne suis pas une fan hardcore de Kaamelott : je pense que j’ai dû voir les premières saisons à plusieurs reprises, mais j’ai appris par les amis avec qui j’étais au cinéma que la dernière était en fait une préquelle. C’est dire si j’ai raté des trucs. Même avec des bases aussi lacunaires, le film était aisé à suivre !
L’histoire est prenante et se tient bien. On retrouve bien sûr le modèle de la série donc si vous n’accrochez ni à l’univers, ni à l’humour, passez votre chemin. De mon côté, j’ai beaucoup ri, et cela m’a donné envie de tout revoir ! L’intrigue mêle deux temporalités : d’une côté, le présent (dix ans après la fin de la série, au moment où le dictateur Lancelot est sur le trône) et, de l’autre, le passé d’Arthur, lorsqu’il faisait ses classes à Rome. L’alternance maintient le suspense et assure au film un rythme confortable (je n’ai pas vu le temps passer). En somme, il ne me reste qu’à tout revoir avant que la suite ne paraisse !

Tops/Flops :

Je n’ai eu qu’une seule lecture franchement décevante cet été et j’étais d’autant plus déçue d’être déçue que ce roman s’annonçait bien !

L’histoire du Trône des Sept Îles d’Adalyn Grace avait pourtant tout pour me plaire : dans un royaume maritime, la princesse Amora rate la démonstration censée lui assurer le trône, ce qui l’oblige à fuir pour sauver sa vie (et sa couronne), en compagnie d’un pirate. L’univers est intéressant, mais les personnages comme les péripéties terriblement cliché. Je me suis ennuyée sec et ai terminé en diagonale tellement rien ne m’accrochait.

Bon, heureusement, j’ai eu d’autres bonnes lectures !

Mon été a d’abord été marqué par la relecture de L’Enfant de poussière et la lecture de La Peste et la Vigne, de Patrick K. Dewdney (et je suis actuellement dans le tome 3). Le début de ce cycle de dark fantasy (assez violent, soyez prévenus !) est extrêmement bien conçu, dense à souhait et palpitant en tout point. Avec ça, il est porté par une plume ciselée et volontiers envoûtante, qui sied au rythme posé de l’intrigue. C’est prévu en sept tomes et j’en suis ravie !

Comme les deux années précédentes, je me suis également (re)plongée dans l’univers ô combien adoré du Royaume de Pierre d’Angle, de Pascale Quiviger. Je m’étais promis de ne lire que le tome 3, pour me garder le 4e (et dernier) pour l’été prochain. Las, vu la fin du 3… je n’ai pas pu résister ! Si vous ne connaissez pas Pierre d’Angle, déjà, allez fissa chez un libraire vous trouver le tome 1. C’est un ordre ! Cette saga de fantasy mérite vraiment d’être plus connue ! L’autrice déroule une intrigue rudement bien ficelée, qui mêle noirceur et poésie, dans un univers enchanteur (de prime abord). C’est magnifiquement écrit. C’est terriblement prenant. Je me suis sentie orpheline en terminant la saga et dans cet été où l’on pense que ne lira plus JAMAIS un livre qui nous transportera autant. Alors si je ne devais faire qu’une recommandation cette année, ce serait celle-là !

Citations :

« L’âme humaine est comme sa chair à bien des égards, il me semble que dans les bonnes circonstances, on peut se remettre de tout. J’ignore s’il en va pareillement pour la mémoire des peuples, car celle des Arces était encore plus profondément contusionnée que la mienne. Le moindre de leurs enfants portait le poids d’une tragédie qu’il n’avait pourtant pas vécu lui même. »
La Peste et la Vigne, Patrick K. Dewdney.

« Et les ordres sont ? demanda-t-il.
– Pas de massacres, surtout, mais de la poigne. Evitez au maximum que vos gars ne jouent de la gâchette, mais arrêtez ces extraterrestres avant qu’ils ne se fassent connaître du grand public. La présidence désire garder l’info secrète.
– Comment voulez-vous que je les arrête ? En leur jouant une berceuse ?
Le commandant devint écarlate de colère. C’était bien la hiérarchie, ça. Ordre de ramer comme un malade, mais surtout ne pas faire de vagues ! »
Les Abîmes d’Autremer, Danielle Martinigol.

« Vous, la bonne, raisonnez-là!
– La raisonner? On dirait que vous avez pas encore compris à qui vous aviez affaire! Mon Hélène est amoureuse… Rien ne l’arrêtera.
– Tout ceci est ridicule! En vertu des lois naturelles, c’est à l’homme qu’incombe…
– On est sur Vénus… La planète des bonnes femmes… Ici, c’est pas vous qui faites la loi ! »
Les Chimères de Vénus, Alain Ayroles et Étienne Jung.

« Qu’est-ce que la connaissance ? C’est l’inspiration. C’est un appel aux armes. C’est un rappel qu’il n’est rien qui ne puisse être accompli. C’est l’humanité sous toutes ses formes. »
La soudaine apparition de Hope Arden, Claire North.

« Vous êtes horriblement silencieuse, Isobel ! Vous devez être vraiment épuisée. Comment ça fait ?
– Comment ça fait quoi ?
– D’être épuisée, bien sûr.
Même après avoir passé des années à fréquenter les faés, ils continuaient à me surprendre.
– Cela vous donne l’envie de vous asseoir, ou d’aller dormir. Tout ce qui n’exige pas de vous de bouger ou de penser.
– Ah, c’est comme d’avoir bu trop de vin, dit Alouette d’un air entendu.
– Je haussai les sourcils, en songeant que si Mouche avait été humain, quelqu’un aurait dû lui parler de sa nièce. »
Enchantment of ravens, Margaret Rogerson.

