Germania, Harald Gilbers.

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Berlin, été 1944. De jeunes femmes sont retrouvées mortes, nues et mutilées, devant des monuments aux morts de la Première Guerre mondiale. Contre toute attente, le SS-Hauptsturmführer Vogler fait appel à Richard Oppenheimer, l’ancien enquêteur star. Pourtant Oppenheimer est juif et donc officiellement interdit d’exercer… Tiraillé entre son quotidien misérable dans une  » maison juive  » et le confort que lui offre son nouveau statut, Oppenheimer est de plus en plus inquiet. Tous les indices pointent vers un assassin appartenant à l’élite nazie, si Oppenheimer échoue, son destin est scellé. Mais n’est-il pas encore plus dangereux de démasquer le coupable ? Pendant les derniers jours du Reich, les tensions sont à leur comble…

Germania a reçu, en Allemagne, un prestigieux prix de littérature policière et il faut reconnaître que c’est mérité !
Il ne faut d’ailleurs que quelques pages à l’auteur pour installer l’ambiance : 1944 à Berlin, des femmes retrouvées sauvagement assassinées devant des monuments de la Première Guerre mondiale et un ex-commissaire de police juif tiré de sa retraite forcée par rien moins que l’enquêteur nazi chargé d’élucider le dossier.

Voilà qui est pour le moins original : des polars historiques se déroulant durant la Deuxième Guerre mondiale, il y en a des tas, mais à Berlin pendant la même époque, c’est plus rare ! De fait, l’ambiance tendue vient de plusieurs points. Tout d’abord, Oppenheimer, notre enquêteur : s’il est content de reprendre du service, il s’inquiète tout de même foncièrement. Est-il en sécurité ? Qu’en est-il de son épouse, Lisa, une aryenne ? Pire : ses premières conclusions semblent pointer vers une huile du parti nazi… Est-il bien raisonnable, dans sa position, d’accuser un collègue de son employeur ?
L’autre facteur de tension vient du choix du cadre : à Berlin, en 1944, la population est abreuvée de propagande nazie, qui traite le Débarquement de broutille et affirme que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes, sans tenir compte un instant de la multiplication des raids aériens et autres bombardements subis par la capitale. L’auteur nous donne à voir le quotidien des berlinois à l’époque : la terreur des alertes, les changements d’adresse forcés simplement signalés par une petite feuille sur les ruines, la tentative de maintenir, malgré tout, une vie sociale – malgré les filatures de la Gestapo et autres empêcheurs de tourner en rond. C’est extrêmement riche et cela vient, de temps en temps, se substituer à l’enquête, sans toutefois donner l’impression que tout cela traîne de trop en longueur.

L’auteur prend en effet son temps pour dérouler son intrigue : elle est complexe, alimentée par quelques sous-intrigues et cela laisse au lecteur le loisir de se creuser les méninges. L’auteur en profite pour aborder différents sujets relatifs à la période. Tour à tour, il sera donc question des Lebensborn, des bisbilles terribles entre S.S., S.D. et S.A. (différentes sections nazies), des prostituées-agents secrets des bordels berlinois ou encore des visées architecturales du parti nazi. C’est varié, et tout cela vient nourrir une intrigue déjà assez documentée.

Germania est donc un très bon thriller historique : on y trouve une intrigue complexe et originale, un contexte historique soigné, des personnages intéressants et creusés, quel que soit leur bord. Si l’histoire prend un rythme plutôt lent, on ne s’ennuie pas : intrigue dense et ambiance travaillée s’équilibrent à merveille.

Germania, Harald Gilbers. Traduit de l’allemand par Joël Falcoz.
10/18, mars 2016, 480 p.

 

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5 commentaires sur “Germania, Harald Gilbers.

  1. Cassandre dit :

    C’est tout à fait mon genre, je note !

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  2. Lupa dit :

    Un cocktail qui me met l’eau à la bouche, avec la conviction de l’apprécier ! Bingo, je l’ajoute à ma wish-list sans attendre, merci 🙂

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