Phobos #1, Victor Dixen

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Six prétendantes d’un côté. Six prétendants de l’autre. Six minutes pour se rencontrer. L’éternité pour s’aimer. Ils sont six filles et six garçons, dans les deux compartiments séparés d’un même vaisseau spatial. Ils ont six minutes chaque semaine pour se séduire et se choisir, sous l’œil des caméras embarquées. Ils sont les prétendants du programme Genesis, l’émission de speed-dating la plus folle de l’Histoire, destinée à créer la première colonie humaine sur Mars. Léonor, orpheline de dix-huit ans, est l’une des six élues. Elle a signé pour la gloire. Elle a signé pour l’amour. Elle a signé pour un aller sans retour. Même si le rêve vire au cauchemar, il est trop tard pour regretter.

Mars la rouge fait toujours rêver les hommes. Et depuis que la NASA a été rachetée par un fonds d’investissement privé qui a de quoi envoyer une mission, tous les regards sont tournés vers la voisine de la Terre. Envoyer des astronautes ? Trop ennuyeux et pas assez rentable ! Atlas, le fond d’investissement, transforme la mission en voyage sentimental doublé d’un jeu de télé-réalité.
Sauf que… rapidement, on s’aperçoit que la mission est peut-être salement compromise.

Victor Dixen joue donc sur plusieurs tableaux : il y a l’intrigue purement science-fictive (la mission d’exploration), à laquelle s’ajoutent l’intrigue sentimentale (avec le speed dating) et le huis-clos. La forme du roman est extrêmement intéressante, puisque l’auteur a choisi plusieurs points vue non pas conditionnés par les personnages mais par l’angle de vue choisi. Ainsi, on déambule dans le «Champ» (globalement dans le vaisseau, ce que voient les téléspectateurs), le «Contre-champ» (les coulisses de la production) et le «Hors-champ» (les tribulations d’un électron libre ou tout ce qui pourrait nous intéresser en étant dans aucun des champs précédents). Cette découpe très cinématographique permet d’opposer nettement la «réalité» perçue par les acteurs du jeu et les téléspectateurs, à la véritable réalité, celle, sans fards, des coulisses de la production. Et autant dire de suite que l’affaire n’est pas bien rose.

On ne tarde pas à découvrir les tenants et aboutissants du complot. Mais le suspens surgit du fait que nos protagonistes, eux, n’en savent strictement rien… alors on se ronge les sangs en se demandant quand, au juste, ils vont mettre le doigt sur le problème ! Heureusement, il n’y a pas que le complot à se mettre sous la dent. Dans le vaisseau, on suit essentiellement Léonor, chez les filles. Léonor cache un gros secret qui pourrait remettre en cause les résultats du speed-dating. Or il semblerait que chaque candidat a été choisi en fonction du gros secret qu’il dissimule… et à la fin du volume, ils n’ont pas tous été levés, ce qui laisse présager d’intéressantes révélations pour la suite !

Côté personnages, on jongle avec un grand nombre de figures. Dans le vaisseau, il y a pas moins de 12 apprentis astronautes ! Mais c’est Léonor qui raconte cette partie de l’aventure, cristallisant le point de vue chez les filles – ça manque d’un angle de vue chez les garçons, d’ailleurs. Léonor a une personnalité riche : son côté piquant n’est pas désagréable et comme elle est lucide sur ce qu’est réellement une télé-réalité, on profite de ses analyses fines et caustiques. Oui, car le roman est aussi prétexte à dénoncer ce qu’on nous fait avaler pour de la réalité, quand ce n’est que de la manipulation d’image… studios de production et médias sont aimablement mis à mal ici !

Des points négatifs ? Eh oui, malheureusement. D’une part, si le suspense est présent, le complot est assez classique : on n’est donc pas particulièrement surpris de ce côté-là. Heureusement, c’est bien mis en scène, ce qui fait qu’on passe rapidement outre. Plus agaçant : le style didactique. On le ressent notamment dans les paroles de Serena, la productrice, qui a coutume de s’adresser à ses co-comploteurs… en leur expliquant le complot par le menu. Quitte à citer, nom, prénom et fonctions inclus les participants, ou à redémontrer par A+B les différentes étapes. Alors, certes, c’est parfait pour le lecteur. En revanche, niveau vraisemblance, on repassera… ce n’est pas du tout naturel et ça sent bien trop l’exposé pour être crédible, ce qui est bien dommage. Heureusement (bis !), cela ne concerne guère plus que quelques tirades : juste assez pour être noté, pas suffisamment pour avoir envie d’utiliser le livre comme cale-porte : c’est plutôt bon signe !