[2021] Petit bilan de mars

Carnet de lectures : rayon bulles.

Shirley #1, Kaoru Mori (Ki-oon).

À tout juste 13 ans, Shirley entre au service de Mme Bennett, populaire patronne d’un café londonien. La jeune fille semble avoir un lourd passé, mais la bonté naturelle de sa nouvelle maîtresse lui permet de retrouver le sourire, et parfois même des bribes d’enfance…
J’adore les mangas de Kaoru Mori, et j’ai lu avec beaucoup de plaisir ses séries Emma et Bride Stories (je fais d’ailleurs durer le plaisir et ne suis à jour dans aucune des deux).
Bref, j’ai donc emprunté le premier tome de Shirley à la médiathèque sur la bonne foi du nom de la mangaka ! Et si j’ai globalement apprécié, je dois reconnaître que l’ensemble m’a laissée quelque peu sur ma faim. On suit donc les aventures de Shirley, treize ans, qui devient femme de chambre chez une jeune femme de la bonne société londonienne. Les trois premiers chapitres détaillent leur vie quotidienne, sans vraiment mettre en place de fil rouge. Les deux derniers chapitres, quant à eux, mettent en scène deux autres femmes de chambre, employées ailleurs (et a priori n’ayant aucune connexion les unes avec les autres). L’ensemble est sympathique, mais hyper décousu. Si je mets la main sur le tome 2, je le lirai également pour voir de quoi il retourne, mais ce titre souffre vraiment de la comparaison avec les autres séries de l’autrice.

Les Cerisiers fleurissent malgré tout, Keiko Ichiguchi (Kana).

Keiko Ichiguchi est une mangaka japonaise qui vit en Italie avec son mari. Au début de ce manga, elle apprend par un coup de fil que l’impensable est arrivé au Japon : nous sommes en 2011. Le récit est donc clairement autobiographique : l’autrice y parle de son enfance, durant laquelle on lui a diagnostiqué une maladie, puis, plus tard, de la façon dont la catastrophe a traversé sa vie. Ce qui est intéressant, ici, c’est qu’on n’est pas au Japon, mais en Italie lorsque surviennent les événements. L’autrice raconte donc les heures d’angoisse (lorsqu’il est impossible de savoir qui a été touché, comment, etc.), l’envie de se mobiliser (mais pour faire quoi ? De quelle façon ?), sans négliger la façon dont est impactée sa vie personnelle en Italie. Avec cela, le graphisme épuré, délicat, plein de tendresse porte merveilleusement le récit. Je ne savais pas à quoi m’attendre en ouvrant ce manga, et j’en suis sortie charmée !

Carnet de lectures : rayon romans

Les Infectés, tome 1, Marc-André Pilon (éd. Kennes).

Zachary, Camille et Dilkaram vont au lycée à Cité-les-Jeunes et vivent une existence assez classique de lycéens. Débarque alors une vidéo virale dans laquelle on assiste à un meurtre bestial : réalité, ou montage ? Or, rapidement, la maladie qui semble avoir frappé l’agresseur… prend de l’ampleur et transforme les humains en monstres sanguinaires assoiffés de sang.
Je n’ai pas du tout été emballée par ce roman de zombies extrêmement classique. L’histoire s’attache au début et au développement de l’infection mais nous impose un récit extrêmement répétitif. Entre chaque chapitre consacré au trio de protagonistes, s’intercalent des interludes narrant (systématiquement) l’infection d’un personnage lambda sans aucun rapport avec les personnages (à une ou deux exceptions près). Globalement, c’est toujours la même chose, et c’est un peu lassant. Par ailleurs, le développement du récit n’apporte rien de neuf au genre (les persos sont séparés, tombent sur de l’aide qui finalement n’est pas si aidante, la fille manque de se faire violer, etc.), ce qui ne m’a pas aidée à m’impliquer dans ma lecture. J’ai trouvé que les personnages n’étaient pas suffisamment creusés, et que la fin était vraiment, vraiment trop expédiée. Seul point positif : Dilkaram fait partie de la communauté sikh, et j’ai trouvé que cela changeait un peu ! Bref, je ne lirai pas la suite et dans le même style, je conseillerais plutôt In the after.

Tops/Flops

Au rang des seconds, j’ai parlé ci-dessus des Infectés, sur lequel je ne reviens donc pas.
L’autre lecture en demi-teinte, ce mois-ci, a été Le Grand jeu, de Benjamin Lupu.
Autant j’ai aimé l’aspect steampunk et la débauche d’idées toutes plus originales les unes que les autres, autant la complexité de l’univers m’aura un peu perdue. L’intrigue présente plusieurs ramifications qui dessinent un schéma assez dense et à plusieurs reprises, j’ai manqué d’explications pour tout bien suivre.

A côté de cela, j’ai eu deux excellentes, excellentes découvertes !

Tout d’abord, le premier tome de La Machine, de Katia Lanero Zamora, qui nous plonge dans une fantasy largement inspirée de la guerre civile espagnole – une époque qui me passionne. Ici, pour ne rien gâcher, Katia Lanero Zamora dresse une fresque familiale, dans laquelle se mêlent conflits politiques et intenses questionnements personnels. C’est brillant ! J’ai dévoré le roman, j’ai hâte de lire le second volet !

Enfin, deuxième excellente découverte avec Derniers jours d’un monde oublié, le premier roman de Chris Vuklisevic – qui a remporté le concours du premier roman d’imaginaire de FolioSF, ce qui est quand même la grande classe. Et c’est amplement mérité ! Le roman raconte, via trois personnages, les douze derniers jours d’un monde en train de s’effondrer et c’est hyper prenant. J’attends avec impatience ses prochains titres !

