Belgravia, Julian Fellowes.


Le 15 juin 1815, le bal devenu légendaire de la duchesse de Richmond réunit à Bruxelles tous les grands noms de la société anglaise. La plupart des beaux officiers présents ce soir-là périront quelques heures plus tard sur le champ de bataille de Waterloo, faisant de cette réception l’une des plus tragiques de l’histoire. Mais cette nuit va aussi bouleverser le destin de Sophia Trenchard, la ravissante fille du responsable de l’intendance du duc de Wellington. Vingt-cinq ans plus tard, les Trenchard, en pleine ascension sociale, se sont installés dans le nouveau quartier de Belgravia et pensaient laisser derrière eux ces terribles événements. Mais dans un monde en mutation où l’aristocratie côtoie désormais la classe émergente des nouveaux riches, certains sont prêts à tout pour que les secrets du passé ne menacent pas leurs privilèges…

L’année dernière, j’ai découvert avec un immense plaisir la série télévisée Downton Abbey, dont Julian Fellowes est auteur et producteur. Forcément, un roman historique sous les mêmes auspices, signé de son nom, ne pouvait que m’attirer – même si la mention de la marque non déposée, en début d’ouvrage, m’a un tantinet refroidie. Marketing, quand tu nous tiens…

Mais en dépit de mes réticences initiales, j’ai littéralement englouti ce petit pavé.
L’introduction nous plonge en plein dans les préparatifs du bal de 1815, à Bruxelles, mais ce n’est que pour quelques très courts chapitres. Bien vite, on retrouve les Trenchard, à Londres, en 1841, alors qu’ils sont en pleine ascension sociale. De là, Julian Fellowes dresse un portrait sans fards de cette haute société anglaise très clivée et encore très accrochée à ses privilèges. On est à l’époque où les membres de la haute bourgeoisie, ces nouveaux riches, parviennent à se hisser au même niveau financier que l’aristocratie… et espèrent donc les mêmes privilèges sociaux – et c’est bien le cas de James Trenchard – que les membres de la haute. Malheureusement, l’aristocratie, elle, n’a pas la moindre intention de partager ses privilèges et regarde donc les gens comme les Trenchard d’un sale œil – et ne se prive pas de le leur faire remarquer.
Ça ne serait pas si triste si les membres de la domesticité, rarement considérés comme des gens de qualité, ne faisaient pas preuve du même snobisme… J’ai eu quelques élans de compassion envers les Trenchard (notamment Anne, la mère, qui n’a rien demandé à personne et s’efforce juste de servir les intérêts de son mari), lorsque leurs propres employés déploraient le manque de sang bleu dans leurs veines, et les fustigeaient, sans avoir l’air de se rendre compte qu’ils étaient, au départ, dans le même panier. Mais cela participe à merveille à l’ambiance générale de cette fin de XIXe siècle, où la société en pleine évolution se cherche encore un peu. À ce titre, la fin est un peu moins pessimiste que ne l’était le début.

Du côté des personnages, on a un nombre assez réduit de protagonistes (mais une pléthore de personnages secondaires). Les Trenchard, tout d’abord, sont donc des bourgeois immensément riches avec, dans le cas du père, des ambitions sociales. Le fils a tellement d’ambitions qu’il aimerait tout simplement ne pas travailler et vivre comme un aristocrate. Face à eux, la dynastie Brokenhurst, une famille ancienne, respectée et respectable, qui représentent donc cette haute société si fermée. Entre les deux surnagent quelques autres personnages : un jeune entrepreneur, une jeune dame aux idées parfaitement révolutionnaires pour l’époque, un noble désargenté et aux abois… Les domestiques, quant à eux, sont vraiment cantonnés à des rôles secondaires (contrairement à Downton Abbey).
Sans déflorer de trop l’intrigue, tout ce petit monde complote, noue des alliances, ment, triche, espère, tombe au fond du seau ou a de subits élans de bonté. Le tout sur fond de secrets de famille.

Ceux-ci se révèlent assez vite mais des pans entiers de la vérité échappent à certains personnages, qui tournicotent autour, en ayant la sensation qu’on leur cache des choses, mais sans savoir lesquelles. Du coup, le roman a parfois de petits accents de polar, car ça enquête et complote dans tous les sens. Ainsi, et bien qu’on ait l’impression d’avoir assez vite toutes les clefs en main, le suspense est présent de bout en bout. La tension, d’ailleurs, augmente nettement sur la fin : passé un certain point, j’en étais même à me demander comment cela allait bien pouvoir finir !

Belgravia m’a donc tenue en haleine tout au long de ma lecture. Au départ, j’étais captivée par le portrait social d’une époque, qui est parfaitement retranscrite et puis, peu à peu, je me suis prise au jeu de l’enquête menée par les personnages et des secrets de famille qu’elle recèle, à tel point que j’ai eu un mal fou à finir ma lecture. Bonne pioche pour ma part, donc !

Belgravia, Julian Fellowes. Traduit de l’anglais par Valérie Rosier et Carole Delporte.
10/18, 528 p.

2 commentaires sur “Belgravia, Julian Fellowes.

  1. Le résumé m’a tapé dans l’œil !

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