Anthony est un Plieur de temps. Grâce à son horloge magique, il peut revenir 5 minutes en arrière. Mais un super-pouvoir peut-il rendre super-heureux ?
Manon Fargetton s’est lancée dans une nouvelle série autour d’un thème aussi sympathique que mystérieux : les voyages dans le temps. Les deux premiers tomes, Anthony : à cinq minutes près et Robin : à la dernière seconde, pouvaient se lire dans l’ordre que l’on souhaitait (j’imagine que les suivants nécessiteront tout de même d’avoir lu ou les aventures de Robin, ou celles d’Anthony – ou les deux). J’ai donc commencé par celles d’Anthony, puisque ce sont les premières qui me sont tombées sous la main.
Le roman est court, aussi ne se perd-on pas en détails inutiles. Malgré tout, Manon Fargetton dresse le portrait de personnages attachants et bien pensés. Mais revenons sur la question du personnage attachant car, dans le cas d’Anthony, ce n’était pas vraiment gagné : en effet, Anthony est le gros dur de la classe, celui qui a tendance ) asticoter ses petits camarades, pour le simple plaisir semble-t-il. Ce qui est intéressant, c’est que Manon Fargetton apporte des explications sensées à son comportement. Peu à peu, on en vient à comprendre ce gamin mal dans sa peau et qui se sent délaissé par ses parents, notamment son père, et cherche donc à asseoir son autorité. Toutefois, si elle trouve des explications à son comportement, elle ne l’excuse en aucun cas : ce n’est pas parce qu’il est sympa qu’il est en droit de terroriser ses petits camarades. Mieux : Anthony progresse au fil de l’intrigue, comprend en quoi son comportement n’est pas acceptable et se met à s’amender.
Au travers du personnage d’Anthony, Manon Fargetton évoque donc les thèmes du harcèlement scolaire, mais aussi (et surtout) des relations familiales et de l’amour filial : c’est très touchant !
Et tout cela s’inscrit dans une problématique un tantinet plus fantastique : celle du voyage dans le temps.
Dans le cas d’Anthony, le temps qu’il passe dans l’horloge magique de la cave lui permet de remonter en arrière de 5 minutes autant de fois que nécessaire (et dans la limite du temps engrangé). Un pouvoir bien pratique lorsqu’il s’agit de briller (momentanément) en classe, éviter une sanction, ou se décharger de ses mots noirs sans qu’il y ait de conséquence.
L’ennui, c’est qu’avoir un super-pouvoir ne fait pas forcément de vous quelqu’un de super-heureux et de bien dans ses bottes et Anthony va avoir quelques petites leçons du même acabit à apprendre. De fait, cela participe de son évolution, et c’est ce qui rend le roman si prenant.
S’il est si prenant, c’est aussi parce que l’action y est bien calibrée et que le style est très fluide. Résultat : on se retrouve à enchaîner les chapitres et à arriver à la fin quasiment sans s’en rendre compte. Le texte étant très accessible, c’est un roman qui devrait, en outre, plaire aux jeunes lecteurs (dès 9-10 ans).
Bonne première pioche, donc, que cette aventure d’Anthony. Je suis d’ailleurs ravie d’avoir attaqué par son aventure car, si je l’avais d’abord entraperçu par les yeux de Robin, je l’aurais sans doute moins apprécié (sans compter que la vue par les yeux de Robin aurait un tantinet gâché l’évolution du personnage). Ici, j’ai vraiment apprécié la façon dont Manon Fargetton nous dresse le portrait d’un jeune garçon très antipathique (il est même au-delà de l’anti-héros) qui, peu à peu, va s’amender, réfléchir et évoluer. Un très beau parcours ! Et ce d’autant qu’il est servi dans l’écrin d’une intrigue fantastique qui tient bien la route, tout en évoquant des sujets qui parleront sans aucun doute aux jeunes lecteurs. Voilà une série jeunesse que je suivrai sans aucun doute !
Les Plieurs de temps #1, Anthony : à cinq minutes près, Manon Fargetton. Illustrations de Noémie Chevalier. Rageot, mai 2017, 224 p.
Robin est un Plieur de temps. Grâce à son horloge magique, il peut arrêter le temps. Mais suffit-il d’avoir un super-pouvoir pour devenir un super-héros ?
Hop ! L’envers du décor, cette fois ! Je confirme que les deux romans peuvent se lire indépendamment ; toutefois, dans Anthony : à cinq minutes près, on assiste à une scène réunissant tous les protagonistes et Robin : à la dernière seconde s’arrête juste avant cette scène. Donc si vous les lisez dans le même ordre que moi, attendez-vous à un léger spoiler quant aux relations des enfants et quant à leurs histoires respectives (rien de dramatique, cependant, mais c’est bon à savoir).
Ici on a donc un personnage qui, au premier abord, est moins torturé que ne l’était Anthony. Pourtant, sous des dehors de bon élève, Robin a lui aussi quelques complexes. Si son histoire est moins torturée que celle de son camarade de classe, elle balaie elle aussi quelques questionnements qui peuvent traverser la tête d’enfants de son âge : placement dans la fratrie, définition du courage, volonté d’être juste et d’être un bon ami…
L’histoire est, à nouveau, bien menée et mêle vraiment bien la partie fantastique à la partie vie quotidienne.
Le texte est fluide, les péripéties s’enchaînent à bon train, entre quelques pauses plus réflexives : on ne voit pas la lecture passer ! Et, point bonus, le langage est assez soutenu (tout en restant accessible). Les illustrations de Noémie Chevalier, de leur côté, viennent souligner et aérer la lecture !
Avec ces deux titres, Manon Fargetton initie une série fantastique à la fois divertissante et évoquant avec justesse la vie quotidienne des jeunes enfants, ce qui fait qu’elle devrait plaire aux plus jeunes lecteurs, dès 9 ans. Tout le mystère n’a pas encore été levé autour des deux horloges, ce qui fait qu’à l’issue des deux premiers volumes, je suis très curieuse de découvrir la suite !