Citations.

« La grêle carillonnait avec une violence redoublée sur son visage, lui bleuissant les pommettes de froid et d’hématomes. Qu’importe ! Contrairement au commun des mortels, elle avait un faible pour le temps abominable de son pays. Elle adorait le grondement de l’orage, la pluie lui dégoulinant dans les yeux, les frimas givrant ses cheveux, elle saisissait la neige à pleines mains pour la goûter du bout de la langue. Elle était une Funestrelle aguerrie, fille du froid et de la glaise, attachée comme jamais à la Rocaille. »
Rocaille, Pauline Sidre.

« Les étoiles des pentagrammes ont combien de branches, déjà ? Quatre ou six ?
– Cinq, voyons ! C’est dans leur nom ! Tu n’es pas censé être bon en maths ?
– Oh. Comme un pentagone à cinq côtés, approuva-t-il. Je n’avais jamais fait le rapprochement !
Polly roula des yeux au ciel. »
Fingus Malister #2, Ariel Holzl.

« On ne doit jamais confier à autrui ses crimes, sauf s’ils sont trop grands pour être dissimulés – et dans ce cas, on les qualifie de politiques ou de mesures d’État. »
Le Chant de l’épée, Bernard Cornwell.

« Le matin où les étrangers arrivèrent sur l’île, la Main de Sheltel fut la première à les voir.
Elle allait revêtir son masque quand, par la fenêtre, elle aperçut un point sombre à l’horizon. Un mirage, crut-elle ; un tremblement de la chaleur sur l’eau. La mer était vide, bien sûr. Rien ne venait jamais de l’océan.
Elle ne lança pas l’alerte. »
Derniers jours d’un monde oublié, Chris Vuklisevic.

« Était-ce elle qui attirait le bruit et la misère, ou le monde entier était-il fait uniquement de cris de détresse ? »
Derniers jours d’un monde oublié, Chris Vuklisevic.

[2021] Petit bilan de janvier-février

Carnet de lectures

Ce début d’année, j’ai lu encore plus de romans jeunesse que d’habitude ! (ça colle avec mon nouveau poste). Il y avait du bon, du moins bon, et voilà donc tout cela en vrac.

Les Papis contre-attaquent, Claire Renaud, illustré par Maurèen Poignonec (Pépix, Sarbacane).
Claire Renaud et Maurèen Poignonec ont signé, il y a deux ans, Les Mamies attaquent, que l’on peut considérer comme un diptyque, même s’il n’est pas nécessaire d’avoir lu les deux pour comprendre et profiter de sa lecture. Rien ne va plus dans l’équipe des Lascars, dont fait partie Gérard, le grand-père de Guenièvre. Léonard, le barreur historique de cette équipe d’aviron, est hospitalisé dans un EHPAD le temps de se remettre d’une vilaine fracture. Or, toute l’équipe est engagée dans une compétition qui a lieu en fin de semaine ! Ni une ni deux, les Lascars décident d’exfiltrer leur ami de sa prison maison de retraite, quitte à prendre tous les risques.
Généralement, je ne suis pas déçue avec cette collection et ce titre n’a pas démérité. Le roman aligne les stratagèmes aussi loufoques que désopilants pour tirer Léonard de son guêpier, pour le plus grand plaisir des lecteurs. À chaque nouveau plan, on ne peut s’empêcher de se demander s’il va aboutir : déménagement sauvage, infiltration en tenue (de mamie) de camouflage, cambriolage… Les trouvailles, comme les péripéties pour les faire échouer, sont toutes plus drôles les unes que les autres ! Je me suis bien amusée avec ce titre, qui m’a donné envie de lire le précédent pour voir à quoi il ressemble.

Témoins à abattre, Olivier Gay (Flash Fiction, Rageot).
Alors qu’ils font du vélo en montagne, Yan et Pauline sont témoins d’un meurtre. Pris en chasse par les tueurs, ils donnent tout ce qu’ils ont pour s’échapper !
Nouveau thriller dans la bibliographie d’Olivier Gay ! Le texte, très court, est tenu par un rythme très soutenu : l’ensemble de l’intrigue consiste en la course-poursuite dans la forêt, à la tombée de la nuit. Les chapitres, très courts, soulignent ce rythme. Le style, très simple, l’intrigue linaire, et les chapitres très courts, font que le roman est adapté aux lecteurs fâchés avec la lecture.

Prunelle, sorcière rebelle, #1, Agnès Laroche (Rageot).
Prunelle est une sorcerelle, qui pratique la magie douce. A Tendreval, la magie forte est réservée aux hommes. Sauf que Prunelle s’aperçoit qu’elle sait manipuler la magie forte, et qu’en plus elle apprécie cela. Or, son père est le chef du comté, et réputé pour sa sévérité. Donc, que faire ? Tout lui avouer, ou cacher la vérité ? Et comment ignorer l’appel de la magie ?
L’histoire se déroule dans un univers très clivé, vous vous en doutez, où hommes comme femmes ont des rôles hyper genrés : aux premiers la magie pour construire, détruire, se battre ; aux secondes les sortilèges d’embellissement, de déco, de confort domestique. C’est un premier tome, donc l’intrigue prend son temps pour s’installer et se dérouler. Évidemment, Prunelle ne tarde pas à tomber sur des gens qui, comme elle, questionnent cet univers très inégalitaire. L’intrigue, très linéaire, s’avère assez classique, mais menée à bon train, ce qui rend la lecture assez plaisante. J’ai beaucoup pensé à La Fille aux licornes en lisant ce titre !