Ce premier volume de Phobos se présente donc sous les meilleurs augures : l’intrigue est bien menée, les différentes strates sont vraiment intéressantes et les personnages variés. Le mélange de science-fiction et de thriller psychologique en huis-clos fonctionne à merveille et offre une intrigue pleine de suspens. La fin, de plus, nous laisse avec une foule d’interrogations dont on a hâte de découvrir les réponses. Bonne découverte, donc !

◊ Dans la même série : Phobos (2) ;

Phobos #1, Victor Dixen. R. Laffont, 2015, 432 p.

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29 commentaires sur “Phobos #1, Victor Dixen

  1. J’avais hésité à le prendre aux Imaginales! Je pense que je vais attendre que la suite sorte pour tenter 🙂

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  2. Ptitetrolle dit :

    Je ne l’ai pas encore fini mais pour l’instant je suis totalement d’accord avec ta chronique.

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    • Sia dit :

      Eh bien ça me rassure, car je n’ai vu passer que des coups de cœur et ces petits points m’ont vraiment trop gênée pour être aussi emballée. J’ai hâte de lire ta chronique !

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  3. Camille dit :

    J’ai bien envie de le lire! Je suis contente que tu ne l’aies pas démonté, j’aurais été bien triste de l’avoir acheter! 😛

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  4. lirado dit :

    Je l’ai commandé cette après-midi. L’histoire m’intrigue et les échos sont plutôt bons dans l’ensemble. Alors maintenant j’ai hâte de le recevoir !

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  5. solessor dit :

    Le point de vue utilisé semble assez original et intéressant ! L’idée me plait ! Et puis ton article m’a donné envie de connaître les secrets des protagonistes, c’est un bon point ! 😉
    Par contre, le côté superficiel des conversations me gonfle éminemment, en général… Il faudra que je feuillette pour me donner une idée !

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  6. Lupa dit :

    Malgré tes petits bémols, je continue à penser qu’il pourrait me séduire ! Cette idée de speed-dating pour prétendants à la colonisation de Mars m’emballe… De toute façon, dès qu’il est est question de coloniser cette planète je suis partante ^^ Peut-être une sorte de délire prémonitoire 😀

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  7. Attrape-mots dit :

    J’ai beaucoup aimé ce roman, mais comme toi le côté didactique m’a gêné… les dialogues de Serena sont tout sauf vraisemblables!

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  8. Naomi. dit :

    Bonjour !
    J’ai beaucoup aimé ton avis sur Phobos, qui est véritablement un chef d’oeuvre haha. Bref, le passage où tu parles des points de vue est très intéressant, tout comme les points négatifs que tu as trouvé au roman. Du coup, je me demandais s’il serait possible de partager ton avis sur le blog que je tiens avec d’autres personnes ? Il est officiellement ouvert depuis aujourd’hui même, et notre première chronique est justement Phobos. On s’était dit que pour enrichir chacune de nos critiques, on partagerait l’avis d’autres blogs, mais seulement si ces dits blogs acceptent, d’où ma demande.
    Merci beaucoup d’avoir pris le temps de lire ce commentaire.

    – Naomi, du blog Lit Thé Râle.

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  9. […] à celle de Notre bibliothèque dorée, qui est très intéressante à lire, ou encore celle de Encre & Calames […]

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  10. […] que de vivants, Guillaume Guéraud (Rouergue). – Totem, Thomas Villate (Fleurus). – Phobos, Victor Dixen (R. Laffont). – Mósa Wòsa, Nathalie Le Gendre […]

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  11. […] Les Maîtres des brisants, tome 1, Chien-de-la-Lune, Erik L’Homme. Phobos, tome 1, Victor Dixen. Les Pilleurs d’âmes, Laurent […]

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  12. […] Phobos, tome 1, Victor Dixen (R. Laffont). – U4 : Yannis, Florence Hinckel (Nathan / Syros). – […]

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  13. […] (Scrineo) ♥ La Passe-Miroir, tomes 1 & 2 de Christelle Dabos (Gallimard Jeunesse) – Phobos, tomes 1 & 2 de Victor Dixen (Robert Laffont, R) – #Bleue de Florence Hinckel (Syros) […]

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  14. […] Victor Dixen, Phobos, Robert Laffont. – Silène Edgar, Adèle et les noces de la reine Margot, Castelmore. – […]

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  16. […] revient à Victor Dixen pour Phobos ! L’auteur remercie les lecteurs et en profite pour faire une petite bande-annonce […]

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  17. […] le prix 2016 revient à Victor Dixen pour Phobos […]

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  18. Il est dans ma PAL et me fait de l’oeil depuis ma bibliothèque maintenant que je l’ai (enfin) ! 😀 ❤

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