Yoko, Jean-Luc Marcastel (Didier jeunesse).
Après ces premières bonnes découvertes, je dois dire qu’avec ce titre, ça ne l’a vraiment pas fait. En cause : des personnages féminins vraiment pas terribles. Alors oui, LA fille de l’histoire (car il n’y en a évidemment qu’une) est badass, sait se battre, sait plein de choses… Mais il ne suffit pas de mettre un perso féminin qui déchire pour dire que c’est bon, tout le taf est fait. D’ailleurs, ça ne loupe pas, elle est inconsciente quand les garçons la trouvent (et vas-y que ça lui paluche les seins pour vérifier qu’elle est toujours vivante………) et ensuite on oscille entre femme fatale, femme-trophée. C’est agaçant ! En plus de cela, l’intrigue (dans un univers post-apo hyper classique) met un temps infini à démarrer, à tel point que ça à peine débuté alors qu’on arrive à la fin. Vu que le roman fait tout juste 190 pages, pourquoi ne pas faire un seul gros livre ? Voilà un roman dont je ne lirai sans doute pas la suite !


Scarlett et Novak, Alain Damasio (Rageot).
Deuxième pioche dans le tas des découvertes pas follement emballantes avec ce titre de Damasio. Il s’agit d’une très courte nouvelle de thriller. Novak, un ado, se fait agresser par des personnes qui en ont après son téléphone, un modèle high-tech équipé de Scarlett, une intelligence artificielle très performante. Déjà, je craignais un peu vu la mention sur la couv « Le thriller qui déjoue la fascination du smartphone ». A qui ça donne envie de lire ça ?! Pas à moi ! Et de fait, le texte est à l’avenant. C’est clairement une incitation à décrocher de son téléphone et des applis toutes prêtes à rendre service afin de se débrouiller par soi-même. En soi, c’est louable, mais j’ai trouvé qu’on sentait beaucoup trop toutes ces bonnes intentions dans le texte, ce qui explique sans doute mon manque d’enthousiasme pour ce titre.

Et après tous ces romans, enfin des bulles !

Une sacrée mamie #1, Yoshichi Shimada & Saburô Ishikawa (Delcourt).
1958, Hiroshima. À cette époque au Japon, il est difficile pour une jeune femme d’élever seule ses deux fils. Acculée, Hikedo décide un jour de confier son plus jeune garçon, Akihiro, à sa mère qui vit à la campagne. Arrivé chez sa grand-mère, une vie complètement nouvelle va commencer pour Akihiro. Pas facile de quitter la ville pour la campagne quand on n’y est pas préparé ! Mais le petit garçon va vite s’habituer à sa nouvelle vie au grand air. Suivant l’exemple de sa super mamie débrouillarde, il apprend à s’adapter à toutes les situations…
Il était grand temps que je découvre enfin ce manga, dont j’ai beaucoup entendu parler. Et c’était une chouette découverte. Akihiro est assez marrant à suivre, avec un caractère très égal et une grande capacité d’adaptation. La vie avec sa grand-mère ne cache rien des difficultés financières qu’éprouve la petite famille. Si le contexte n’est pas tendre avec l’enfant (la séparation d’avec sa mère et son frère, les conditions de vie, etc.), le manga met en avant une relation chaleureuse et pleine de bienveillance entre la grand-mère et son petit-fils. Je vais attendre la suite à la bibli avec impatience !

Ma première lecture de l’année était un manga, et un boy’s love ! Incroyable, mais vrai ! J’ai donc découvert Everyday is a good day, un oneshot de Noeko Nishi (éditions Akata). Elle y raconte l’histoire d’un jeune homme, Toki, dévasté par la perte de sa sœur jumelle, un an plus tôt. Son neveu Asahi, quatre ans, traumatisé par la perte de ses parents, ne décroche plus un mot. Pour permettre à ses parents de partir en croisière, Toki propose d’accueillir Asahi pour plusieurs mois – oubliant qu’il n’a pas la moindre idée de comment on gère un enfant. Parallèlement, sa rencontre avec Chihiro (petit frère d’un ami d’enfance) provoque chez les deux jeunes hommes de troubles sentiments. Pas facile de gérer en même temps un début de romance et un enfant traumatisé !
Ce manga était une très bonne surprise. Je n’ai pas l’habitude du boy’s love, et ce titre était impeccable pour commencer (même s’il n’est peut-être pas très représentatif du genre). La romance entre Toki et Chihiro est là vraiment en arrière-plan et le récit se concentre plutôt sur la vie quotidienne de ce drôle de trio. C’est léger et rafraîchissant, avec parfois un peu d’humour, et en même temps des sujets profonds évoqués de façon sensible. Au fil des pages, il est question d’amour, de deuil, de relations familiales et c’est très prenant. Les graphismes sont à l’avenant : doux et sensibles. Bref, voilà un titre plein de sensibilité et de bienveillance ; je guetterai les prochains titres de l’autrice !

Tops/Flops

J’ai présenté ci-dessus suffisamment de lectures en demi-teinte, donc je vais me concentrer sur les bonnes découvertes de ce début d’année – et il y en a eu ! J’ai même eu du mal à choisir ! Donc allons-y pour un petit top 3 🙂

Top 1 : La Honte de la galaxie, Alexis Brocas (Sarbacane).
Énorme coup de cœur pour ce récit de SF hyper prenant, dense à souhait et qui m’a embarquée dans une intrigue et un univers particulièrement originaux. Je recommande chaudement la lecture de ce titre !

Top 2 : Il était une fangirl #1 : Cendrillon 2.0, Ashley Poston (Lumen).
Je ne savais pas trop à quoi m’attendre avec ce mélange annoncé entre réécriture de conte et fandom d’une série SF à succès et j’ai été bluffée par la maîtrise de l’intrigue, qui marie à merveille les deux tableaux. Très très bonne pioche !

Top 3 : Plein gris, Marion Brunet (PKJ)
Après un énorme coup de cœur pour Sans foi ni loi, j’étais curieuse de lire le nouveau roman de Marion Brunet, et ça a été une très bonne pioche ; elle nous embarque dans une croisière pleine de tension et de non-dits, à l’ambiance apocalyptique très réussie !

Citations.

« Je sors à pas lents de la loge, dont je referme la porte derrière moi sans bruit. J’effleure, sur mes lèvres, la plaie que les dents de la Ventouse ont laissée. Mark a peut-être raison. Peut-être ai-je vraiment besoin d’un agent capable de tenir les fans à distance et de jouer les gros bras au cas où…
Aussitôt, j’essaie de me raisonner :
– Non, arrête. Tu fais confiance aux autres. Tu aimes tes fans. Tu es sympa, drôle et cool. Rappelle-toi, tu es Jennifer Lawrence. »
Cendrillon 2.0, Ashley Poston (Lumen).

« Désolée, Na’ya est en retard. Les fées coiffeuses l’ont abandonnée en plein milieu de ses tresses.
– QUOIIII ?! Mais je leur avais apporté des gâteaux ! Elles sont déjà parties ?
– Non non, c’est juste que… j’ai voulu les payer et leur expliquer le concept de conditions de travail correctes… Du coup, elles sont en train de se syndiquer dans le placard. Je suis tellement fières d’elles. N’oubliez pas de réclamer un congé parentalité !! »
Grimoires & Sorcières, Svetlana Chmakova (Jungle).

« J’avais envie de découvrir l’Underground au lieu de prendre un cab. Père en serait scandalisé, car la bonne société londonienne n’emprunte pas ce mode de transport, mais les conventions sociales m’ennuient. En intégrant la Garde royale, j’ai fui la demeure familiale pour gagner ma liberté. Les représentants de Sa Majesté suivent leurs propres règles, ce qui me permet de défier allègrement l’autorité paternelle.
Clement m’adresse un sourire amusé depuis le banc d’en face. J’avoue que notre élégance détonne au milieu des pantalons informes et des robes sombres. Les autres passagers, ouvriers et domestiques pour la plupart, n’ont pas l’habitude des hauts-de-forme et des jupes à tournure. La mienne me rappelle la couleur des feuilles en automne, un brun roux qui réchauffe la pâleur de mon teint. Quand je vérifie dans la glace qu’une mèche rousse ne s’échappe de mon chignon, mes prunelles écarlates s’y reflètent.
– Vous êtes parfaite, déclare mon dena.
Sa gentillesse se répand en moi comme une douce chaleur. J’aimerais effleurer son visage d’ange en retour, mais les bonnes mœurs l’interdisent en public. Nous sommes tous esclaves de la politesse. »
Anergique, Célia Flaux (Actusf).

« Tout est écrit, ici, remarqua Ragnar. Tout. Sais-tu lire ?
– Je sais lire et écrire.
– Est-ce utile ? demanda-t-il, impressionné.
– A moi, cela ne l’a jamais été, admis-je.
– Alors pourquoi le faire ? s’étonna mon ami.
– Leur religion est écrite, expliquai-je. La nôtre, non.
– Une religion écrite ?
– Ils ont un livre où tout est écrit.
– Pourquoi ont-ils besoin qu’elle soit écrite ?
– Je l’ignore. C’est ainsi. Et bien sûr, ils écrivent les lois. Alfred adore en faire de nouvelles, et toutes doivent être consignées dans des livres.
– Si un homme ne peut se rappeler les lois, c’est qu’il en a de trop nombreuses. »
Les Seigneurs du Nord, Bernard Cornwell.

« En riant, il lui avait décrit les parties qu’il organisait pour Mr Watkins. Les chiens qui pistaient, levaient le gibier, le ramassaient une fois tué, bref, faisaient presque tout le travail. La tripotée de domestiques qui suivait, portant les poires à poudre, les sacs de plombs, les fusils de rechange et les carniers, et même un petit siège pliant car Mr Watkins, qui allait léger comme un pinson, fatiguait vite.
– Et encore, Mr Watkins vaut mieux que ces jeunes nobles qui chassent en bande, parce que lui, au moins, il suit mes conseils. Avec moi, il est à bonne école. Il ne tire pas les hases pleines, il ne tarabuste pas la moindre compagnie de grouses qui lève sous ses yeux en tirant dans le tas, il n’enfume pas les terriers. Sadima écouta son père pester après les gentlemen bruyants qui saccageaient les fourrés, qui ne savaient pas viser avec leurs fusils dernier cri.
– Ils sont incapables de prendre le temps. Ils ne veulent que tirer leur coup. Tout ça pour se retrouver après entre eux et se raconter leurs exploits.
Le père avait marqué une pause.
– En fait, c’est exactement comme quand ils sont avec une…
Et, baissant les yeux sur sa petite fille de sept ans qui l’écoutait avec attention:
– Bref. Qu’importe. Je vais donc t’apprendre à chasser. »
D’Or et d’Oreillers, Flore Vesco.

[2020] Petit bilan de novembre-décembre

Un peu de stats :

Comme je suis un peu en retard sur mes bilans mensuels (à peine !), je vais faire un doublé novembre-décembre !
En novembre, j’ai fait défiler quelques 2913 pages et écouté 2218 minutes d’audiolectures ! En décembre, j’ai apparemment un peu plus lu (3634 pages) et un peu moins écouté (1458 minutes). Vivent les BD et la lecture audio en temps de déménagement !

Carnet de lectures :

J’ai lu énormément de BD en cette fin d’année, et je ne pense pas tout chroniquer. La plupart étaient dues au Prix Livraddict, mais un certain nombre d’entre elles étaient de pures découvertes dans les rayons de la bibli !

Touchées, Quention Zuttion (Payot).


Lucie dort un couteau à la main. La crainte l’habite, les hommes l’effraient. Tamara, elle, se bat, se débat : pour ne plus être victime, elle devient agresseur. Quant à Nicole, c’est l’isolement. Elle s’efface, disparaît pour ne plus être visée. Les trois ont été victimes de violences sexuelles. Pour remonter la pente, trois femmes prennent les armes. Attaquer, défendre, toucher, se faire toucher… Elles vont se reconstruire et reprendre une vie sociale grâce à un programme d’escrime thérapeutique. Un programme d’un an pour se sauver et reprendre la maîtrise de sa vie.
Premier titre du Prix LA ! C’est une magnifique BD sur la résilience et la reconstruction de soi, portées par trois victimes de violences sexuelles (aux parcours et personnalités vraiment différents). Le récit n’est pas centré sur leur passé, mais sur ce qui leur arrive après, la façon dont elles (re)vivent (ou pas), la façon dont elles essaient de se reconstruire. C’est à la fois délicat, sensible, et violent, quand on pense à ce pour quoi elles en sont là. Les illustrations, à l’aquarelle, sont vraiment superbes ! A l’heure qu’il est, je ne sais toujours pas pour quel titre voter dans cette catégorie, mais celui-ci a toutes ses chances !

Dans la tête de Sherlock Holmes, tome 1 : L’Affaire du ticket scandaleux, Cyril Lieron et Benoît Dahan.

Un simple diagnostic médical du Dr Watson se révèle être bien plus que cela…
La découverte d’une poudre mystérieuse sur des vêtements et d’un ticket de spectacle très particulier amène Sherlock Holmes à penser que le patient n’est pas l’unique victime d’un complot de grande ampleur.
Il semblerait en effet que l’étrange disparition de londoniens trouve son explication dans les représentations d’un magicien Chinois. D’autres tickets retrouvés confirment les soupçons du détective…

Chaudement recommandée par des amis et inscrite au Prix LA, cette BD avait tout pour m’attirer ! Et de fait, j’ai vraiment apprécié ma lecture. Le titre n’est pas usurpé, puisque l’on plonge très souvent dans la tête de Sherlock Holmes, organisée comme on peut le voir sur la couverture. La BD joue donc sur un découpage original, avec beaucoup de découpes et d’incises (et même une page à regarder en transparence), dont la suite logique est à suivre grâce à un fil rouge qui relie les cases. Mais je dois avouer que je me suis sentie un peu frustrée par l’enquête hyper classique, pas tout à fait à la hauteur du génial dessin ! Quoi qu’il en soit, je vais suivre cette série, c’est certain.

La fille dans l’écran, Lou Lubie et Manon Desveaux (Marabout – Marabulles).

Deux filles que tout opposent, prennent contact sur internet pour ensuite faire connaissance dans la « vraie vie ». Elles seront submergées par des sentiments troublants. Coline, 22 ans, vit en France et souffre de troubles anxieux qui l’ont isolée du monde. Hébergée à la campagne chez ses grands-parents, elle rêve de devenir illustratrice. Ses recherches d’inspiration la conduisent à contacter Marley, une photographe installée à Montréal. De son côté, Marley, 28 ans, vit au Québec et a abandonné sa passion pour la photo pour se laisser porter par sa vie montréalaise trépidante. Elle a un job alimentaire, un amoureux québécois et un quotidien rythmé par des sorties. Les messages de Coline vont réveiller en elle un réel besoin d’authenticité. Coline et Marley vont tisser un lien capable de surmonter la distance et le décalage horaire et qui se révèlera de plus en plus dense jusqu’à la rencontre en France…
Deuxième BD sélectionnée au prix LA et qui joue énormément sur les graphismes ! En effet, la BD est signée de deux illustratrices… et chacune raconte l’histoire de son personnage. Page de gauche, on suit donc l’histoire de Coline (par Manon Desveaux), tout en noir et blanc et page de droite, celle de Marley, tout en couleurs (par Lou Lubie). Les deux trajectoires et les deux styles graphiques, très différents, se répondent à merveille ! Côté intrigue, c’est un peu cousu de fil blanc, mais ça ne m’a vraiment pas dérangée… Le récit brasse pas mal de thèmes (relations familiales, amour, quête et affirmation de soi), mais de façon sensible et simple, ce qui rend le tout vraiment prenant. J’ai vraiment apprécié cette lecture !

Un été d’enfer, Vera Brosgol (Rue de Sèvres).


Dans cette œuvre autobiographique on découvre l’autrice à dix ans : venue de Russie, elle peine à s’intégrer aux États-Unis où elle s’est installée avec sa mère, son petit frère et sa petite sœur. Ses amies américaines vont chaque été dans de luxueux camps de vacances, qui font rêver Vera mais qui sont bien trop chers pour sa mère. Alors quand elle entend parler d’un camp d’été pour immigrés russes aux États-Unis, elle saute sur l’occasion ! Mais entre la cabane à toilettes insalubre, les randonnées épuisantes et les animaux dangereux, les vacances de rêve se transformeront vite en cauchemar…
Ce comics ressemble à s’y méprendre à une aventure comique. Alors qu’en fait, pas du tout ! Au fil des péripéties de Vera au camp scout (à la dure), l’autrice évoque le sentiment de solitude, la difficulté à s’intégrer (et à trouver des amies qui en valent vraiment le coup !) et à vivre entre deux cultures. C’est un récit vraiment profond, superbement mené. Côté graphismes, elle use d’un style un peu naïf (beaucoup de très ronds) qui colle bien au récit ; toute la BD est déclinées dans des nuances de vert (vu qu’on est dans la forêt presque tout du long, c’est raccord). J’ai envie de lire d’autres titres de l’autrice, maintenant !

Spirite, tome 1 : Tunguska, Mara (Drakoo).

Dans le New York des années 1930, Ian Davenport, timide jeune chercheur en spiritologie qui traque mais surtout étudie les fantômes, voit son mentor et ami Boris Voynich se faire assassiner sous ses yeux dans des circonstances étranges. Il se retrouve alors propulsé dans une sombre histoire de meurtres inexpliqués qui semblent ne cibler que ses confrères spiritologues. Seul, désespéré, rejeté par la police qui ne le prend pas au sérieux de par son métier peu crédible, il décide de chercher de l’aide auprès des journalistes d’une rubrique paranormal d’un grand journal New York. Là, il y rencontre Nell Lovelace, une jeune femme sceptique au caractère bien trempé, qui accepte à contrecœur de l’aider. Ensemble, ils vont tenter de percer le secret de cette affaire de meurtres, qui semble liée à la terrible explosion d’origine mystérieuse de Tunguska en 1908, contrée perdue de la Sibérie profonde.
Première chose qui m’a marquée dans cette BD : les magnifiques illustrations !! Elles ont un cachet fou ! J’avais l’impression d’être dans un film d’animation parfaitement transposé. Les décors sont hyper soignés, les personnages bien détaillés, c’est un plaisir à regarder, donc. Côté intrigue, j’ai trouvé que l’équilibre était très bon entre l’introduction à l’univers et l’aventure menée. Celle-ci mêle chasse aux fantômes, un brin de fantastique et un peu d’enquête et s’avère hyper prenante. J’ai hâte de lire la suite !

Il faut flinguer Ramirez, tome 1, Nicolas Petrimaux (Glénat).

Jacques Ramirez est l’exemple parfait de l’intégration des personnes handicapées dans le milieu professionnel. Le fait d’être muet ne l’a pas empêché de devenir le meilleur technicien chez Robotop, le leader de l’aspiration des poussières. Ponctuel, efficace et aimable, son nom a même été avancé pour recevoir le titre d’employé de l’année (chut, ce n’est encore qu’une rumeur). Par contre, le cartel mexicain de la drogue l’a dans le collimateur et un contrat court sur sa tête.
J’avais beaucoup entendu parler de cette BD et j’étais éminemment curieuse de savoir ce qu’il en allait… et j’ai adoré ma découverte ! Le récit est un bon gros thriller avec une intrigue complètement déjantée (le cartel mexicain ne faisant pas dans la dentelle). Il y a un énorme décalage entre cette intrigue et l’ambiance générale de la BD, qui présente énormément d’humour, notamment dans des petits coins d’illustrations, ou des petites lignes. Mention spéciale, à ce titre, aux encarts publicitaires insérés dans le récit ! C’est génial ! Je suis très impatiente de lire le tome 2 maintenant !


Beate & Serge Klarsfeld : un combat contre l’oubli, Pascal Bresson et Sylvain Dorange (La Boîte à Bulles).

« Si les Allemands nous arrêtent, moi, je survivrai parce que je suis fort mais pas vous ». Ces paroles, prononcées en 1943 par son père, assassiné à Auschwitz, Serge Klarsfeld ne les oubliera jamais. Après la guerre, il se marie à Beate, une jeune allemande installée à Paris. Ensemble, ils se font la promesse d’obtenir la mise à l’écart de la vie politique allemande de tous les anciens nazis, puis d’obtenir le jugement et la condamnation des principaux responsables nazis de la déportation, notamment ceux ayant sévi en France. Distribution de tracts, manifestations, tentatives d’enlèvements, la « méthode Klarsfeld » prouve leur obstination à débusquer les anciens criminels de guerre qui vivent paisiblement en toute impunité alors que, durant la guerre, ils occupaient des postes officiels, soit comme gradé nazi avec Lischka, Hagen, ou Barbie soit en tant que collaborateurs français comme Papon, Bousquet ou Touvier…
J’avais lu les Mémoires de Beate et Serge Klarsfeld à leur parution – une lecture vraiment passionnante ! – donc lorsque j’ai su que cette BD sortait, j’ai eu très envie de m’y replonger. L’auteur et l’illustrateur ont vraiment retranscrit à merveille le parcours de ce couple mythique de chasseurs de nazis : le récit est très bien mené, et se lit vraiment comme une aventure à part entière (alors que tout est super bien documenté). L’intrigue est vraiment centrée sur la traque de Klaus Barbie, une des plus emblématiques qu’ils ont pu mener et c’est aussi passionnant que dans les Mémoires ! Bref, une excellente BD biographique et historique, à mettre entre toutes les mains.

Tops/Flops :

Ces deux derniers mois de l’année ont été riches en très bonnes découvertes… et en moins bonnes ! Commençons par ces dernières !

Je n’ai pas été très emballée (et c’est rien de le dire) par Le Dernier Drae de Kelly St-Clare et Raye Wagner, un titre en lice pour le prix LA au rayon fantasy. (Depuis j’ai lu La Dernière courtisane, lui aussi en lice, que j’ai trouvé encore pire que nul, mais je m’avance un peu sur le petit bilan de janvier !). Dans Le Dernier Drae, il y a tout de même de bonnes idées, et l’univers est vraiment intéressant. Ce qui pêche, ce sont les incohérences dans la narration (peut-être dues au fait que c’est un récit à quatre mains), l’intrigue hyper survolée et les péripéties vraiment trop classiques. Je ne lirai pas la suite !
J’étais très curieuse de découvrir les livres d’Ann Leckie et j’ai donc lu La Tour du Freux, mais je pense que ce n’était pas le meilleur titre pour découvrir son œuvre. Le roman est très original (avec un choix narratif vraiment atypique), mais souffre de longueurs assez difficiles à surmonter, surtout dans la première partie. La seconde s’avère plus prenante, mais j’ai vraiment peiné sur le début.

Heureusement, j’ai aussi fait d’excellentes découvertes, et même eu deux coups de cœur, au rayon bulles (une fois n’est pas coutume !

J’ai découvert avec un immense plaisir Peau d’homme, d’Hubert et Zanzim (Glénat). Dans l’Italie de la Renaissance, Bianca, demoiselle de bonne famille, doit épouser un riche marchand (qu’elle n’a évidemment pas choisi). Or les femmes de sa famille détiennent une « peau d’homme » ! En la revêtant, Bianca devient Lorenzo, peut désormais visiter incognito le monde des hommes, apprendre à connaître son fiancé dans son milieu naturel… et découvrir au passage amour et sexualité. C’est génialissime ! L’histoire est hyper moderne et, sans le décor très Renaissance, on jurerait que cela se passe de nos jours (ce qui, en soi, est assez flippant sur l’ambiance de notre époque). Il y a beaucoup d’humour, et cela permet de faire mieux passer les sujets pas si drôles que cela qui sont évoqués – avec brio ! Bref, je recommande très chaudement ce titre !
J’ai également (enfin !) lu le premier tome de Stand still, stay silent, de Minna Sunberg (Akiléos) et j’ai adoré également. Ce comics fait la part belle aux mythologies scandinaves et nous embarque dans un périple post-apocalyptique mêlé d’un brin de fantasy. Les graphismes sont magnifiques ! J’ai vraiment adoré, et suis curieuse de lire la suite, comme les autres titres de l’autrice !

Citations

« Prudence laissa échapper un cri de surprise lorsqu’un troupeau de dragons sortit à son tour de la brume. Il s’agissait en fait d’embarcations dont la carlingue avait été forgée de façon à donner cette illusion. Longs de trente pieds environ, ces dragons balançaient gracieusement leur tête et leur queue dans le vent, donnant un mouvement naturel aux animaux mécaniques. Le réalisme était encore accentué par leurs yeux luisants et les volutes de vapeur qui s’échappaient de leur gueule. Sur les flancs des machines volantes, de costauds boucliers de bois avaient été alignés et leur chevauchement formait une rangée d’écailles colorées. Les cavaliers des hippoléoptères pointaient des arbalètes pourvues de gros barillets sur les pirates, tandis que les dragons mécaniques avaient chacun un canon sortant de leur ventre prêt à faire feu sur le pont de l’Héliotrope.Baissez vos armes ! répéta Mousquet à ses hommes, qui s’exécutèrent enfin.
Aussitôt les visiteurs firent de même et les canons se replièrent à l’intérieur des dragons dans un raclement sourd.
L’un des hippoléoptères se posa lourdement sur le navire, soulevant un nuage de neige poudreuse. Son cavalier sauta lestement sur le pont.
D’une voix étouffée par le col de sa cape, il s’adressa au capitaine :
– Afevis din idenotit, netop dine henasigter.
– Venner ! Venner, at spise venner, répondit Mousquet, pataugeant dans les deux mots de nordish qu’il connaissait.
Le nouveau venu hésita. En effet, le capitaine venait de lui proposer de manger ses amis, ce qui n’était évidemment pas dans ses intentions. »
Steam Sailors, tome 1 : L’Héliotrope, E.S. Green.

« Comme vous êtes intelligente, Cassandra !
Ayant passé l’âge de feindre la modestie, elle ne chercha pas à nier. En effet, elle était intelligente. De plus, elle avait eu la chance de grandir dans une maison où l’intelligence des filles était appréciée et où celles-ci n’avaient pas à s’excuser de posséder un cerveau. »
Miss Austen, Gill Hornby.

« Âgée de trois ans de plus que moi, elle avait le charme et la sensibilité d’un coup sous la ceinture. »
Bone Season, tome 1 : Saison d’os, Samantha Shannon.

« Ainsi, mourir quand on très aimé par une personne atteinte de démence est une mauvaise chose d’un côté, parce que la personne ne se souvient pas très souvent qu’on est mort ; mais c’est une bonne chose d’un autre côté, parce qu’on est pleuré fraîchement à chaque fois qu’elle se souvient, de sorte que notre absence ne devient jamais banale et jamais une habitude. »
Âge Tendre, Clémentine Beauvais.

« Si tout le monde répète sans cesse qu’on ne vaut rien du tout, il est difficile de ne pas le croire. »
L’Incivilité des fantômes, Rivers Solomon.

« Eh bien, en ce cas, cessez de faire des manières. Je passe déjà beaucoup trop de temps à essayer de décoder vos euphémismes puis à réparer les pots cassés quand je les ai mal décodés. »
L’Incivilité des fantômes, Rivers Solomon.

« Ces derniers temps, quand je vois des jeunes gens de vingt et un ans, je les trouve d’une jeunesse consternante, à peine sevrés du lait de leur mère, mais lorsque j’en avais vingt, je me considérais comme un homme adulte. J’étais père d’un enfant, j’avais combattu dans le mur de boucliers et ne m’en laissais conter par personne. En un mot, j’étais arrogant, sot et entêté. »
Le Quatrième Cavalier, Bernard Cornwell.